Incendie de la cathédrale de Nantes : 4 ans de prison ferme pour le prévenu

Sur cette photo d’archive, les pompiers sont à l’oeuvre pour éteindre l’incendie de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes survenu le 18 juillet 2020.
Sur cette photo d’archive, les pompiers sont à l’oeuvre pour éteindre l’incendie de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes survenu le 18 juillet 2020.

Le prévenu, âgé de 42 ans, est par ailleurs poursuivi pour l’assassinat du père Olivier Maire en août 2021 en Vendée.

JUSTICE - Survenu près d’un an après l’incendie de la cathédrale de Notre-Dame de Paris, l’affaire avait fait grand bruit. Ce mercredi 29 mars, soit trois ans parès les faits, l’incendiaire de la cathédrale de Nantes en 2020 a été condamné à quatre ans de prison ferme par le tribunal correctionnel de la ville, qui a retenu une altération du discernement de cet homme de 42 ans au moment des faits.

Le ministère public avait requis six ans de prison dans ce cas de figure contre Emmanuel Abayisenga, qui souffre de troubles physiques et psychiques. Cet homme fragile psychologiquement comparaissait depuis ce mercredi matin pour dégradation et destruction du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes.

« C’est bien une vaste colère et un sentiment de vengeance lié à sa situation administrative qui est à l’origine de cette mise à feu consciente et méthodique », a argumenté la procureure Véronique Wester-Ouisse, soulignant que la cathédrale de Nantes, qui a été « profondément dégradée » représente « notre patrimoine à tous ».

Dans une procédure distincte, le prévenu est par ailleurs mis en examen pour l’assassinat du père Olivier Maire en août 2021 en Vendée. Pour cette autre affaire, la tenue du procès pourrait avoir lieu fin 2024, selon son avocate.

Perte de contrôle

Vêtu d’un blouson rouge, le visage émacié, très affaibli, le prévenu arrivé en France en 2012 et bénévole pour le diocèse de Nantes depuis 2016, a été autorisé à rester assis dans son box pour répondre aux questions de la présidente du tribunal.

Il a reconnu les faits dès le début de l’audience, expliquant qu’il s’était rendu au petit matin dans la cathédrale pour prier afin de « trouver un apaisement » mais qu’il avait ensuite « perdu le contrôle » en passant devant un endroit de l’édifice où il avait subi une violente agression le 31 décembre 2018. « Depuis ce jour, je regrette ce qui s’est passé », a ajouté Emmanuel Abayisenga, qui s’exprimait parfois en français et parfois en langue rwandaise, assisté par une interprète.

« Je voulais donner ma contribution au pays qui m’a accueilli mais ça ne s’est pas passé comme ça », a-t-il ajouté avant de demander « pardon ».

Les trois foyers d’incendie allumés dans la cathédrale ont entièrement détruit le grand orgue datant de 1619, le clavier de l’orgue de chœur et un tableau de 1836 de Flandrin représentant Saint-Clair guérissant les aveugles. L’avocat de l’État, propriétaire de l’édifice, chiffre l’ensemble du préjudice à plus de 40 millions d’euros.

Cette photographie prise le 18 juillet 2020 montre les restes de l’orgue brûlé après être tombé du 1er étage lors de l’incendie à l’intérieur de la cathédrale de Nantes en 2020.
Cette photographie prise le 18 juillet 2020 montre les restes de l’orgue brûlé après être tombé du 1er étage lors de l’incendie à l’intérieur de la cathédrale de Nantes en 2020.

Une « amertume » liée à sa situation administrative

Le tribunal a longuement évoqué les soucis de santé physique et psychique du prévenu, qui souffre notamment de troubles de l’audition, d’incontinence, de problèmes pulmonaires et de troubles du comportement alimentaire. Il a par ailleurs effectué plusieurs séjours en psychiatrie et prend des traitements antipsychotiques. L’examen de la personnalité du prévenu s’est d’ailleurs avéré assez complexe.

Sur son parcours de vie au Rwanda, il a décrit une enfance « sans problème » entouré de ses parents et de 11 frères et sœurs. Il a précisé que son père n’avait pas été assassiné sous ses yeux en 1996, comme l’indiquaient son dossier de demande d’asile et ses précédentes déclarations, mais serait décédé de « maladie ».

« C’est un dossier que des passeurs ont fait pour moi pour que je puisse obtenir des papiers », a-t-il expliqué, refusant de répondre précisément aux questions concernant son passé au Rwanda, où il travaillait comme secrétaire pour la police nationale après avoir passé un concours.

En France, où il était hébergé chez des frères franciscains depuis 2018, il s’était investi dans de nombreuses associations (La Croix Rouge, Le Secours catholique, le diocèse de Nantes, les frères franciscains). Il est décrit par ces dernières comme un bénévole « serviable, discret et efficace ». Ses demandes d’asile n’ont pour autant jamais abouti.

Une nouvelle obligation de quitter le territoire délivrée en novembre 2019 l’aurait profondément « perturbé ». Dans un mail adressé à tous ses contacts à 4 h 58 du matin, le jour de l’incendie de la cathédrale, il confiait son amertume face à sa situation administrative et son agression.

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