Immigration : Les Républicains dévoilent leur plan (copié-collé sur celui du RN)

Dérogation au droit européen, réforme de la Constitution… Sur l’immigration, plus rien ne sépare Les Républicains du Rassemblement national.

Lorsqu’il a été élu président des Républicains au mois de décembre, Éric Ciotti présentait un programme (très) proche de celui de Marine Le Pen. Pour ce qui est de l’immigration, LR et le Rassemblement national ont désormais le même. Dans Le JDD ce dimanche 21 mai, le député des Alpes-Maritimes dévoile avec le président du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau et son homologue de l’Assemblée nationale Olivier Marleix deux propositions de lois qui visent à « reprendre le contrôle » sur le sujet.

Deux textes conçus comme « un projet de rupture, à la fois audacieux et sérieux », et qui ambitionnent de « mettre un coup d’arrêt à l’immigration de masse ». Or, sur le contenu, la copie rendue par Les Républicains ressemble à s’y méprendre à celle défendue par le Rassemblement national durant la présidentielle de 2022.

Révision constitutionnelle, référendum…

Premier dispositif prévu : une réforme constitutionnelle visant à « permettre la tenue d’un référendum sur la politique migratoire », ce qui n’est actuellement pas possible, l’article 11 de la Constitution limitant la convocation de référendum aux questions économiques, sociales et environnementales. Ce faisant, « les Français pourront se prononcer sur tout projet de loi ou projet de loi organique quel qu’en soit le sujet, y compris l’immigration », se félicite Bruno Retailleau.

Programme de Marine Le Pen sur l’immigration, page 10. La candidate d’extrême droite proposait déjà une réforme de la Constitution permettant aux Français de se prononcer sur l’immigration par référendum : « En raison de la gravité des enjeux en présence, il appartient au peuple souverain de se prononcer sur ces modifications profondes de notre droit. C’est la raison pour laquelle un référendum soumettra aux Français une réforme de la Constitution et des modifications des lois relatives à la situation des étrangers, à la nationalité et à l’identité françaises. »

Dans le texte proposé par LR, il est question d’inscrire dans la Constitution « la possibilité de déroger à la primauté des traités et du droit européen » et ce, lorsque « les intérêts fondamentaux de la nation sont en jeu ». Ce qui serait le cas de l’immigration. « Au cours des dernières décennies s’est mise en œuvre une révolution juridique silencieuse. Le pouvoir n’est plus entre les mains du Parlement, mais entre celles des Cours suprêmes : Conseil constitutionnel, Cour européenne des droits de l’homme… Si nous ne modifions pas la Constitution, nous aurions beau voter des lois au Parlement, elles seraient aussitôt contredites par ce gouvernement des juges », justifie Bruno Retailleau.

Là encore, on croirait lire Marine Le Pen. « En France, l’immigration est régie principalement par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, du Conseil d’État, de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme », déplorait-elle dans son programme, justifiant sa révision constitutionnelle par sa volonté de « faire prévaloir le droit national sur le droit international » en matière d’immigration.

Mimétisme

Passé la copie sur la Constitution, Les Républicains vont plus loin dans le mimétisme. Jusqu’à reprendre le vocable lepéniste de « pompes aspirantes » de l’immigration qu’il s’agirait de fermer, comme l’Aide médicale d’État que LR (comme le RN) veut supprimer. « La France n’est pas un ­eldorado. Ceux qui sont ­arrivés illégalement doivent savoir qu’ils ne seront pas bien accueillis et qu’ils n’auront aucun droit », prévient Éric Ciotti, qui entend rétablir « le délit de séjour illégal ». Là encore, la ressemblance avec les préconisations de la formation d’extrême droite est frappante.

« Il faut mettre en place une politique dissuasive d’immigration », plaidait durant la campagne Marine Le Pen, qui proposait de couper « la totalité des pompes aspirantes » et « rétablir la pénalisation de la présence et de l’entrée illégale sur le territoire ». Soit précisément ce que préconisent Bruno Retailleau, Éric Ciotti et Olivier Marleix ce dimanche dans Le JDD. Retour de la double peine (qui n’a jamais été supprimée, mais aménagée par Nicolas Sarkozy en 2003), promesse d’un « bras de fer avec les pays qui n’acceptent pas de donner des laissez-passer consulaires pour récupérer leurs ressortissants », via notamment le chantage aux visas. Soit ce que proposait en des termes similaires Marine Le Pen.

Pour lutter contre le phénomène des mineurs isolés, Les Républicains veulent également rendre obligatoire le test osseux et créer une « présomption de majorité » pour ceux qui refuseraient de s’y soustraire. Ce qui est précisément ce que la députée du Pas-de-Calais préconisait en 2020, dans une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale.

Sans surprise (puisque c’était également dans le programme d’Éric Ciotti lors du Congrès LR), le parti de la rue Vaugirard entend restreindre drastiquement le droit du sol, voire le supprimer pour les enfants nés de parents en situation irrégulière. Ce qui figure aussi dans le programme de Marine Le Pen : « La transmission de la nationalité française ne sera, pour l’essentiel, possible que par filiation. Ne peuvent être Françaises que les personnes dont l’un des parents est Français ».

Les trois dirigeants des Républicains déposeront ces deux propositions de lois (la révision constitutionnelle et le projet de loi ordinaire) dans la semaine. Au JDD, Olivier Marleix vante « une solution de droite » sur l’immigration. Oubliant semble-t-il le terme « extrême », tant le contenu est similaire à ce que prône depuis des années le parti lepéniste.

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