L'accident à la Rochelle relance le débat sur le permis de conduire à vie, quelle est la loi chez nos voisins européens ?

Alors que le Parlement européen a récemment renoncé à imposer une visite médicale aux conducteurs âgés, la France reste un cas particulier au sein de l'UE.

En France, le permis de conduire est attribué à vie, mais chez nos voisins européens, des visites médicales sont obligatoire passé un certain âge (Photo : Getty Images/Maskot)

Le drame survenu à La Rochelle aurait-il pu être évité avec une législation différente ? Ce mercredi 5 juin, un groupe de 12 enfants âgés de 8 à 11 ans, qui circulait à vélo, a été renversé par un véhicule conduit par une dame âgée de 83 ans dans une rue de la préfecture de Charente-Maritime. A la suite de cet accident, trois mineurs ont été hospitalisés en urgence absolue et trois autres en urgence relative.

Alors qu'un enquête a été ouverte pour blessures involontaires par conducteur, la mention de l'âge avancé de l'automobiliste qui a provoqué l'accident n'a pas manqué de relancer le débat autour du permis de conduire à vie. Depuis plusieurs années, des associations et des élus militent en effet pour imposer un contrôle des capacités à conduire au-delà d'un certain âge.

Pauline Déroulède : "J’ai vu ma jambe et j’ai compris que ma vie allait changer"

Comparé à la législation en vigueur chez la majorité de ses voisins européens, la loi française est en effet particulièrement laxiste en la matière. À partir du moment où une personne obtient son permis de conduire, celui-ci reste automatiquement valable jusqu'au décès de la personne en question (à condition, bien sûr, que celle-ci ne commette pas d'infraction passible d'un retrait de permis et que son nombre de points ne descende pas à zéro).

Au sein de l'Union européenne (UE), deux autres pays seulement (l'Allemagne et la Pologne) ont une législation similaire à la nôtre et délivrent donc un permis de conduire à vie. A l'inverse, la plupart des autres pays membres ont mis en place des règles plutôt strictes pour s'assurer que les conducteurs les plus âgés ne représentent pas un danger pour eux-mêmes et pour les autres usagers de la route.

Comme le rapportait il y a quelques mois un article de Notre Temps, ces mesures différent selon les pays. Aux Pays-Bas, les automobilistes doivent par exemple passer un examen médical tous les 5 ans à partir de 75 ans. Le principe est le même au Danemark et en Finlande, mais à partir de 70 ans, ou encore en Espagne, en Grèce et en République tchèque, où le seuil d'âge a été fixé à 65 ans.

L'Italie a pour sa part mis en place un dispositif encore plus sophistiqué. Selon Europe 1, chez nos voisins transalpins, une première visite médicale est obligatoire à l'âge de 50 ans pour tous les automobilistes. La loi prévoit un nouvel examen à 60 ans, puis trois autres à 70, 75 et 80 ans. Les octogénaires désirant conserver leur permis de conduire doivent ensuite faire vérifier tous les deux ans leur aptitude à conduire.

Dans la même lignée, la loi en vigueur au Portugal impose des visites médicales à 40, 50, 65 et 75 ans. Passés les trois-quarts de siècle, les automobilistes lusitaniens doivent voir un médecin tous les deux ans. Le principe de l'examen médical tous les deux ans après 75 ans est également appliqué en Suisse, notre seul voisin métropolitain ne faisant pas partie de l'UE.

A la lumière de cet état de faits peu reluisant pour la sécurité routière française, peut-on envisager un changement prochain de la loi dans notre pays ? Cela semble difficile à envisager après l'épisode survenu il y a quelques mois à peine à l'échelon européen. Le 28 février dernier, le parlement de Strasbourg a ainsi été invité à se prononcer sur une directive sur le permis de conduire, qui comportait notamment un amendement de l'eurodéputée française Karima Delli visant à rendre obligatoire la visite médicale tous les 15 ans pour tous les automobilistes.

Sous la pression des groupes de droite (comprenant notamment les élus français des partis Renaissance et Rassemblement National), ce texte a finalement été rejeté à 323 voix contre 270, comme l'indique Ouest France. Il faudrait donc une évolution de législation au niveau national pour espérer un changement, mais comme l'ont montré leurs votes du 28 février, les deux partis comptant le plus de députés à l'Assemblée nationale n'ont apparemment aucune intention d'imposer une visite médicale aux conducteurs français.

Cette obstination semble toutefois aller à l'encontre de l'évolution de l'opinion publique sur le sujet. En février, au moment où la directive sur le permis de conduire était en discussion au Parlement européen, un sondage Ifop relayé par Le Parisien avait révélé que 59 % des personnes interrogées étaient favorables à une visite médicale pour tous. 70 % des sondés jugeaient même qu’un tel contrôle pour les séniors serait une bonne idée.