Inondations en Libye : l’OMS exhorte les autorités à ne pas enterrer ses morts dans des fosses communes

La Croix-Rouge et l’OMS expliquent qu’il ne faut pas laisser de cadavres près des sources d’eau potable pour éviter une éventuelle contamination par les matières fécales.

INTERNATIONAL - A Derna, des milliers de cadavres s’échouent ou se décomposent sous les décombres. Dans cette ville portuaire, la plus touchée par les inondations dramatiques survenues en Libye après le passage de la tempête Daniel, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et d’autres associations humanitaires ont exhorté les autorités libyennes à cesser d’enterrer les victimes des inondations dans des fosses communes. Et pour cause, la crainte de la prolifération des maladies transmises par l’eau est grande.

Dans un communiqué publié samedi 16 septembre, l’OMS a affirmé que les corps de 3 958 personnes avaient été retrouvés et identifiés à Derna, et que « plus de 9 000 personnes » étaient toujours portées disparues. Le bilan a dépassé ce dimanche les 11 000 victimes, même si le Croissant rouge dément l’estimation donnée par les Nations unies.

Contamination par les matières fécales

Enterrées sous les décombres, jonchant les ruines ou flottant sur l’eau, les dépouilles présentent un spectacle terrible qui incite souvent à les enterrer au plus vite. Un rapport de l’ONU, cité par l’agence Reuters, indique que plus de 1 000 corps à Derna ont déjà été enterrés dans des fosses communes.

En règle générale, les dépouilles des victimes d’une catastrophe naturelle ne provoquent pas d’épidémies, car les personnes meurent à la suite de blessures, de noyade ou de brûlures et ne sont donc d’ordinaire pas porteuses d’organismes susceptibles de provoquer des épidémies, selon l’OMS et la Croix-Rouge.

Mais les spécialistes de l’intervention d’urgence rappellent auprès de l’AFP qu’il ne faut pas laisser de cadavres près des sources d’eau potable pour éviter une éventuelle contamination par les matières fécales.

Il existe alors un risque de diarrhée ou d’autres maladies si l’on boit cette eau contaminée. Une désinfection ordinaire de l’eau destinée à la consommation suffit à éliminer les germes dangereux.

« Ce n’est pas le cadavre qui est la cause principale du risque, c’est tout ce qui se trouve dans l’eau » comme la boue et les produits chimiques, détaille une porte-parole de l’OMS, Margaret Harris, à l’AFP. Mais après avoir touché un corps, il faut se laver les mains avec de l’eau et du savon ou avec un nettoyant à base d’alcool.

« Ceux qui survivent à un événement tel qu’une catastrophe naturelle sont plus susceptibles de propager des maladies que les cadavres, insiste de son côté le responsable de l’unité médico-légale du CICR, Pierre Guyomarch.

Dignité des cadavres

Une mauvaise gestion des morts, trop hâtive, peut également entraîner des souffrances mentales et causer des problèmes juridiques pour les proches des victimes, ajoute l’OMS.

L’OMS et la Croix-Rouge recommandent donc d’identifier les corps et de les inhumer dans des tombes individuelles clairement marquées. Il est aussi important de documenter et cartographier le site d’inhumation pour assurer la traçabilité. Enfin, l’incinération des corps non identifiés « doit être évitée ».

« Une précipitation inutile à se débarrasser des corps des personnes tuées lors de catastrophes ou de conflits prive les familles de la possibilité d’identifier et de pleurer leurs proches, tout en n’apportant aucun bénéfice en termes de santé publique », a fait valoir Gwen Eamer, chef des opérations d’urgence de la Croix-Rouge, rapporte l’ONU sur son site.

Quant à la pulvérisation de poudre de chaux sur les corps, elle n’est pas utile car n’accélère pas la décomposition, et comme les cadavres ne présentent généralement pas de risque infectieux, leur désinfection n’est pas nécessaire.

Dépassés par l’afflux de cadavres, les secouristes présents en Libye ont récemment lancé des appels pour recevoir au plus vite des housses mortuaires.

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