Interview de Macron à 3 jours des européennes: ce qu'il peut dire ou non pour respecter le temps de parole

"Ça s'arrête quand ce spectacle?", s'est exaspéré, lundi 3 juin sur France info, François-Xavier Bellamy. Après l'intervention surprise, quelques minutes plus tôt, de Gabriel Attal sur le plateau de la candidate de la majorité aux européennes, Valérie Hayer, et l'annonce d'une interview du président de la République sur France 2, jeudi 6 juin, la tête de liste LR a vivement critiqué la présence médiatique de l'exécutif.

Sa famille politique, ainsi que le Parti communiste et la France insoumise, ont donc saisi l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Elles accusent la majorité de "réquisitionner les JT" à trois jours du scrutin de dimanche 9 juin.

L'Arcom a donc décidé de communiquer ce mardi 4 juin pour rappeler les conditions strictes qui régissent ce qui sera considéré comme du temps de parole de campagne électorale ou non pour Emmanuel Macron.

"Entière vigilance" de l'Arcom

"Tout ou partie des propos tenus lors de cette interview pourra être pris en compte au titre de la campagne électorale [...] dès lors qu’en raison de leur contenu et de leur contexte, elles relèvent du débat politique lié aux élections", a notifié par communiqué de presse ce lundi 4 juin, l'organisme de régulation.

L'autorité officielle a également indiqué qu'elle avait envoyé un courrier "aux deux groupes audiovisuels concernés afin qu’ils lui fassent connaître sans délai les dispositions qu’ils entendent prendre, y compris de manière anticipée, pour garantir à l’ensemble des listes le plein respect d’une présentation et d’un accès équitables à leur antenne".

La veille, les listes d'opposition inquiètes avaient demandé à rencontrer l'Arcom. Pendant cette entrevue, cette dernière les a assurés de son "entière vigilance pour veiller à l’équilibre du débat démocratique sur l’ensemble des chaînes de télévision et de radio, avant le terme de la campagne électorale fixé au vendredi 7 juin à minuit".

Contactée par BFMTV.com, l'Arcom précise: à chaque fois qu'Emmanuel Macron évoquera les élections, ce temps de parole sera décompté de celui de la candidate de la liste de la majorité, Valérie Hayer.

Quand en revanche le chef de l'État s'exprimera sur des questions régaliennes ou sur "des sujets qui relèvent du débat politique", il est dans sa fonction de président. "Et son temps n'est pas décompté", explique à BFMTV.com l'Autorité de régulation.

Impossible de prévoir à l'avance

L'exercice n'est pas évident fait remarquer Malcolm Duquesney, responsable du pluralisme à BFMTV. "On ne peut pas dire à l'avance si une prise de parole du président doit être décomptée du temps de parole de la liste Renaissance aux européennes ou non", nous explique-t-il.

"Pour qu'elle le soit, il faut qu'on détermine si soutien explicite à son candidat il y a ou pas. Est-ce qu'il parle de Valérie Hayer, de son programme, de noms sur sa liste?", développe notre collègue.

Le précédent du discours de la Sorbonne

Le 25 avril dernier, Emmanuel Macron s'était déjà offert une tribune européenne lors de son discours à la Sorbonne. À l'époque, les têtes de liste d'opposition au scrutin de juin avaient déjà fait part de leur mécontentement.

L'Élysée s'était défendu de cette prise de parole sur l'Europe en arguant qu'il ne s'agissait pas là d'un "discours de campagne".

"C'est un discours de chef d'État devant une large assemblée, qui n'est pas une assemblée militante et qui engage la parole de la France", s'était à l'époque justifié le Palais.

L'Arcom avait finalement décompté entièrement les deux heures de discours présidentiel à la Sorbonne.

"Si les propos du président de la République n'exprimaient pas un soutien explicite à la liste conduite par Madame Valérie Hayer, ils présentaient néanmoins, dans leur intégralité, un lien direct avec l'élection", avait ainsi considéré l'Arcom, dans un courrier à destination des Républicains et consulté par l'AFP.

"Un temps sous les drapeaux", c'est tout

Au sujet de cette nouvelle intervention d'Emmanuel Macron, ses proches défendent à nouveau l'exercice qu'ils assurent de ne pas être une interview électorale sur le service public.

"Si Emmanuel Macron lève les yeux au ciel, les oppositions diront que c'est du temps de parole de campagne de toute façon", balaie une source proche du gouvernement auprès de BFMTV.com.

"On est au 20h, c'est les 80 ans du Débarquement, c'est important d'avoir ce temps présidentiel de rassemblement sous les drapeaux", conclut-elle.

Article original publié sur BFMTV.com