INTERVIEW. "Entre la plante et ses agresseurs, une incessante course à l'armement !"

Le système immunitaire des végétaux s'appuie sur des protéines capables de reconnaître les attaques des pathogènes... et de déclencher la production d'un cocktail d'armes chimiques mortelles.

Cet article est issu du magazine Les Indispensables de Sciences et Avenir n°210 daté juillet/ septembre 2022.

Thomas Kroj est chercheur au Plant Health Institute of Montpellier.

Sciences et Avenir : Lorsqu'ils sont attaqués par un pathogène, les végétaux savent que leur organisme est en danger… mais comment ?

Thomas Kroj : Bien que sans cerveau, il leur faut effectivement une certaine "conscience de soi" pour comprendre qu'un intrus - champignon, virus ou bactérie - est en train de pénétrer leurs cellules et qu'il est urgent de se défendre ! Le système agit de deux façons, à travers des processus chimiques. La première, c'est la reconnaissance d'une présence étrangère, du "non-soi". La seconde, la détection d'une manipulation moléculaire de l'organisme par le pathogène, un "soi modifié". La plante vérifie en permanence que tout se passe bien au sein de ses cellules.

Comment fait-elle pour déceler les assaillants ?

À la différence de la plupart des animaux, les végétaux n'ont pas de cellules ou d'organes destinés à leur protection. Leur système immunitaire, inné, est réparti dans tout l'organisme : chacune des cellules recèle des protéines nommées récepteurs qui reconnaissent les pathogènes, un peu à la manière d'un radar. Pour contourner ce système de défense, les agresseurs microbiens utilisent tous les moyens à leur disposition.

Ils sécrètent par exemple des armes moléculaires, nommées effecteurs, qui inactivent les récepteurs. Les plantes, de leur côté, développent des récepteurs qui reconnaissent spécifiquement ces effecteurs… C'est une incessante course à l'armement, qui a créé des systèmes chimiques d'une grande complexité : par exemple, sur les 40.000 gènes du riz, 700 codent pour les deux familles de récepteurs immunitaires majoritaires. Le problème, c'est qu'en termes de coévolution, les plantes ont facilement un temps de retard sur l'agresseur : celui-ci est acharné, car il n'a pas d'autre choix, pour perpétuer son espèce, que de se nourrir de la plante.

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