L’opéra « Saint François d’Assise » réinventé d’Adel Abdessemed

Le baryton Robin Adams (saint François), Claire de Sévigné (l’ange) et l’oiseau, animal-totem de l’artiste. - Credit:
Le baryton Robin Adams (saint François), Claire de Sévigné (l’ange) et l’oiseau, animal-totem de l’artiste. - Credit:

«À l'attaque, habibi ! » L'encouragement lancé d'une voix chaleureuse par Adel Abdessemed en direction de son interprète fuse sous les ors du Grand Théâtre de Genève. Sur scène, Robin Adams répond d'un simple pouce levé. C'est que le baryton anglais, suspendu par des fils quasi invisibles, doit rester concentré : il lui faut chanter tout en s'élevant lentement dans les airs… Ce tableau intitulé « Le Prêche aux oiseaux », moment fort du Saint François d'Assise d'Olivier Messiaen, offre une image saisissante : le saint, en communion avec la nature et avec Dieu, entre en lévitation, encadré par deux octogones symétriques sur lesquels sont projetées des images d'oiseaux aux mille couleurs.

« Quand Aviel Cahn [le directeur du Grand Théâtre de Genève, NDLR] est venu me chercher pour monter cette œuvre, j'ai d'abord refusé, raconte Adel Abdessemed qui, en dehors d'une collaboration avec Angelin Preljocaj, n'avait pas d'expérience scénique. Et puis il est revenu à la charge. J'ai commencé à m'imprégner de la musique et un dessin m'est venu, lié aux tout premiers mots que prononce saint François : “J'ai peur, sur la route…” » La peur, c'est sans doute la première émotion que suscite cette œuvre créée en 1983 à l'opéra Bastille et très rarement montée depuis. Un orchestre de 119 musiciens, 150 choristes, neuf rôles chantés, quatre heures de musique et de présence en scène quasi ininterrompue pour l'interprète de François… Il s'agit bien d'un mastodonte qui peut virer [...] Lire la suite