Kurt Cobain est mort il y a 30 ans et ces fans n’oublieront jamais la façon dont ils l’ont appris

Le chanteur guitariste de Nirvana est décédé le 5 avril 1994, au grand désespoir de ses fans. Aujourd’hui, certains d’entre eux replongent dans leurs souvenirs d’adolescence pour « Le HuffPost ».

MUSIQUE - « Je m’en souviens comme si c’était hier. » Seattle, le 8 avril 1994. La pluie tombe sur le toit des voitures de police stationnées devant le 171 Lake Washington Boulevard East. À l’intérieur de cette grande maison entourée d’arbres, dans la véranda située au-dessus du garage, un électricien a fait la macabre découverte d’un corps. Gary Smith, employé de la Veca Electric, était venu installer un système d’éclairage. Mais à la place, il a dû répondre aux questions incessantes des enquêteurs. La victime, qui présente une blessure par balle au niveau de la tête, a laissé une lettre de suicide : elle est signée Kurt Cobain.

Le leader et chanteur du groupe de rock Nirvana, artiste de talent écorché vif, n’a été retrouvé que trois jours après cet acte tragique. Un geste désespéré qui va plonger des milliers de fans dans une profonde consternation. Devenu l’icône du mouvement grunge, notamment grâce à des titres comme Smells Like Teen Spirit, Come as You Are ou encore In Bloom, Kurt Cobain est ainsi entré au triste panthéon des stars du rock’n’roll décédées à 27 ans. Il laisse derrière lui sa femme Courtney Love et leur fille Frances Bean, âgée d’un an et demi.

Ce 5 avril 2024, trente ans après sa mort, Kurt Cobain est toujours bien présent dans les mémoires. Lui qui a été, sans le vouloir, l’icône de la jeunesse désœuvrée des années 1990 après l’insouciance des « eighties », continue de parler aux jeunes. Et à ceux qui sont, depuis, devenus adultes. Ces derniers se souviennent comme d’une grande date de l’Histoire de ce matin d’avril 1994, lorsqu’ils ont appris la mort de leur idole.

« C’était la dépression générale »

« Horreur », « stupéfaction », « désespoir », « sidération »… Les lecteurs du HuffPost qui ont accepté de replonger dans leurs souvenirs de cette journée-là semblent avoir vécu la même expérience traumatique. Malgré les années, tous se souviennent avec moult détails la façon dont ils ont appris le décès du « Jésus de notre temps », comme l’appelle Jérémie.

Né en 1980, celui qui explique avoir pourtant été davantage marqué par Guns N' Roses que par Nirvana – quitte à parfois dénigrer ce dernier – n’a pu oublier l’annonce du décès du chanteur, à l’heure où les réseaux sociaux n’existaient pas encore. Ni le lundi suivant, au retour sur les bancs de l’école. « C’est comme s’il y avait eu un attentat en France. Tout le monde était prostré dans la cour de récré, certains pleuraient même, et tout le monde ne parlait que de cela », se rappelle-t-il.

Une sensation de deuil collectif partagée par Sandra. « Tout comme les attentats du 11 septembre, c’est un moment que je n’oublierai jamais », témoigne-t-elle auprès du HuffPost. Pour elle qui était en classe de seconde à l’époque, le réveil a été d’une violence inouïe : « Je suis dans mon lit, c’est l’heure des infos, et la nouvelle tombe à la radio : Kurt Cobain a été retrouvé mort. J’en pleure à gros sanglots sans pouvoir me lever, ne pouvant ou ne voulant pas croire ce que je venais d’entendre ».

Arrivée au lycée, la nouvelle du décès de la star est dans toutes les discussions. « C’était la dépression générale », se souvient Sandra. En signe de deuil, elle décide de s’habiller en noir pendant plusieurs jours, écoutant en boucle du Nirvana. « J’ai pleuré comme si j’avais perdu un proche », nous explique-t-elle.

