Israël-Hamas: le Conseil de sécurité de l'ONU "exige" une aide humanitaire "à grande échelle"

À l'issue de négociations acharnées, le Conseil de sécurité de l'ONU a exigé, ce vendredi 22 décembre, l'acheminement "à grande échelle" de l'aide humanitaire à Gaza, sans appeler à un cessez-le-feu immédiat dont ne voulaient pas les Américains.

La résolution adoptée par 13 voix pour, aucune contre et deux abstentions [États-Unis et Russie] "exige de toutes les parties qu'elles autorisent et facilitent l'acheminement immédiat, sûr et sans entrave d'une aide humanitaire à grande échelle" à Gaza et demande de "prendre de toute urgence" des mesures à cet égard et pour "créer les conditions d'une cessation durable des hostilités".

Le texte exige également l'utilisation de "l'ensemble des voies d'accès et de circulation disponibles dans toute la bande de Gaza" pour l'acheminement de carburant, de nourriture et de matériel médical sur tout le territoire.

"Nous savons que ce n'est pas un texte parfait, nous savons que seul un cessez-le-feu mettra un terme aux souffrances", a commenté l'ambassadrice des Emirats Lana Zaki Nusseibeh, à l'origine du texte.

Mais "si nous ne prenons pas des mesures drastiques, il y aura une famine à Gaza", et ce texte "répond par l'action à la situation humanitaire désespérée du peuple palestinien", a-t-elle ajouté avant le vote.

L'offensive israélienne "crée des obstacles massifs à la distribution"

Le "vrai problème" pour l'acheminement de l'aide humanitaire à Gaza est "la façon dont Israël conduit son offensive", a accusé le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

"Le vrai problème est la façon dont Israël conduit son offensive, qui crée des obstacles massifs à la distribution de l'aide humanitaire à Gaza", a-t-il déclaré à la presse.

Le secrétaire général de l'ONU a également insisté sur le fait qu'un "cessez-le-feu humanitaire est le seul moyen pour commencer à répondre aux besoins désespérés de la population de Gaza et mettre fin au cauchemar qu'elle vit".

Après le vote du Conseil de sécurité qui n'appelle pas à ce cessez-le-feu, il a précisé qu'il avait "espéré" plus du Conseil.

Et "j'espère que la résolution d'aujourd'hui fera comprendre aux gens qu'un cessez-le-feu humanitaire est en effet nécessaire si nous voulons une aide humanitaire efficace".

Le secrétaire général s'est d'autre part dit "extrêmement déçu par les déclarations de hauts représentants israéliens remettant en cause la solution à deux États".

"Aussi difficile que cela semble aujourd'hui, la solution à deux États, en accord avec les résolutions de l'ONU, le droit international et de précédents accords, est le seul chemin vers une paix durable", a-t-il déclaré.

Un texte qui a largement évolué

La résolution, résultat de longues discussions sous la menace d'un nouveau veto américain, a largement évolué depuis la version plus ambitieuse proposée dimanche par les Emirats.

La référence à une "cessation urgente et durable des hostilités" présente dans le texte de dimanche a disparu, tout comme la demande moins directe de la version suivante d'une "suspension urgente des hostilités".

Un amendement russe voulant revenir à cet appel à une "suspension urgente des hostilités" a été bloqué par les États-Unis, recueillant 10 voix en faveur et 4 abstentions.

"C'est un moment tragique pour le Conseil", a dénoncé l'ambassadeur russe Vassili Nebenzia, dénonçant le "chantage" américain.

Les membres du Conseil voulaient éviter un nouveau veto, alors que les habitants de la bande de Gaza, pilonnée par les forces israéliennes en représailles à l'attaque sanglante et sans précédent du Hamas le 7 octobre, sont désormais menacés par la famine.

Cinq textes rejetés en deux mois

Largement critiqué pour son inaction depuis le début de la guerre, c'est la deuxième fois seulement que le Conseil de sécurité parvient à se mettre d'accord sur un texte. Sa résolution précédente du 15 novembre appelait à des "pauses humanitaires". Cinq autres textes ont été rejetés en deux mois, dont deux en raison de vetos américains, le dernier le 8 décembre.

Les États-Unis avaient alors bloqué, malgré la pression inédite du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, l'appel à un "cessez-le-feu humanitaire", également jugé inacceptable par Israël.

"Cela a pris des jours, et beaucoup de longues nuits de négociations pour faire les choses bien, mais aujourd'hui, ce Conseil apporte une lueur d'espoir dans un océan de souffrances inimaginables", a assuré l'ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield.

Les négociations sur cette nouvelle résolution ont également été intenses autour des termes de la mise en place d'un mécanisme de suivi pour s'assurer de la nature "humanitaire" de l'aide.

Autre point sensible, l'absence une nouvelle fois dans le texte d'une condamnation - et même du nom- du Hamas, fustigée par Israël et les États-Unis.

Le texte déplore "tous les actes de terrorisme" ainsi que "toutes les attaques contre les civils", et exige la libération "inconditionnelle" de tous les otages.

Après l'attaque du 7 octobre qui a fait, selon les autorités israéliennes, environ 1.140 morts, en majorité des civils, Israël a juré d'"anéantir" le Hamas, pilonnant le territoire palestinien, l'assiégeant et menant une vaste opération terrestre depuis le 27 octobre.

Le ministère de la Santé du Hamas a fait état vendredi de 20.057 morts depuis le début des bombardements israéliens, majoritairement des femmes, des enfants et des adolescents, et de plus de 50.000 blessés.

Article original publié sur BFMTV.com