Israël : Le cabinet de guerre de Benjamin Netanyahu au bord de l’implosion

En pleines négociations pour une trêve à Gaza ce 6 mars 2024, le cabinet de guerre de Benjamin Netanyahu est au bord de l’implosion. (Photo d’illustration : Netanyahu, Yoav Gallant, et Benny Gantz en octobre 2023).
ABIR SULTAN / AFP En pleines négociations pour une trêve à Gaza ce 6 mars 2024, le cabinet de guerre de Benjamin Netanyahu est au bord de l’implosion. (Photo d’illustration : Netanyahu, Yoav Gallant, et Benny Gantz en octobre 2023).

INTERNATIONAL - Un bras de fer qui se durcit entre Benjamin Netanyahu et son bras droit. Alors que les médiateurs internationaux et le Hamas tentent de parvenir ce mercredi 6 mars au Caire à une trêve dans la bande de Gaza avant le ramadan, les tensions sont palpables au sein du cabinet de guerre israélien. C’est la visite de Benny Gantz, ancien chef d’état-major d’Israël, à Washington qui a mis le feu aux poudres.

« Il n’y a qu’un seul premier ministre et c’est moi », s’est ainsi emporté le Premier ministre israélien à l’annonce du départ vers les États-Unis de son principal rival politique mais aussi partenaire de guerre, Benny Gantz, rapporte RFI.

Lors de cette visite, Benny Gantz a, de fait, coupé l’herbe sous le pied à Benjamin Netanyahou en rencontrant de hauts fonctionnaires, dont la vice-présidente américaine Kamala Harris et le conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan, afin de discuter de la stratégie d’Israël à Gaza, sans le Premier ministre donc.

« Il agit derrière le dos du Premier ministre »

Selon Yohanan Plesner, directeur de l’Institut démocratique d’Israël (IDI), un centre de réflexion libéral, ce déplacement de Benny Gantz chez le principal soutien d’Israël « montre que sa confiance envers Netanyahu est au plus bas et qu’il a décidé de représenter une autre voix à Washington ». Il a pris une posture de « dissident » juge même le quotidien israélien Haaretz.

Le leader centriste s’est aussi attiré les foudres de nombreux ministres du Likoud, le parti de droite de Benjamin Netanyahu. « Il agit derrière le dos du Premier ministre », a dénoncé Miri Regev, la ministre des Transports, qualifiant ce déplacement de « subversif ».

L’ancien ministre de la Défense et chef du parti centriste de l’Union nationale a accepté de rejoindre le cabinet de guerre, doté de cinq membres, dans un souci d’union nationale après l’attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza. « Mais les tensions n’ont jamais disparu » entre les deux hommes qui « se détestent mutuellement », décrypte Reuven Hazan, professeur au sein du département de sciences politiques de l’Université hébraïque de Jérusalem.

Rapprochement stratégique avec les États-Unis

Pour Reuven Hazan, Benny Gantz a entrepris cette visite à Washington, suivi d’une seconde à Londres, pour afficher sa stature comme futur possible Premier ministre et surtout commencer à « préparer sa sortie du gouvernement » qui est, selon l’universitaire, inéluctable.

Il tente donc de tirer profit de la préoccupation de plus en plus grande affichée par Washington sur la tournure que prend la guerre dans la bande de Gaza, menacée de famine selon les Nations unies.

Le président américain Joe Biden et Benjamin Netanyahu sont en « conflit ouvert », Washington pressant le Premier ministre israélien de ne pas « continuer ainsi avec des morts massives de civils à Gaza sans savoir ce qu’il veut faire après » la guerre, note Reuven Hazan. « Gantz n’est pas Netanyahu, il est plus proche de (la position des) Américains » sur l’après-guerre, assure-t-il.

La réforme du service militaire : une bombe politique

Outre ce déplacement, un autre fait notable a provoqué une rupture au sein du cabinet de guerre. La semaine dernière, Yoav Gallant, le ministre de la Défense d’Israël et l’un des membres principaux du cabinet, a proposé une réforme du service militaire afin d’intégrer les juifs orthodoxes, exemptés pour raisons religieuses. Une annonce aussitôt saluée par Benny Gantz.

Cette proposition a fait l’effet d’une bombe politique en Israël où les médias l’ont perçue comme une marque de défiance de Yoav Gallant à l’égard de Benjamin Netanyahu, alors qu’ils sont pourtant tous deux membres du même parti.

Elle met en effet le Premier ministre dans une position très inconfortable alors que les deux grands partis représentant les ultraorthodoxes peuvent faire tomber à tout moment sa fragile coalition.

Netanyahu essaie à tout prix « d’éviter des élections anticipées », auxquelles Gantz a en revanche intérêt, et y est parvenu jusqu’ici mais « s’il y a bien une question qui peut entraîner la chute de la coalition, c’est celle du recrutement des ultraorthodoxes », résume Yohanan Plesner. Reste maintenant à Gantz à trouver le bon moment pour lâcher le Premier ministre « en montrant qu’il défend les intérêts d’Israël » à long terme « et que Netanyahu n’est là que pour protéger ses intérêts personnels », complète Reuven Hazan.

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