La France écarte toute suspension de ventes d'armes à Ryad

PARIS (Reuters) - La France a une nouvelle fois opposé une fin de non-recevoir jeudi aux demandes de plusieurs ONG qui réclament une suspension de ses ventes et livraisons d'armes à l'Arabie saoudite en raison de son rôle dans le conflit au Yémen, assurant que ces contrats faisaient l'objet d'un contrôle très strict.

"Il y a un contrôle très strict des exportations d'armement (...) qui obéit à des critères tout à fait précis, y compris le souci des situations où des populations civiles peuvent être mises en danger", a-t-on souligné à l'Elysée à quelques jours de la visite en France du prince héritier saoudien Mohammed ben Salman.

"Nous avons un examen extrêmement strict, rigoureux, et au cas par cas de chaque demande d'autorisation d'exportation d'armement", a-t-on ajouté.

La France est l'un des principaux pourvoyeurs d'armements de l'Arabie saoudite, des Emirats arabes unis, de l'Egypte, engagés militairement au Yémen au côté d'autres pays arabes sunnites, avec le soutien des Etats-Unis, contre les rebelles houthis appuyés par l'Iran chiite.

Le conflit a fait plus de 10.000 morts, déplacé plus de trois millions de personnes et menace d'une famine généralisée le pays le plus pauvre de la péninsule arabique.

Mandaté par Amnesty international France et Action des Chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), le cabinet d'avocats Ancile a estimé en mars que Paris s'exposait à un risque juridique "élevé" en livrant à Ryad et aux Emirats du matériel militaire dont l'utilisation au Yémen est susceptible de violer le droit international humanitaire.

Mercredi, dix ONG ont appelé Emmanuel Macron à demander à Mohammed ben Salman, en visite en France du 8 au 10 avril, de mettre un terme aux attaques contre les civils au Yémen et de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire.

A Paris, le député La République en marche (LaRem) Sébastien Nadot et une quinzaine de députés de la majorité ont déposé ce jeudi une demande de commission d’enquête parlementaire relative au "respect des engagements internationaux de la France au regard des autorisations d’exportations d’armes, munitions, formation, services et assistance accordées ces trois dernières années aux belligérants du conflit au Yémen".

Sa proposition de résolution doit recevoir l'aval du groupe LaRem dirigé par Richard Ferrand puis être examinée par la commission des Affaires étrangères. Si elle est jugée recevable, elle sera soumise au vote de l'Assemblée nationale.

Selon un sondage YouGov publié fin mars, trois Français sur quatre (75%) souhaitent que la France suspende ses exportations d'armes vers les pays impliqués dans le conflit au Yémen.

(Marine Pennetier avec Elizabeth Pineau, édité par Sophie Louet)