L’italianisation du Tyrol du Sud, ce “mensonge répété mille fois”

Vue d’Italie, du Sud donc, c’est le Haut-Adige. Vu d’Autriche, c’est-à-dire du Nord, c’est le Tyrol du Sud. Mais qu’est-ce que ça change au juste ? Tout, peut-être.

Il y a cent ans, Benito Mussolini qualifiait la minorité allemande, qui est ici en réalité une majorité, de “relique ethnique”. Aujourd’hui encore, cette plaie n’est pas pleinement cicatrisée.

“Un mensonge répété mille fois passe pour une vérité. Ainsi, l’italianisation du Tyrol du Sud a changé la perception que les Italiens ont de ce territoire”, explique l’écrivain Andrea Franzoso, qui, il y a un an, a quitté Milan pour s’installer dans cette région.

Mais de quel mensonge parle-t-on au juste ? Le dernier acte de ce drame historique est la récente requête lors d’un conseil provincial de réviser toute la toponymie du Tyrol du Sud. Mais pour comprendre cette question il faut remonter bien plus loin.

“Un véritable travail d’imagination”

La région du Tyrol du Sud fut baptisée pour la première fois Haut-Adige sous l’occupation napoléonienne. Cette dénomination sera ensuite reprise par les fascistes [à la suite de la Première Guerre mondiale, lorsque l’Italie récupéra ce territoire de l’Empire austro-hongrois]. Un nom utile pour le régime, soucieux de donner une teinte tricolore au nom du Tyrol, autrement trop germanique.

Carte de Haut-Adige / Tyrol du Sud. Courrier international..
Carte de Haut-Adige / Tyrol du Sud. Courrier international..

L’italianisation de ce territoire débute en 1923, et la figure centrale de toute l’opération sera un certain Ettore Tolomei, un géographe fasciste qui va créer 8 000 dénominations italiennes pour renommer les lieux du Tyrol du Sud. Il ne s’agissait pas simplement de traductions de l’allemand vers l’italien, mais, souvent, d’un véritable travail d’imagination. Les décrets fascistes n’ayant jamais été abrogés, ces noms sont restés jusqu’à aujourd’hui.

“Lorsqu’on falsifie un nom, on viole la dignité d’un lieu”

Le linguiste Cristian Kollmann, 52 ans, diplômé de l’université de Munich, en Bavière, est un véritable passionné de cette question. Cela tient peut-être à son nom, auquel manque le “h” du milieu car l’officier d’état civil italien a voulu l’écrire de la manière la plus italienne possible. Aujourd’hui, Kollmann dirige le parti indépendantiste Süd-Tiroler Freiheit – Liberté sud-tyrolienne – et il explique sa bataille en ces termes :

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