L’interdiction des emballages plastique prévue pour 2025, ne sera pas finalement pas appliquée

Les pots de yaourt en polystyrènes seront toujours dans nos rayons en 2025.
STEEVE JORDAN / AFP Les pots de yaourt en polystyrènes seront toujours dans nos rayons en 2025.

CONSOMMATION - Ce sont les pots de yaourt, de compote ou les barquettes de viande dans les supermarchés que nous achetons tous. Selon la loi antigaspillage de 2020, ces emballages faits en polystyrène devaient être totalement recyclés à partir de 2025, et si ce n’était pas le cas, interdits à la vente. Mais, selon Le Monde et France Info, il n’en sera finalement rien. Et les industriels pourront librement continuer de les utiliser.

Les pires emballages de nos plats à emporter ne sont pas toujours ceux qu’on croit

La raison d’un tel renoncement ? Les industriels s’étaient engagés à créer une filière française du recyclage du polystyrène en 2025 pour continuer à vendre leurs produits sous ces emballages. À six mois de la date fatidique, rien n’a été fait. Et grâce à la pression des lobbys, les industriels ont obtenu du gouvernement qu’il revienne sur l’interdiction. Contacté par Le Monde, le ministère de la transition écologique a admis être dans une « impasse ».

L’engagement des industriels

Mais pourquoi cette filière française du recyclage du polystyrène n’a-t-elle pas vu le jour ? Selon France Info, les industriels apprécient particulièrement ce matériau car il est léger et facilement cassable - pratique pour détacher son yaourt du lot. Actuellement, aucun centre de recyclage ne sait traiter ces déchets, et l’immense majorité sont brûlés et enfouis, quand 5 % de ces emballages sont expédiés en Espagne ou en Allemagne pour être transformés. Le tout alors que 14 milliards de pots de yaourt sont achetés et jetés chaque année en France.

En 2021, un consortium d’industriel baptisé PS25 - dont font partie Syndifrais, le syndicat qui représente les professionnels des produits laitiers mais aussi d’autres acteurs du lobby du plastique comme Plastics Europe, Polyvia ou Elipso - s’engage dans le cadre d’une charte à créer une filière française de « recyclage des emballages en polystyrène avec retour au contact alimentaire » d’ici 2025, pour éviter leur interdiction.

Un rapport gardé secret

Quelques mois plus tard, un rapport d’étape est remis au ministère de la Transition écologique. Il n’a jamais été public, mais Le Monde et France Info ont pu le consulter. Ce document affirme notamment que les plastiques auraient un meilleur bilan environnemental que leurs alternatives, une analyse expédiée en une page et demie. Pas une phrase sur les modèles mis en place à l’étranger, alors que l’Allemagne prévoit des pots de verre consignés.

Qui plus est, le rapport n’a pas de bibliographie et avance de nombreuses allégations non sourcées, et n’aborde pas les études défavorables au polystyrène. Ce qui n’empêche pas le gouvernement et les industriels de se baser sur ce document pour décider de continuer d’utiliser du polystyrène et de le recycler chimiquement.

Trois projets de recyclages chimiques - portés par Michelin, Ineos et TotalEnergies - sont mis en avant dans le rapport. Mais tous sont abandonnés aujourd’hui. « Quand le rapport est sorti en 2021, le contexte était différent. Avec des industriels comme Michelin on pensait qu’il y avait des acteurs sérieux, mais ça n’a pas fonctionné à cause d’écueils techniques inattendus. Le problème c’est qu’on s’en est rendu compte trop tard », a expliqué le gouvernement à France Info.

Une ONG réclame une commission d’enquête

Face à cette situation, l’ONG Zero Waste France (ZWF) demande une commission d’enquête parlementaire après les élections législatives. L’association dénonce également un « gaspillage d’argent public », alors que les ministères de la Transition écologique et de l’Industrie avaient lancé un appel d’offres sur le recyclage chimique, avec une enveloppe de 300 millions d’euros. L’Ademe, en charge de cet appel, n’a pas souhaité répondre à France Info au sujet de l’utilisation de cet argent.

Face à cette impasse, Dominique Faure, la ministre chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité a affiché sa volonté de reporter l’interdiction des emballages en polystyrène à 2030, pour se conformer au nouveau règlement européen.

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