La Corée du Nord, motif central du limogeage de Rex Tillerson
WASHINGTON (Reuters) - Une divergence de vue sur la Corée du Nord a été l'un des facteurs clefs ayant poussé Donald Trump à annoncer cette semaine le remplacement de Rex Tillerson à la tête de la diplomatie américaine, a-t-on appris auprès de plusieurs sources proches de l'administration.
Le président américain, qui a surpris la planète la semaine dernière en se disant prêt à rencontrer le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un, redoutait que Tillerson fasse trop de concessions aux Nord-Coréens, ajoute-t-on de même source.
Dans les mois de tensions extrêmes entre Washington et Pyongyang qui ont précédé l'annonce-choc de Trump, son secrétaire d'Etat incarnait en effet le camp des partisans de négociations avec la Corée du Nord, mais il a été tenu à l'écart de la réflexion présidentielle autour de l'invitation de Kim Jong-un transmise par des émissaires sud-coréens.
Lorsque ces émissaires sud-coréens ont annoncé jeudi dernier que Trump avait donné son accord pour rencontrer Kim Jong-un, avant que le président américain confirme la préparation de ce sommet historique et inédit, Tillerson était en tournée diplomatique en Afrique.
Trump voulait mettre en place "une nouvelle équipe avant les discussions avec la Corée du Nord et pour les négociations commerciales en cours", précisait-on à la Maison blanche le jour même de l'annonce du renvoi de Tillerson.
"Il devait avoir quelqu'un en qui il a totalement confiance", a dit à Reuters un haut responsable américain.
Selon cette source, Trump travaillait depuis plusieurs semaines au remaniement, à ce jour le plus spectaculaire de son mandat, qu'il a dévoilé mardi via un simple tweet annonçant la nomination du directeur de la CIA Mike Pompeo à la tête de la diplomatie américaine et le remplacement de ce dernier à l'agence centrale du renseignement par Gina Haspel.
Vingt-quatre heures après l'annonce de ce possible sommet avec le dirigeant nord-coréen, il a demandé au secrétaire général de la Maison blanche, John Kelly, d'informer Rex Tillerson qu'il devait démissionner, dit-on au sein de la présidence américaine.
D'après une source, Kelly a tenté de protéger Tillerson aussi longtemps que possible mais Trump, en plus du dossier nord-coréen, supportait de moins en moins la tendance de son secrétaire d'Etat à le contredire sur toute une série de dossiers et avait informé des proches de son projet de s'en séparer.
Rex Tillerson a obtenu que le remaniement ne soit pas annoncé avant son retour à Washington, écourtant sa tournée en Afrique.
Steve Goldstein, sous-secrétaire d'Etat chargé des affaires publiques, a rapporté que Tillerson ignorait les raisons de son limogeage alors qu'il avait l'intention de rester à son poste. Il a été à son tour limogé.
Tillerson, dont le mandat se terminera officiellement le 31 mars, est revenu mercredi au département d'Etat où il a chargé son adjoint, John Sullivan, d'assurer l'intérim et s'est entretenu avec de hauts responsables du ministère.
Sa directrice de cabinet, Margaret Peterlin, et son adjointe, Christine Ciccone, ont démissionné. Le directeur des affaires politiques du département d'Etat, Brian Hook, est attendu vendredi à Vienne pour une réunion consacrée à l'accord de juillet 2015 sur le nucléaire iranien. On ignore s'il restera en poste après le 31 mars.
(Steve Holland et Lesley Wroughton; Henri-Pierre André pour le service français)