Juge d'instruction, conditions de travail... Les conclusions du rapport des Etats généraux de la justice

Juge d'instruction, conditions de travail... Les conclusions du rapport des Etats généraux de la justice

"Rendre justice aux citoyens." La réflexion s'étale sur 250 pages. Et elle doit guider l'action d'Éric Dupond-Moretti dans les prochains mois. BFMTV a pu consulter les conclusions des Etats généraux de la justice. Celles-ci doivent être rendues publiques dans les prochains jours, sans qu'aucune date ne soit pour l'instant gravée dans le marbre.

Mais cela ne devrait plus tarder désormais. Dans un entretien au Journal du Dimanche, le 23 mai, la Première ministre Elisabeth Borne justifiait d'ailleurs le maintien d'Éric Dupond-Moretti à la Chancellerie, pour "qu'il puisse recevoir les conclusions [des Etats généraux de la justice] et engager rapidement leur mise en œuvre."

Touffu, le rapport du comité des Etats généraux de la justice - commandé, à l'origine, par Emmanuel Macron - se fonde sur des auditions, des consultations et des rencontres au sein même des juridictions qui se sont tenues durant cinq mois. S'il est impossible d'être exhaustif sur le sujet, voilà les quatre principaux points que l'on peut en retenir.

· Pour le maintien du juge d'instruction

Voulue par Nicolas Sarkozy, questionnée par Emmanuel Macron, la suppression du juge d'instruction est un peu l'Arlésienne de la justice de ces dix dernières années.

"La question de l'opportunité de son maintien (...) a longuement été débattue par le comité, qui reste partagé", attaque à son propos le rapport.

Mais "la majorité des interlocuteurs des Etats généraux de la justice a manifesté leur attachement à l'office du juge d'instruction, dont ils soulignent l'expertise, la réactivité et l'efficacité".

Aujourd'hui, seules 3% des enquêtes sont confiées à des juges d'instruction, le reste étant à la charge des parquets. Mais le comité estime que la "plus-value du juge est réelle" sur les affaires de grande complexité, "tant pour ce qui est de l'instruction que pour l'image d'indépendance de la justice".

· Un coup de canif pour les tribunaux criminels départementaux

Lorsqu'il était avocat, Éric Dupond-Moretti était "contre". Une fois ministre, il a finalement changé d'avis et a développé les tribunaux criminels départementaux. Mis en place il y a quelques années à peine, ils sont désormais chargés de juger les crimes punis de moins de 20 ans, souvent les affaires de viol. Et tout cela sans l'aide de jurés populaires dans le but de désengorger les cours d'assises.

Pour le comité, il est pourtant "nécessaire" d'entamer une réflexion sur le sujet. Afin d'une part de préserver le cadre de l'oralité des débats et surtout de revoir la question des jurys populaires. "Le comité estime en effet que la participation de citoyens à l'œuvre de justice est primordiale et doit être préservée."

· Pour une refonte du Code de procédure pénale

"Nécessaire" et "urgente". Le comité des Etats généraux de la justice plaide pour "une refonte" du Code de procédure pénale. Avec pour mission notamment de revoir la question de la tenue des audiences de comparution immédiate. "Compte tenu des dysfonctionnements observés, [les audiences de comparution immédiate] ne permettent pas d'apporter une réponse pénale de qualité".

Très régulièrement, des juridictions se plaignent, en effet, de ces audiences engluées où les magistrats doivent parfois enchaîner dix, quinze ou vingt dossiers quitte à les trancher à des heures indues, souvent au milieu de la nuit, au détriment des justiciables.

· La question des conditions de travail

Ce n'est pas un hasard si le comité a entendu une bonne partie du tribunal de Lille (Nord) où la question de la souffrance au travail a fait l'objet de nombreux articles de presse ces derniers mois.

Dans ses conclusions, le comité prend position très clairement pour un allégement de la charge de travail, à tous les étages de la fusée judiciaire: "Les conditions de travail des acteurs de la procédure pénale, des officiers et agents de police judiciaire aux juges pénaux en passant par les magistrats du parquet, doivent être allégées et rationalisées en profondeur en prenant appui sur les outils numériques", écrivent les membres du comité.

Reste désormais à savoir ce qu'Éric Dupond-Moretti reprendra à son compte de ces propositions et de quelle marge de manœuvre, notamment budgétaire, pour pouvoir, ou non, les mettre en œuvre.

Article original publié sur BFMTV.com