La demande mondiale d'énergie va menacer les ressources en eau
PARIS (Reuters) - Les besoins croissants en énergie vont de plus en plus menacer les ressources en eau dans le monde et ce phénomène sera aggravé par les conséquences du changement climatique, selon un rapport de l'Unesco publié vendredi. La demande d'énergie, deuxième poste de consommation d'eau au monde, va croître d'un tiers d'ici 2035, soulignent les experts de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, basée à Paris. "L'électricité va compter pour le plus gros morceau de l'augmentation de cette demande en énergie et 90% de la production d'électricité est gourmande en eau", a expliqué l'auteur de ce rapport, Richard Connor, lors d'une rencontre avec des journalistes. Les centrales thermiques, qui génèrent de l'électricité à partir du gaz ou du charbon, ou encore les centrales nucléaires, utilisent l'eau pour alimenter leur système de refroidissement. "Ces installations posent un problème de mobilisation de la ressource mais elles prélèvent et rejettent ensuite l'eau, c'est ce qu'on appelle des boucles ouvertes", tempère Richard Connor. "Dans certains pays d'Europe et aux Etats-Unis, les centrales thermiques comptent pour près ou plus de la moitié de la totalité des prélèvements d'eau, soit encore plus que l'agriculture", ajoute-t-il, citant par exemple le Danemark. Mais les systèmes en "boucle fermée", qui prélèvent moins d'eau mais ne la rejettent pas dans la nature, sont particulièrement amenés à se développer dans les prochaines années, souligne le rapport. PAS D'ÉNERGIE MIRACLE Parallèlement, les changements climatiques vont dans les décennies à venir augmenter le phénomène de stress hydrique dans certaines régions, comme l'Asie centrale, où les besoins d'énergie explosent sous l'effet de la croissance. "La sécheresse menace l'hydraulique dans plusieurs pays et, à l'inverse, la disponibilité de l'eau pourrait être une contrainte à l'expansion de l'électricité dans plusieurs pays à l'économie émergente", dit-il. Pour répondre à ces défis, l'Unesco estime que les pays doivent développer les énergies renouvelables les plus économes en eau, combiner des sites de production d'électricité et de service d'eau comme les usines de dessalement, ou encore utiliser de l'eau salée ou usée pour le refroidissement. "Mais aucune énergie n'est une solution miracle", admet l'auteur du rapport, à propos notamment des grands barrages hydrauliques, une énergie fiable qui peut produire beaucoup et sans impact carbone, mais dont l'impact social et environnemental peut être élevé. L'énergie hydraulique conserve cependant un fort potentiel sur la planète, notamment dans les régions les plus touchées par la "rareté économique" de l'eau, dit Richard Connor. Un phénomène très présent en Afrique subsaharienne, où la ressource existe mais où les populations y ont peu accès en raison du manque d'infrastructures. L'énergie représente environ 15% de l'eau utilisée dans le monde, derrière l'agriculture, écrasant premier consommateur qui totalise 70%. L'utilisation domestique ne représente que 10% de cette consommation. (Marion Douet, avec Alistair Doyle à Oslo, édité par Yves Clarisse)