Kristen Stewart : Woody Allen, la politique, la réalisation... rencontre avec une actrice engagée

L'actrice Kristen Stewart est invitée par le festival du cinéma indépendant américain de Deauville pour un prix célébrant sa déjà longue carrière. L'occasion de la rencontrer et de parler de ce qui l'anime aujourd'hui, à presque 30 ans.

Kristen Stewart est honorée ce vendredi au festival du cinéma américain indépendant de Deauville d'un "Talent Award" pour l'ensemble de sa jeune carrière. Elle en profitait pour promouvoir son nouveau film, Seberg, sur le drame subit par cette actrice que le FBI a persécuté parce qu'elle soutenait le mouvement des Black Panthers. Nous étions une poignée de journalistes à pouvoir rencontrer celle qui est désormais une star incontournable du cinéma américain, commercial ou indépendant.

Depuis plusieurs années, Kristen Stewart, comme son ancien partenaire de Twilight Robert Pattinson, tourne des films plus exigeants. D'Olivier Assayas à Ang Lee en passant par Justin Kelly et Kelly Reichardt, la tout juste trentenaire compte bien poursuivre sur cette voie. Lucide, elle déclare ne pas avoir de plan de carrière ou d'objectifs à long terme :

"Il faut pouvoir prendre du recul sur soi-même pour contempler la trajectoire de sa propre vie. Je ne vois pas mon avancée dans la vie de façon globale, ma vie n’est pas encore une histoire. Je suis trop jeune pour ça !"

Kristen Stewart a changé

Celle qui fut autrefois une idole pour les adolescents est en passe de devenir une nouvelle icone, celle de ces mêmes adolescents devenus adultes, d'une génération qui a grandi en même temps qu'elle. Comme son personnage dans Seberg, l'actrice refuse de se cacher et opte pour une transparence complète dans son travail : "Je ne veux faire semblant de rien. Si quelque chose ne marche pas ou n’arrive pas, je ne le force pas".

Quant au choix du sujet de ses films récents, ils sont de plus en plus politisés. Lizzie porte sur l'assassinat de la famille Borden, Seberg sur le sacrifice d'une femme pour la défense des droits civiques, ou JT Leroy sur une auteure se faisant passer pour un homme transgenre. Elle commente : "Je veux vraiment me concentrer sur les expériences fructueuses, ce qui veut dire ne travailler qu’avec des personnes avec qui vous arrivez à profondément vous connecter et ne pas vous forcer à le faire avec des personnes avec qui vous ne le voulez pas".

La comédienne n'hésite pas non plus à s'engager et à affirmer ses positions politiques : "Il n’y a pas d’égalité des chances aux [États-Unis]. Le langage a changé (...), mais il n’est le plus souvent suivi d’aucun effet concret. Beaucoup de gens aujourd’hui disent "non, je ne suis pas raciste, je ne déteste pas les Noirs", mais est-ce qu’ils reconnaissent ce qu’ils vivent [actuellement] ? (…) L’idée que "tu peux y arriver aux Etats-Unis si tu le veux vraiment" c'est un très bon concept, mais c'est faux. Ce serait d’ailleurs très idéaliste de penser que c’est vrai".

A bon entendeur...

Passer à la réalisation

Après plusieurs courts métrages, Kristen Stewart envisage sérieusement de passer à la réalisation d'un premier long métrage intitulé The Chronology of Water, sur une jeune femme découvre sa bisexualité. Elle confirme que le projet, annoncé en mai 2018, n'est pas abandonné. Là encore, l'actrice fonce, et ce n'est pas après mûre réflexion qu'elle se sent de tenter l'aventure :

"[Passer à la réalisation] ce n’est pas très différent de l’impulsion que j’ai lorsqu’en tant qu’actrice je choisis de jouer dans un film. Je suis toujours excitée par ça, c’est ce que je veux faire depuis que j’ai cinq ans. C’est donc juste l’étape suivante".

Les possibilités sont nombreuses et facilités lorsqu'on est devenue une star d'un tel niveau.

Le débat Woody Allen

Lorsque le festival du cinéma américain indépendant de Deauville a annoncé que le film de Woody Allen Un jour de pluie à New York ferait l'ouverture de l'événement, le débat entre les soutiens du metteur en scène et les partisans du boycott de ses films avait été ranimé. Rappelons que de lourdes accusations pèsent sur le cinéaste américain. Appelée à commenter la présence du film d'Allen au festival qui lui rend hommage, Stewart a répondu avec franchise :

"Je pense que c’est intéressant de se poser cette question. Cela étant dit, comment apprécier les films [de Woody Allen] sans glorifier… (elle s’interrompt) C’est difficile, car ce sont des circonstances subjectives. Nous ne connaissons pas la vérité. Il a fait son film avec beaucoup de gens, il ne l’a pas fait seul. Je ne sais donc pas quelle est la réponse. J’aimerais bien qu’il y ait une réponse plus facile, mais il est facile d’être divisé à ce sujet. Le film a nécessité du bon travail, mais on ne veut en aucun cas glorifier quelqu’un qui ne le mérite pas… C’est drôle, car s’il y avait une réponse facile, nous la donnerions tous et ça ne créerait pas ces crispations. (…) Mais la discussion est sans issue car nous ne savons tout simplement pas".

Stewart n'a pas été ébranlée par la question, et a offert une réponse sincère, elle qui avait tourné pour Woody Allen dans Café Society, aux côtés de Jesse Eisenberg. L'entretien s'est terminé. L'actrice est retournée attendre sa montée sur scène à Deauville pour recevoir son "Talent Award" bien mérité. On la retrouvera prochainement dans nos salles avec le film d'action Charlie's Angels, réalisé par Elizabeth Banks. Seberg n'a pas encore de date de sortie.