L'Allemagne est libre de retirer ses soldats d'Incirlik, dit le ministre turc des Affaires étrangères

L'Allemagne peut retirer les quelque 250 soldats qu'elle a stationnés sur la base aérienne d'Incirlik en Turquie dans le cadre de sa participation à l'Otan si elle le souhaite. /Photo d'archives/REUTERS/Fabian Bimmer

ISTANBUL (Reuters) - L'Allemagne peut retirer les quelque 250 soldats qu'elle a stationnés sur la base aérienne d'Incirlik en Turquie dans le cadre de sa participation à l'Otan si elle le souhaite, a déclaré jeudi le ministre turc des Affaires étrangères. Le gouvernement allemand a indiqué cette semaine qu'il examinait la possibilité de déployer dans un autre pays ses soldats participant à l'effort de guerre de l'Alliance atlantique contre le groupe Etat islamique en Syrie. La raison invoquée par l'Allemagne est le refus opposé par les autorités turques à la visite de parlementaires allemands sur la base aérienne située dans le sud de la Turquie. Officiellement, Ankara estime que le moment n'est pas opportun pour une telle visite. Dans la réalité, cet épisode s'inscrit dans une querelle plus large qui oppose la Turquie et l'Allemagne. "S'ils veulent partir, c'est leur choix. Nous n'allons pas les supplier. C'est eux qui ont voulu venir et nous les avons aidés. S'ils veulent s'en aller, nous leur dirons au revoir", a déclaré le ministre Mevlut Cavusoglu, ajoutant que le gouvernement allemand devait cesser d'avoir une "approche condescendante" à l'égard de la Turquie. "Vous ne pouvez plus traiter la Turquie comme cela vous chante", a ajouté Cavusoglu sur la chaîne de télévision NTV. "Si vous voulez vous rapprocher de la Turquie, vous devez la traiter comme une amie et ne pas vous comporter en patron". Les relations entre Berlin et Ankara n'ont cessé de se détériorer depuis la campagne sur le référendum constitutionnel du 16 avril qui a permis au président turc Recep Tayyip Erdogan d'obtenir un élargissement de ses pouvoirs. Lors de la campagne, Erdogan voulait que ses ministres puissent tenir des meetings électoraux en Allemagne afin de convaincre les électeurs de la diaspora turque. Les autorités allemandes se sont opposées à de tels rassemblements, évoquant des questions de sécurité publique et provoquant la colère d'Erdogan dans un scrutin dont le résultat, longtemps incertain, s'est révélé très serré en sa faveur. Maniant une rhétorique agressive, Recep Erdogan avait accusé les autorités allemandes d'utiliser une stratégie inspirée du nazisme. L'an passé, le président turc avait déjà empêché pendant plusieurs mois la venue de parlementaires allemands sur la base d'Incirlik. Ce refus faisait suite à l'adoption par le Bundestag d'une résolution parlementaire reconnaissant le génocide des Arméniens par les forces ottomanes en 1915. La Turquie, qui refuse l'utilisation de ce terme pour qualifier la mort d'environ 1,5 million d'Arméniens sur son sol entre 1915 et 1916, avait rappelé son ambassadeur à la suite de cette résolution. (Daren Butler et Humeyra Pamuk; Pierre Sérisier pour le service français)