Insécurité : plus des deux tiers des Français approuvent l'emploi du terme d'"ensauvagement"

Depuis son utilisation par Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, le mot d'"ensauvagement" n'en finit plus d'agiter le débat public. Un sondage montre que ce vocable, controvorsé, jouit d'une large approbation des Français.

A l'évidence, le concept divise davantage la classe politique que l'opinion. Depuis que, le 24 juillet dans une interview accordée au Figaro, Gérald Darmanin a appelé à "stopper l'ensauvagement d'une partie de la population", le mot, à la généalogie politique complexe, enflamme la scène publique. La gauche le rejette souvent en ce qu'il relèverait d'une rhétorique de droite ou d'extrême droite, et l'un des membres du gouvernement lui-même en est gêné. Eric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, a ainsi reproché à son homologue de l'Intérieur de "développer le sentiment d'insécurité" des Français par cette sémantique. Cependant, un sondage Ifop conduit pour Avostart, plateforme d'assistance juridique, montre que l'idée d'"ensauvagement" est largement validée par les Français.

Une majorité aussi parmi les familles politiques

D'après cette enquête d'opinion, 70% des sondés jugent le terme "justifié", dont 33% "tout à fait justifié". 9% le trouvent en revanche "tout à fait excessif" et 21% "plutôt excessif". C'est sur l'hémisphère droit de la vie politique que le mot recueille le plus de suffrages. Ainsi, 85% des sympathisants des Républicains et de La République en marche l'approuvent, comme 83% de ceux du Rassemblement national. Le terme est encore majoritaire à Europe Ecologie-Les Verts (61%) et au Parti socialiste (59%). Les électeurs proches de la France insoumise sont plus circonspects, mais soutiennent tout de même le terme à hauteur de 47% d'entre eux.

Jean-Michel Schlosser, docteur en sociologie et spécialiste des questions de sécurité, a remarqué à ce propos sur notre plateau ce lundi:

"On note dans ce sondage une relative cohérence quelles que soient les catégories socioprofessionnelles. Et puis, au niveau politique la famille LFI a une prise de position, certes pas aussi tranchée que la droite ou l’extrême droite, mais qui dénote là aussi d’un changement d’attitude."

L'institut de sondage a voulu exploré plus précisément le fond de la pensée des Français. Il apparaît qu'il sont 42% à trouver que le mot est "à la juste mesure" pour décrire leur situation. Pour 30%, il n'est pas "assez dur". Mais 19% des sondés le jugent "trop dur", quand ils sont 9% à ne pas se prononcer. Ces segments sont sensiblement les mêmes que ceux dessinés en 1999 par l'emploi du terme de "sauvageons" par Jean-Pierre Chevènement.

Selon une enquête CSA, 41% affirmaient à l'époque alors que le terme était idoine, 29% toutefois lui reprochaient de ne pas être assez incisif. 15% des Français pointaient son excès, et 15% ne savaient trop qu'en penser.

Match nul entre Darmanin et Dupond-Moretti

On l'a dit: "l'ensauvagement" sépare l'exécutif, ou en tout cas deux de ses figures. Gérald Darmanin, qui l'a émis, et Eric Dupond-Moretti, qui le combat, lui sont ainsi particulièrement associés. L'adhésion de nombreux interrogés au concept ne semble cependant pas se traduire au regard du clivage entre ces personnalités. Selon l'Ifop, 19% des Français se disent proches des positions du ministre de l'Intérieur (trouvant surtout son soutien du côté de LaREM, à 44%, et de son ancienne formation, LR, avec 41%), et un pourcentage identique se reporte sur le garde des Sceaux. Ils sont avant tout 43% à ne se reconnaître ni en l'un ni en l'autre et 19% à ne pas se prononcer.

Dans nos studios ce lundi, François Kraus, directeur du pôle politique de l'Ifop, a livré les enseignements de son sondage maison:

"Il y a une approbation massive du vocabulaire martial du ministre de l’Intérieur. Une grande partie de la population est indifférente à l’égard des querelles sémantiques qui agitent le microcosme à l’égard de ces problèmes de sécurité. Pour eux, peu importe d’où vient ce cri d’alerte, il faut éteindre l’incendie."

Étude Ifop pour Avostart réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 3 au 4 septembre 2020, auprès d’un échantillon national représentatif de 1.003 personnes âgées de 18 ans et plus.

Article original publié sur BFMTV.com

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