"Impardonnable": la confusion de Marine Le Pen sur Bourguiba fait réagir en Tunisie et en Algérie

Marine Le Pen, lors de son discours au soir du premier tour de l'élection présidentielle, dimanche 10 avril 2022 - Thomas SAMSON / AFP
Marine Le Pen, lors de son discours au soir du premier tour de l'élection présidentielle, dimanche 10 avril 2022 - Thomas SAMSON / AFP

La confusion n'est pas passée inaperçue de l'autre côté de la Méditerranée. Marine Le Pen a été moquée sur les réseaux sociaux et dans les journaux algériens et tunisiens, après ses propos sur le voile au micro de France Inter mardi.

La candidate du RN défendait son idée d'interdire le port du voile dans l'espace public si elle était élue. Face à la journaliste Léa Salamé qui lui faisait remarquer que la France serait le seul pays à le faire, Marine Le Pen a confondu l'Algérie et la Tunisie.

"Bah excusez-moi, mais Monsieur Bourguiba avait interdit le voile en Algérie", a déclaré Marine Le Pen.

"Confusion impardonnable"

Alors que sur France Inter, les journalistes ne la corrigent pas sur le moment, des médias tunisiens et algériens ont relevé l'erreur. Habib Bourguiba était en effet le président tunisien et non algérien, de 1957 à 1987.

"La candidate d’extrême droite s’est emmêlée les pinceaux", a écrit le site économique tunisien Business News. L'Economiste Maghrébin y va plus fort. Selon la publication tunisienne, la "confusion" est "impardonnable pour un candidat à l'élection présidentielle d'un pays partenaire stratégique de la Tunisie".

Journaliste et chroniqueur chez Radio Mosaïque FM, l'une des premières station de radio privée de Tunisie, Haythem El Mekki a fait de l'ironie sur Twitter. "Le saviez-vous? Bourguiba avait interdit le voile en Algérie. Eh oui, c'est Marine Le Pen qui le dit", a-t-il tweeté.

Le journal algérien El Khabar relève également la méprise. Le journal saoudien ArabNews titre de son côté: "Pour Marine Le Pen, Habib Bourguiba était Algérien et avait interdit le voile".

L'inexactitude après la confusion

Au-delà de la confusion, les faits avancés par la candidate sont inexacts. Comme le précise CheckNews, l'ancien président tunisien avait bien interdit le port du voile pour les jeunes filles en 1981, mais cette limitation concernait les établissements scolaires et universitaires publics. En 1987 ensuite, l'interdiction est élargie aux agents de l’administration et des établissements publics. Elle s'étend aux institutions privées en 1991.

Selon la chercheuse tunisienne Maryam Ben Salem interrogée par Libération, le voile n'a jamais été interdit dans la rue en Tunisie. ArabNews précise que ces décisions politiques prises par Habib Bourguiba faisaient partie d'un "vaste programme de modernisation de la société et d'émancipation des femmes."

L'opposition réagit

Après la sortie erronnée de Marine Le Pen, des soutiens du président-candidat, comme le président des Jeunes avec Macron, Ambroise Méjean, ont souligné sur Twitter l'"incompétence" de la candidate RN.

L'ancien conseiller de Matignon, essayiste et consultant d'origine tunisienne Hakim El Karoui avait en premier sorti la séquence sur les réseaux sociaux mardi, en se fendant d'un "Incroyable". L'auteur de L'Islam, une religion française (Gallimard, 2018) est connu pour sa défense d'un islam de France.

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Mardi, au soir de la sortie de Marine Le Pen, Emmanuel Macron était en déplacement à Strasbourg. Interpellé par une jeune femme voilée, le président-candidat s'est réjoui, face aux caméras, d'"avoir une jeune fille qui porte le voile à Strasbourg" et qui dit être féministe.

"C'est la meilleure des réponses à toutes les bêtises que j'entends", a-t-il ajouté, en taclant sa rivale.

Article original publié sur BFMTV.com