JO de Paris 2024 : la gymnaste Coline Devillard raconte "la peur du tampon qui dépasse du justaucorps"

La triple championne d’Europe, qui devrait être l’une des têtes d’affiche de l’équipe de France aux Jeux, regrette que ses règles douloureuses l’empêchent parfois de sauter.

Coline Devillard participe au saut de cheval lors de la finale des Championnats d’Europe de gymnastique artistique, à Rimini, en Italie, le 5 mai 2024.

SPORT- « Mes règles sont carrément embêtantes ! » Triple championne d’Europe de gymnastique artistique (2017, 2023, 2024) et double médaillée de bronze aux Mondiaux (2022 et 2023), Coline Devillard est « plus que ravie » de participer aux Jeux olympiques de Paris 2024, qui débutent dans un peu plus de deux mois. Mais derrière son tempérament jovial et sa faculté à exceller, notamment en saut, la pensionnaire de l’Insep, 23 ans, a parfois des contrariétés. Notamment à cause de ses règles douloureuses.

JO de Paris 2024 : pour les sportives, les règles sont un défi supplémentaire pour viser des médailles

« Mes cycles menstruels sont pénibles pour ma pratique sportive. Je perds beaucoup de sang, j’ai mal au ventre et en bas du dos. Je me sens aussi très fatiguée pendant cette période », raconte au HuffPost celle qui devrait être l’une des têtes d’affiche de l’équipe de France aux JO, aux côtés notamment de Mélanie de Jesus dos Santos.

Celle qui travaille actuellement un Tsukahara avec double vrille pour espérer repartir médaillée de ces Jeux à domicile est ainsi totalement freinée dans ses entraînements lorsque ses règles se font trop douloureuses. « Ça m’énerve parce que ça m’empêche d’exploiter tout mon potentiel physique, se désole la jeune femme, avant de détailler : Je ne peux pas sauter, surtout les sauts en extension, j’ai l’impression que ça me tire les ovaires. »

Faute de pouvoir s’adonner à son agrès fétiche, le saut donc, durant ses menstruations, elle réalise à la place « des exercices de souplesse ou de proprioception. Je fais aussi un peu de barres et de poutre. Je travaille les mouvements de base qui ne me demandent pas beaucoup d’énergie », poursuit-elle, admettant qu’elle « préfère faire moins pour ne pas [s]e blesser ».

Se décrivant comme une femme « entière » et effectivement bien loin d’être timide lors de notre échange, la gymnaste assure n’avoir « aucun tabou à parler de [s]es règles à [s]es entraîneurs pour qu’ils adaptent les entraînements ». Et ne comprend pas qu’à l’inverse, « certaines filles n’osent pas, car ça fait partie de la femme. »

L’an dernier, Coline Devillard a voulu prendre enfin les choses en main. Elle s’est rendue dans le cabinet d’une gynécologue du sport pour lui demander des conseils sur la manière de gérer ses douleurs liées aux règles lors des entraînements intensifs et les compétitions. « Elle m’a donné un traitement, c’était de l’antadys je crois, mais ça me convenait pas du tout. À cause de cet anti-inflammatoire, j’ai eu mes règles pendant quinze jours durant le championnat du monde (30 septembre au 8 octobre 2023, ndlr). » Après cette mauvaise expérience, elle n’est pas retournée voir de gynécologue, et a abandonné l’idée de régler son problème de cycles douloureux.

Si avoir ses règles pendant les compétitions ne lui fait plus peur, même pendant les Jeux olympiques de Paris, « parce que c’est le corps de la femme, c’est la nature », Coline Devillard a tout de même une crainte : celle du fil du tampon.

L’athlète explique garder son short au-dessus de son justaucorps quand elle a ses règles, mais elle sera obligée de le retirer au moment de son passage lors de l’épreuve olympique. « On est en justau, on sait qu’on saigne d’en bas, bien sûr on a peur d’avoir une tache, ou pire que la ficelle du tampon dépasse du justaucorps », nous confie-t-elle.

Malgré tout, les filles de l’équipe de France se serrent toujours les coudes et des ajustements de tenues sont possibles : « On essaie de s’arranger, on peut adapter la couleur du justau si on sait que l’une d’entre nous a ses règles ».

Coline Devillard ne souhaite en aucun cas voir ses règles comme un « handicap » dans la pratique de son sport, mais elle estime qu’elles sont tout de même bien contraignantes. Et déplore que le sujet soit encore tabou à la Fédération française de gymnastique. « Il faut vraiment banaliser les règles, appelle-t-elle avec entrain. Moi j’en parle déjà beaucoup, surtout aux plus jeunes qui sont déstabilisées quand les premiers cycles arrivent. Mais je crois qu’il faut libérer la parole encore plus. »

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