Pour Israël, s’attaquer au « métro du Hamas » à Gaza est essentiel avant l’intervention terrestre

Vue d’un tunnel du Hamas dans la bande de Gaza, en juillet.
SOPA Images / SOPA Images/LightRocket via Gett Vue d’un tunnel du Hamas dans la bande de Gaza, en juillet.

INTERNATIONAL - C’est une ville sous la ville dans le viseur de l’armée israélienne. Dans la nuit du vendredi 27 à ce samedi 28 octobre, Tsahal a frappé « 150 cibles souterraines » dans le nord de la bande de Gaza où, selon elle, le Hamas dirige ses opérations depuis un gigantesque réseau de tunnels sous la terre.

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Détruire – ou du moins endommager – ce qui est surnommé le « métro du Hamas » est une étape essentielle pour l’armée israélienne, qui veut lancer une offensive terrestre pour anéantir ce groupe à l’origine de l’attaque surprise du 7 octobre. Quelque 1 400 personnes ont été tuées côté israélien depuis cette date, et plus de 7 700 Palestiniens ont trouvé la mort dans les bombardements israéliens menés en représailles.

Ce réseau souterrain, souligne le New York Times, est l’une des raisons pouvant expliquer le délai dans l’intervention de Tsahal, qui avait pourtant annoncé une offensive « imminente » à la mi-octobre. Dans une étude publiée le 17 octobre, l’Institut de la guerre moderne de l’académie militaire américaine de West Point qualifie en effet de « cauchemar souterrain » ces tunnels et évoque « une malédiction à laquelle fait face l’armée israélienne ». D’où son importance d’y mettre fin.

Des centaines de kilomètres de tunnels

L’auteur de cette étude, John Spencer, détaille pourquoi c’est un enfer pour les Israéliens. Il parle d’une « véritable ville souterraine » composée de 1 300 galeries sur 500 km, sous un territoire exigu de 41 km de long sur une largeur qui varie de 6 à 12 km. Le casse-tête posé par ce dédale invisible est encore compliqué par la présence de 2,4 millions de Gazaouis dans les ruelles étroites de la bande de Gaza, caractérisée par un habitat très dense.

Israël est convaincu que le mouvement islamiste palestinien dirige et organise l’essentiel de ses opérations depuis ce gigantesque réseau, y stocke son arsenal, et pourrait y détenir des otages. D’ailleurs, une Israélienne libérée lundi, Yocheved Lifshitz, a raconté avoir rejoint, après son enlèvement, cet « énorme réseau » souterrain, comme « une toile d’araignée », et y avoir vu d’autres otages.

Les tunnels du Hamas existent depuis longtemps, mais leur nombre a été multiplié à partir de 2007, date de la prise de pouvoir à Gaza du groupe qualifié de « terroriste » par les États-Unis et l’Union européenne. Ils servent notamment à contourner le blocus imposé par Israël et faire circuler des gens, des biens, ainsi que des armes et des munitions entre Gaza et le monde extérieur.

Des trappes dans les maisons

Des combattants, installés jusqu’à 30 ou 40 mètres sous terre, y circulent ainsi hors de portée des frappes. Des batteries de lance-roquettes cachées à quelques mètres de profondeur peuvent en sortir par un système de trappe pour tirer avant de disparaître à nouveau. De crise en crise, beaucoup ont été détruits au sein de ce réseau, notamment en juillet 2014, lors de l’opération israélienne « Bordure protectrice ». Après celle-ci, le Hamas a creusé de nouvelles voies souterraines, jusqu’au sein du territoire israélien.

Au fil du temps, ces tunnels sont de plus en plus sophistiqués et permettent au Hamas de développer de nouvelles techniques de guerre. Des voies peuvent déboucher dans les champs, mais aussi en milieu urbain, dans des immeubles d’habitation. Un problème pour Tsahal qui voudra faire des recherches dans les maisons de Gaza pendant son offensive.

Le général Daniel Hagari, porte-parole de l’armée, a de son côté affirmé vendredi que des voies se trouvaient « sous les hôpitaux » afin d’utiliser ces établissements comme bouclier. Le Hamas a démenti, accusant Israël de chercher un prétexte à ses bombardements.

« Vous ne pouvez pas les voir, mais eux peuvent vous voir »

En tout cas, le Hamas a bien conscience de son atout et l’a même mis en avant dans une vidéo de propagande repérée par le New York Times. On y voit des combattants de l’organisation islamiste sortir de terre avec des armes et prétendument attaquer des soldats israéliens. À la fin de la vidéo apparaît ce message : « C’est ce qui vous attend quand vous entrez à Gaza. »

Une menace directe dont Tsahal a bien conscience. Non seulement les tunnels cachent des combattants qui peuvent prendre par surprise les soldats israéliens. Mais une tentative d’invasion de ces tunnels pourrait également se révéler meurtrière. Les experts interrogés dans plusieurs médias alertent en effet sur la présence de pièges, en particulier de bombes.

John Spencer pointe de son côté l’importance d’un équipement spécial pour entrer dans ce souterrain. « Parfois, il est impossible de respirer sans bouteille d’oxygène. Cela dépend de leur profondeur et de la ventilation », souligne-t-il. Il ajoute qu’il peut aussi être « impossible de voir », puisque « la plupart des lunettes de vision nocturne des militaires ont besoin de lumière ambiante pour fonctionner ». Il résume la situation : « Vous ne pouvez pas voir vos ennemis, mais eux peuvent vous voir. »

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