Comment l’adhésion de la Suède renforce une OTAN plus menacée que jamais

Historique. Pour une fois, le qualificatif n’est pas galvaudé. En votant à une écrasante majorité (188 voix contre 199) en faveur de l’adhésion de la Suède à l’OTAN, les parlementaires hongrois ont levé le dernier obstacle à l’entrée du royaume scandinave dans l’Alliance. Il deviendra donc officiellement le 32e membre dans les prochains jours.

Après la Finlande, le 4 avril 2023, la Suède représente la dernière pièce du puzzle pour l’OTAN au Nord de l’Europe. Elle y est désormais omniprésente, de la Norvège (membre depuis 1949) aux Pays Baltes (depuis 2004). Plus aucun navire russe ne pourra désormais quitter Saint-Petersbourg en direction de l’ouest sans se retrouver aussitôt sur les rives de la mer baltique entièrement sous le contrôle de l’Alliance atlantique.

La décision prise à Helsinki et Stockholm de rompre avec leur doctrine historique de neutralité est évidemment la conséquence directe de l’assaut russe sur l’Ukraine le 24 février 2022. Sur ce plan au moins, l'"opération militaire spéciale", ainsi que la qualifie Vladimir Poutine, a produit le résultat inverse de celui recherché par le président russe.

Sous-marins et simulation de bombardement

L’OTAN, avec les 1340 kilomètres de frontière partagée avec la Finlande, est désormais directement au contact de la Russie sur toute la partie nord de sa frontière occidentale. La maîtrise de la mer baltique, considérée comme hautement stratégique par Moscou, qui y a déployé une grande partie de ses moyens nucléaires, ne lui appartient plus.

Pour la Suède, ce moment de bascule est aussi l’aboutissement logique d’une menace qui n’a cessé de monter en intensité. En 2013, des bombardiers russes ont simulé une attaque sur Stockholm. L’année suivante, un sous-marin a été repéré non loin de la capitale suédoise, provoquant une vive inquiétude. En 2018, tous les Suédois ont reçu au courrier un guide pratique sur la conduite à tenir "en cas de guerre".

La Finlande et la Suède sont certes des pays partenaires de l’OTAN depuis 1994 et ont participé depuis à une série d’exercices communs avec l’Alliance. Mais le pas supplémentaire de l’adhésion leur apporte désormais la garantie de l’article 5 de la charte de l’Alliance, selon lequel une attaque contre l’un des membres équivaut à une attaque sur tous les autres et entraîne la réplique solidaire de tous ses participants.

Parallèlement, les deux pays procèdent à une augmentation massive de leurs dépenses en matière de défense pour les porter au plus vite à 2% de leur PIB. Début décembre, la Suède a également signé un accord autorisant les États-Unis à installer 17 bases militaires sur son territoire. Le virage à 180 degrés est désormais complet pour Stockholm, qui avait démantelé 90% de son armée, 70% de sa marine et de son armée de l’air après l’effondrement de l’Union soviétique.

Un péril historique

En ouvrant ce lundi soir 26 février une réunion de soutien à l’Ukraine, le président Emmanuel Macron s’est réjoui de l’arrivée de la Suède au sein de l’OTAN. Mais il a aussitôt ajouté devant les 21 chefs d’État, de gouvernement et ministres présents que l’Alliance est aujourd’hui lancée dans une véritable course contre la montre:

"À peu près tous les pays représentés autour de la table (…) comme d’ailleurs beaucoup d’organisations internationales (…) ont pu dire que le consensus, l’analyse collective était que, d’ici à quelques années, il fallait s’apprêter à ce que la Russie attaque les dits pays".

Amplifié par la menace de Donald Trump de laisser la Russie "faire ce qu’elle veut" aux membres de l’OTAN qui n’auraient pas suffisamment contribué financièrement à ses yeux, le péril - pas seulement vu de Finlande ou de Suède - est sans doute le plus élevé des bientôt 75 ans d’histoire de l’OTAN.

Article original publié sur BFMTV.com