IVG: pour la première fois depuis son arrivée en force à l'Assemblée, le RN se divise

Un vote dispersé des 89 élus de Marine Le Pen à l'occasion de la proposition de loi des insoumis pour constitutionnaliser l'IVG. À l'issue d'un débat houleux, 38 députés du Rassemblement national (RN) ont dit oui, tandis que 23 s'y sont opposés. 13 se sont abstenus.

Une brèche pour ses opposants qui ont pris, lors de l'examen du texte, un malin plaisir à renvoyer l'extrême droite à ses positions passées. Marine Le Pen, par exemple, avait évoqué lors de sa campagne présidentielle de 2012 le cas des "avortements de confort" qu'elle souhaitait dérembourser.

Un amendement sur la loi Veil

La député Caroline Parmentier, l'une de très proches de l'ancienne candidate à la présidentielle avait tenu des propos polémiques en 2018 alors qu'elle était journaliste pour Présent, une revue catholique traditionaliste.

"Après avoir 'génocidé' les enfants français à raison de 200.000 par an, on doit maintenant les remplacer à tour de bras par des migrants", expliquait-elle alors.

Pour parer à tout incendie et éviter d'étaler ses divisions, le RN a déposé pendant les débats un amendement consistant à constitutionnaliser la loi Veil, afin de ne pas "garantir le droit à l'avortement sans condition et sans délai". Une façon de souligner que le parti à la flamme n'est pas contre l'IVG.

"Pas aux États-Unis"

Reste que la division de son groupe sur le texte des insoumis pourrait entretenir l'ambiguïté. Le député Philippe Ballard, qui a voté contre, se justifie en reprenant des arguments déjà déployés par le RN avant l'examen du texte.

"Je considère qu'on n'est pas aux États-Unis. Aucun parti politique en France ne remet en cause le droit à l'IVG" avance l'ancien journaliste auprès de BFMTV.com.

La décision d'avancer sur la constitutionnalisation de l'avortement est directement liée la décision de la Cour suprême américaine de révoquer le droit à l'avortement en juin dernier.

"Un débat pas très utile"

José Gonzales, le doyen du groupe RN à l'Assemblée, qui s'est, lui abstenu reprend le même refrain.

"J'ai penché pour le vote pour, mais je me suis abstenu car ce (débat) n'était pas quelque chose de très utile", explique l'élu de 79 ans. Lequel précise, par ailleurs, qu'il est favorable à "l'avortement mais pas au-delà d'une limite de 14 semaines", comme cela est actuellement prévu par la loi.

"Rien n'est écrit pour garantir" que la durée légale d'accès à l'IVG "n'ira pas plus loin", fait remarquer de son côté Philippe Ballard. Il regrette également "l'absence" dans le texte de "mention sur la clause de conscience". Cette disposition légale permet aux praticiens qui ne souhaitent pas pratiquer cet acte de renvoyer leurs patientes vers des confrères.

"Représenter notre électorat"

Bruno Bilde qui a voté en faveur de la constitutionnalisation de l'avortement défend son acte.

"Il faut représenter notre électorat. Les Français ont tranché ce débat, on ne va pas le rouvrir", tance-t-il.

Un sondage IFOP de l'été dernier avance que 81% des personnes interrogées sont favorables à l'inscription de l'IVG dans la Constitution

Preuve cependant du malaise sur le sujet dans les rangs du RN: durant l'examen du texte insoumis, certains amendements du Rassemblement national portaient sur l'écriture inclusive ou encore sur la préférence nationale. Très loin donc de l'IVG. Certains y ont vu de l'obstruction parlementaire pour ralentir les débats.

Un texte qui ne devrait pas aboutir

En guise de justification, le groupe se défend et avance que ces propositions nécessitaient une modification constitutionnelle, tout comme le texte examiné. Et de renvoyer la balle au gouvernement qui a fait de son côté, tout pour ralentir les débats sur la réintégration des soignants non-vaccinés.

La constitutionnalisation de l'avortement a été largement adopté avec 337 voix pour. Ce texte a cependant peu de chances d'aller très loin alors que les sénateurs ont rejeté un texte très proche en octobre dernier.

Article original publié sur BFMTV.com