Législatives 2024 : un gouvernement RN, une possibilité « terrifiante » pour ces personnes minorisées

Alors que la dissolution relance la possibilité d’un gouvernement à l’extrême droite mené par Jordan Bardella, plusieurs personnes minorisées témoignent de leurs peurs.

« Pour avoir des ancêtres morts dans les camps de concentration parce qu’ils étaient juifs, j’estime que sous un gouvernement d’extrême droite, le pire est possible. »
STEPHANE DE SAKUTIN / AFP « Pour avoir des ancêtres morts dans les camps de concentration parce qu’ils étaient juifs, j’estime que sous un gouvernement d’extrême droite, le pire est possible. »

EXTRÊME DROITE. « Comment ça va toi ? » Au lendemain des élections européennes du 9 juin où près de 37 % des votes sont allés à l’extrême droite, et après l’annonce de la dissolution de l’Assemblée Nationale par Emmanuel Macron, le sentiment d’urgence se mêle à la sidération.

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« Terrifiée », « Comme une envie de quitter la France et l’Europe », « En tant que personne LGBT, je me dis qu’un tiers des adultes que je croise me veulent potentiellement du mal », « Anxieuse et en colère ». Face à l’hypothèse de voir Jordan Bardella accéder à Matignon et le RN obtenir une majorité à l’Assemblée Nationale, plusieurs personnes racisées, LGBT+ ou musulmanes ont confié leur choc et leurs inquiétudes au HuffPost, de voir leurs droits pris pour cible.

Paul a 19 ans, c’était la première fois qu’il votait lors de ces européennes. Dimanche soir, lorsqu’il a regardé les résultats avec son petit ami, il raconte avoir pris une « grosse claque dans la gueule » devant le score de Bardella, puis devant l’annonce de dissolution de l’Assemblée par Emmanuel Macron. « J’ai beaucoup pleuré lundi matin, raconte-t-il. On va où avec ça ? »

« En tant que mec gay et mec trans, j’ai peur pour mes droits et pour ceux de toutes les minorités. Le mariage pour tous et toutes, les droits des familles homoparentales, le droit de transitionner… soupire-t-il. C’est déjà pas simple avec le gouvernement actuel, mais un gouvernement RN sera clairement pire. » Il pense désormais à quitter la France, par peur de ne plus pouvoir vivre son identité de genre et son orientation sexuelle librement. « Ce qui est absolument terrifiant, c’est de devoir envisager que nos identités pourraient disparaître, qu’on pourrait avoir à partir parce qu’on ne sera plus considérés comme des êtres humains égaux, avec des droits. »

Son anxiété est largement partagée par Corentin, qui évoque une « violence extraordinaire » au moment des résultats. Le jeune homme de 27 ans se sent menacé à plusieurs égards en tant que personne bisexuelle et handicapée. « Je suis resté bloqué sur cette idée que dehors, il y avait tant de gens qui me voulaient du mal à moi, et à mes adelphes de la communauté LGBT+ et aux personnes handicapées. Tant de gens qui refusent d’accepter nos identités. » S’il confie avoir peur pour certains de ses droits, il s’inquiète avant tout de la montée du racisme et de la transphobie.

Dans les réponses des personnes interrogées, la peur du danger pour soi et pour les autres est palpable. Myriam, la trentaine, a passé la nuit post-électorale habitée par un sentiment d’anxiété et d’impuissance. « J’ai beaucoup de mal à penser un autre scénario possible que le RN au pouvoir, décrit-elle. Je ressens beaucoup de colère ».

Ses craintes - l’IVG en danger, les droits des femmes en général, la montée de la xénophobie... - sont également nourries par son histoire familiale. « Pour avoir des ancêtres qui sont morts dans les camps de concentration parce qu’ils étaient juifs, j’estime que sous un gouvernement d’extrême droite, le pire est possible. J’ai peur que les violences envers les personnes minorisées - LGBTQIA, racisées ou étrangères, personnes en situation de handicap physique et/ou mental - soient très graves. »

Une peur largement partagée par toutes les personnes interrogées. « Je ressens de la terreur à l’idée d’un risque accru de violences banalisées au quotidien (racisme, sexisme, lgbtphobies), de violences quotidiennes dans la rue face à mon couple queer » confie Mai, une personne asio-descendante de 32 ans qui raconte, lundi 10 jun être dans un cycle « sidération, cynisme, dépression, panique, re-sidération » depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée Nationale. « Au fond, ce qui me terrifie, c’est aussi que si l’extrême droite obtient le pouvoir, je ne vois pas pourquoi elle le rendrait ».

Yasmine, quant à elle, prédit une « explosion de l’islamophobie ». « La stigmatisation des personnes musulmanes et/ou maghrébines est déjà très forte dans la recherche d’emploi ou de logement, explique la jeune femme d’origine algérienne. Avec un gouvernement RN, ces discriminations se multiplieront certainement, voire seront légitimées. » Quand elle pense à ses projets de parentalité, elle raconte avoir peur de mettre au monde un enfant racisé en France.

Interrogés sur les choses qui leur donnent de l’espoir, nombreux sont celles et ceux qui bottent en touche. « Je suis assez pessimiste » indique Yasmine. « Là, c’est dur d’avoir de l’espoir », confie Paul, qui n’abandonne pas pour autant et a l’intention de se mobiliser dans les trois semaines à venir. « Ça donne envie de se battre et de pleurer en même temps » conclut-il.

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