«Kohlantess» à Fresnes : la télé-réalité débarque en prison, par Yann Moix

Dans l’un des plus grands centres pénitentiaires de France, ces deux producteurs ont organisé un drôle de «Koh-Lanta».

La France est devenue débile. Spécialiste des polémiques qui ne devraient pas en être, victime tantôt d’un laxisme faramineux, tantôt d’un crétinisme qui dépasse toutes les bornes. Nous savions que le vieux pays des rois, de Danton et de Bonaparte, de Louis XVIII et de de Gaulle, autrefois terre de lutte et de guerre, était devenu, en si peu de générations, un terrain de jeu géant, une cour de récréation à l’échelle d’une géographie tout entière.

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Parcs d’attractions, musées foireux, trottinettes régressives, gamineries politiques, provocations stade-analesques: plus rien, ou presque, ne subsiste d’une culture qu’on avait connue grande, universelle, livresque, aujourd’hui entre les mains d’adolescents sans âge, de tapoteurs de smartphones, de selfomanes gnangnans et de drogués du jeu vidéo.

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Tout est jeu, tout est récréation: ce pays qui réfléchissait est devenu la nation du divertissement perpétuel et de l’amusement jusqu’à plus soif. Dis-moi comment tu t’occupes, je te dirai qui tu es: les bibliothèques se vident, les cinémas ferment, les théâtres sont en berne. On veut rigoler. On veut s’éclater. On refuse, selon l’expression consacrée, de «se prendre la tête». Les conséquences, outre l’atrophie cérébrale au cœur d’un peuple qui jadis savait penser, ne sont pas simplement la baisse de la culture générale, mais l’appauvrissement de la langue, où chaque nuance est désormais remplacée par la grammaire des coups, la syntaxe des rodéos, le vocabulaire des poings et la scansion des mortiers d’artifice.

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