L’escalier de la Samaritaine recouvert de 10 000 perruques par l’artiste Charlie Le Mindu

Charlie Le Mindu, ici au milieu de son installation « Tricophilia », à la Samaritaine.
Charlie Le Mindu, ici au milieu de son installation « Tricophilia », à la Samaritaine.

ART - La Samaritaine, rhabillée pour l’hiver... et la Fashion Week. Depuis ce lundi 27 février, date d’ouverture de la semaine du prêt-à-porter féminin à Paris, le grand escalier emblématique du célèbre magasin parisien s’est paré d’un curieux manteau. Seraient-ce des poils ? Des cheveux ? Presque : 10 000 perruques.

Brunes, blondes, noires ou grise. Elles ont toutes été coiffées et assemblées par le même homme : Charlie Le Mindu, créateur de mode new-yorkais et coiffeur peu conventionnel, originaire de Dordogne. De cette grosse masse ébouriffée, les couleurs foncées prédominent. « C’est proportionnel au pourcentage qu’elles représentent à l’échelle mondiale, en matière de cheveux naturels », nous explique l’artiste de 36 ans, qui dit avoir voulu « reproduire une carte du monde du cheveu ».

Côté texture, elles ne sont pas bouclées, ni même frisées, lisées ou encore moins ondulées. « On est sur un truc zig zag, continue le trentenaire. Ce n’est pas naturel. C’est quelque chose que l’on peut obtenir en défaisant une tresse, un type de cheveux qu’on retrouve beaucoup sur les défilés. » Les services en la matière de Charlie Le Mindu sont souvent loués, notamment chez Mugler et Vivienne Westwood.

« Tricophilia », à la Samaritaine, jusqu’au mois de mai.
« Tricophilia », à la Samaritaine, jusqu’au mois de mai.
« Tricophilia », à la Samaritaine, jusqu’au mois de mai.
« Tricophilia », à la Samaritaine, jusqu’au mois de mai.

L’installation évolutive à la Samaritaine - elle doit être enrichie de fleurs, puis sculptée et enfin upcyclée sous forme de porte-clés à l’issue de ses quatre mois d’existence - porte un nom : Tricophilia. Traduction anglaise de la « tricophilie », le terme désigne l’attraction sexuelle d’un individu pour la pilosité humaine.

Un tricophile assumé

Charlie Le Mindu ne s’en cache pas, il se revendique tricophile. « Dès que je rencontre une personne, peu importe son genre, la première chose que je regarde, ce sont ses cheveux et sa pilosité, nous dit ce dernier. Ce n’est pas un jugement de style ou d’esthétique. J’observe la texture, j’évalue le pourcentage de poils. Ça me ramène à des images, des choses beaucoup plus sensuelles. »

Le professionnel du coup de ciseaux ajoute : « J’aime le côté ’psy’ du cheveu. On peut changer la vie d’un client. On peut la détruire ou la rendre meilleure rien qu’avec une coupe de cheveux. Ça m’amuse de bouger leurs émotions. »

Charlie Le Mindu, ici au mois de février, à Paris.
Charlie Le Mindu, ici au mois de février, à Paris.

Ce centre d’intérêt si particulier, il l’aurait développé dès l’âge de 3 ans. « Ma mère, qui avait les jambes poilues, m’a raconté que j’étais toujours collé à elle et que je faisais que lui toucher les cheveux... euh pardon, les poils », se rattrape le passionné. Ses Barbies, il les laissait tremper tout l’hiver dans la piscine attenante à la caravane familiale. « Leurs cheveux devenaient tout verts avec la formation d’algues », se souvient-il, non sans malice.

Lady Gaga et atelier « merkin »

Le temps s’est écoulé. Et le Français, qui vit depuis une dizaine d’années de l’autre côté de l’Atlantique, a coiffé un parterre de têtes tout aussi célèbres que la poupée Mattel, allant de Grace Jones à Madonna, en passant par Lana Del Rey et Amanda Lepore, ou, chez nous, les chanteuses Angèle et Yelle.

L’un de ses souvenirs les plus marquants ? Le jour où, par faute de temps, il a dû décolorer les cheveux de la chanteuse Peaches pendant l’un de ses DJ set. « Au bout d’une heure, je lui ai dit de baisser la tête. Et là, je lui ai rincé les cheveux avec une bouteille de champagne. Elle a fini son live en étant blonde, comme elle le voulait. C’était super », se souvient-il amusé.

Son travail, qu’il qualifie de « haute coiffure », est décalé et punk. Il dépasse les frontières du salon de coiffure, comme l’illustrent ses créations vestimentaires à base de cheveux ou ses sculptures capillaires pouvant peser jusqu’à 26 kg. C’est à lui qu’on doit, en 2009, l’imposante coiffe en forme de lèvres faite de cheveux naturels, de soie et de mousse que Lady Gaga a porté dans son clip Bad Romance. La même qui, en septembre 2022, a été exposée chez Artcurial, à l’hôtel Marcel Dassault.

Charlie Le Mindu a déjà exposé au Palais de Tokyo, au Centre Pompidou et au V & A Museum de Londres. Bientôt à l’affiche d’une exposition du Musée des arts décoratifs baptisée Des cheveux et des poils, le créateur touche-à-tout s’apprête à lancer un sac (évidemment) poilu, en collaboration avec la marque de cabas CAHU, en parallèle de multiples masterclass. « Il faut absolument y aller », nous exhorte-t-il. Et pour cause, vous pourrez apprendre lors d’une d’elles à fabriquer des « merkin », ces petites perruques pour pubis.

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