La réforme des retraites à l'épreuve de la rue

Les opposants à la réforme des retraites vont tenter de se faire entendre mardi à l'appel des syndicats CGT, Force ouvrière, FSU et Solidaires et du Front de gauche lors d'une journée de grèves et de manifestations sans grand risque pour le gouvernement. /Photo d'archives/REUTERS/Christine Grunnet

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Les opposants à la réforme des retraites vont tenter de se faire entendre mardi à l'appel des syndicats CGT, Force ouvrière, FSU et Solidaires et du Front de gauche lors d'une journée de grèves et de manifestations sans grand risque pour le gouvernement. La principale inconnue sera la mobilisation des jeunes, coeur de cible du chef de l'Etat socialiste François Hollande mais principal public touché par une réforme qui les obligera à travailler plus tard que leurs aînés, du fait de l'allongement de la durée de cotisation à 43 ans à l'horizon 2035. Le secrétaire général de la CGT, Thierry Lepaon, ne s'y est pas trompé et leur a adressé un signal lors de son discours de rentrée, jeudi à Aubervilliers : "Les jeunes sont les premières victimes. Cette réforme est une réforme anti-jeunes." Le syndicat étudiant Unef et d'autres organisations proches de la gauche comme la Jeunesse ouvrière chrétienne, les jeunes communistes et jeunes écologistes, l'Union nationale lycéenne, la Mutuelle des étudiants, appellent aussi à manifester mardi. "Cette réforme pénalise notre génération, celle qui est née après 1973", explique à Reuters le président de l'Unef, Emmanuel Zemmour. "C'est nous qui devrons cotiser plus longtemps. C'est la double peine, parce que nous souffrons déjà du chômage." L'objectif du collectif "La retraite, une affaire de jeunes", auquel appartiennent l'Unef et une quinzaine d'autres organisations, est d'obtenir des mesures compensant l'effort demandé aux jeunes pour financer les retraites, précise-t-il. Le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) critique aussi l'allongement de la durée de cotisation et juge insuffisantes les mesures annoncées en faveur des étudiants. Le MJS n'appelle pas à manifester. "Nous avons d'autres endroits où nous faire entendre", dit à Reuters son président, Thierry Marchal-Beck, qui admet toutefois que nombre de jeunes du PS sont adhérents d'organisations qui défileront mardi. ELYSÉE ET MATIGNON ZEN L'Elysée et les services du Premier ministre ne montrent cependant aucun signe d'inquiétude et un proche de Jean-Marc Ayrault qualifie de "fable" l'idée d'une réforme "anti-jeunes". "Il faut tordre le coup à cette idée. C'est le contraire", explique-t-on à Matignon. "Si nos régimes s'étaient écroulés, les premières victimes auraient été les jeunes d'aujourd'hui." Jean-Marc Ayrault a déminé dans une large mesure le terrain en renonçant à relever la Contribution sociale généralisée (CSG) et à réviser le calcul des pensions des fonctionnaires, et en reportant à 2020 l'allongement de la durée de cotisation. "Qu'il y ait une forte mobilisation serait étonnant", dit-on de source gouvernementale. La réforme des retraites n'est d'ailleurs qu'un objet parmi d'autres de l'appel de la CGT, FO, Solidaires et Sud, avec les salaires, l'emploi et l'avenir des services publics. "C'est un peu un indice", estime l'entourage du Premier ministre. "Cette manifestation ne sera pas tout à fait ce qu'ils pouvaient en attendre il y a deux mois". A huit jours de l'examen en conseil des ministres du projet de loi sur les retraites, la CGT annonce néanmoins plus de 180 manifestations et rassemblements dans toute la France. Le Parti communiste, ses partenaires du Front de gauche et le Nouveau parti anticapitaliste, qui accusent cette réforme de faire la part trop belle au patronat, y participeront aussi. Mais contrairement à septembre 2010, quand la précédente réforme des retraites avait mobilisé jusqu'à un million de manifestants selon la police, 2,5 millions selon les syndicats, ces derniers sont cette fois désunis. Si CFDT, CGC, CFTC et Unsa ont aussi des réserves sur le projet gouvernemental, elles ne s'associent pas aux positions maximalistes des organisateurs de la mobilisation de mardi. "Depuis le début, je fais le jeu de la concertation pour obtenir des droits nouveaux", a expliqué à i