Le représentant de toute une génération de « révoltés »

Quelque part, c’est un peu le cas. Car dans son art, Kurt Cobain s’est transformé en exemple pour une partie de la jeunesse de l’époque. Celle qui avait du mal à trouver sa place, à extérioriser son mal-être. Pour Charles R. Cross, journaliste américain et auteur de trois livres consacrés au chanteur, « la façon qu’avait Cobain d’écrire des chansons est devenu un modèle. Il a montré qu’on pouvait exprimer ses émotions douloureuses, crier sa colère, parler de sa dépression ou même de choses horribles comme le viol. »

Un idéal de rébellion qui incitait aussi à s’affirmer et à ne pas chercher à entrer dans un moule. « Il était l’icône de notre génération, les marginaux mal dans leurs pompes et paumés dans cette société, ce monde conformiste », témoigne Marie. Elle avait 14 ans lorsque la voix de Nirvana s’est éteinte. « J’ai ressenti du désespoir, il représentait beaucoup pour moi (pour nous les grunges des années 90), tant par ses textes, son look, que sa musique, ses excès et ses moments de déboire sur scène. »

« J’y songe avec mélancolie tous les 5 avril, témoigne également Solène. Les souvenirs, les sensations sont toujours vivaces », nous explique celle qui avait à l’époque 17 ans. Comme beaucoup, c’est à la radio, en se préparant pour aller au lycée, qu’elle a entendu la nouvelle qui a signé bien plus que la mort d’un homme. « Le choc, le temps se suspend. Je reste sidérée, pétrifiée par cette disparition. Et un monde qui s’effondre : celui de la révolte réveillée par le mouvement grunge », se remémore-t-elle.

« Mon monde s’est écroulé, comme il l’avait déjà fait quelques mois avant, avec le départ de mon père du domicile familial. Mais là, Kurt quoi, ce fut plus violent ! », nous confie Paul, dont l’émotion se ressent encore aujourd’hui.

La fin de l’innocence

Pour certains, le décès de Kurt Cobain a été trop dur à encaisser. Une dizaine d’adolescents dans le monde se sont donné la mort, la plupart de la même façon que leur idole, dans les mois qui suivirent. Dans sa lettre de suicide, le chanteur concluait par un vers d’une chanson de Neil Young : « It’s better to burn out than to fade away » (« Mieux vaut flamber rapidement que de s’éteindre en douceur ». Un appel morbide qui a malheureusement été entendu, soulignait Le Monde en 2014.

Pour d’autres, cet acte désespéré a eu l’effet d’un électrochoc. « J’ai vécu la mort de Kurt Cobain comme la fin d’une période. Celle de mon adolescence, celle de la jeunesse, celle de la naïveté. J’ai compris que la santé mentale ne dépend pas des apparences, ni de la réussite ou de la gloire », témoigne Virginie.

Enfin, Karine se rappelle comment le chanteur du groupe Soundgarden, Chris Cornell, a annoncé en direct la mort du leader de Nirvana, sur la scène de l’Élysée Montmartre le vendredi 8 avril : « En fin de concert, le chanteur du groupe sort de scène et revient pour parler à ses musiciens qui cessent progressivement de jouer. Puis il reprend le micro et nous annonce la mort de Kurt Cobain. Je me souviens du choc et de la sidération partagée par tous, groupe inclus. »

Karine C se rappelle comment le chanteur du groupe Soundgarden, Chris Cornell, a annoncé en direct la mort du leader de Nirvana, sur la scène de l’Élysée Montmartre le dimanche 8 avril 1994.
Photo Karine C pour Le HuffPost Karine C se rappelle comment le chanteur du groupe Soundgarden, Chris Cornell, a annoncé en direct la mort du leader de Nirvana, sur la scène de l’Élysée Montmartre le dimanche 8 avril 1994.

« La chance de l’avoir connu vivant »

Trente ans après sa mort, Kurt Cobain n’en finit pas de faire couler de l’encre. Pendant des années, les causes de son décès ont été remises en question, de nombreux fans criant au complot ou accusant son épouse, Courtney Love, d’être impliquée. À tel point que 27 ans plus tard, en 2021, le FBI a décidé de dévoiler un dossier de dix pages sur l’enquête, dont les photos prises sur les lieux du drame, pour faire taire les rumeurs d’homicide.

Même si un voile morbide s’est déposé sur son aura, Kurt Cobain continue aujourd’hui de fasciner les jeunes générations. Sa musique, son talent et l’idéologie grunge ont fait de lui un symbole. « Mon fils de 21 ans et ma fille de 25 ans aiment Nirvana. Un jour, cette dernière m’a dit qu’elle n’avait connu Kurt Cobain que mort, et j’ai réalisé la chance que cela a été de l’avoir connu vivant », remarque Virginie, pour qui le chanteur reste à jamais « un homme qui n’a pas eu le temps de nous décevoir ».

Ainsi peut-être est-ce pour cela que l’interprète de All Apologies est devenu immortel… le jour où il a cessé d’être.

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