L'Arménie et l'Azerbaïdjan s'accusent mutuellement de violer le cessez-le-feu

L'ARMÉNIE ET L'AZERBAÏDJAN S'ACCUSENT MUTUELLEMENT DE VIOLER LE CESSEZ-LE-FEU

par Nailia Bagirova et Nvard Hovhannisyan

BAKOU/EREVAN (Reuters) - L'Arménie et l'Azerbaïdjan s'accusaient mutuellement samedi de violation du cessez-de-feu entré en vigueur à midi heure locale au Haut-Karabakh.

Ce cessez-le-feu, conclu après des négociations marathon à Moscou sous la tutelle du président Vladimir Poutine, visait à mettre fin aux combats et à permettre aux forces ethniques arméniennes du Haut-Karabakh et aux forces azéries d'échanger des prisonniers et les dépouilles des victimes de la guerre.

Mais quelques minutes seulement après l'entrée en vigueur de la trêve, les deux camps s'accusaient mutuellement de la rompre.

Le ministère arménien de la Défense a accusé l'Azerbaïdjan d'avoir bombardé des positions en Arménie, tandis que les forces de l'ethnie arménienne au Karabakh ont accusé l'armée azerbaïdjanaise d'avoir lancé une nouvelle offensive cinq minutes après la mise en place de la trêve.

L'Azerbaïdjan a déclaré pour sa part que les forces ennemies au Karabakh bombardaient son territoire.

Les deux camps ont cependant chacun nié les accusations les concernant.

Dans une déclaration suggérant que le cessez-le-feu n'était cependant pas complètement enterré, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a déclaré que les belligérants tentaient désormais de trouver un accord politique.

La réunion de négociations organisée vendredi à Moscou constituait le premier contact diplomatique entre Bakou et Erevan depuis que les combats ont éclaté le 27 septembre dans l'enclave, faisant des centaines de morts.

A l'issue de plus de 10 heures de discussions avec ses homologues azerbaïdjanais et arménien, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a annoncé aux premières heures de la journée samedi que ce cessez-le-feu avait été convenu pour des raisons humanitaires.

Il a également précisé que l'Azerbaïdjan et l'Arménie avaient accepté d'engager des pourparlers pour trouver une issue au conflit et que le Comité international de la Croix-Rouge servirait d'intermédiaire pour les opérations humanitaires.

Le ministre russe des Affaires étrangères n'a pas donné de détails sur la teneur des échanges avec ses deux homologues. Il a seulement dit que l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et le Groupe de Minsk serviraient de médiateurs.

Ni le ministre arménien des Affaires étrangères, Zohrab Mnatsakanian, ni le ministre azerbaïdjanais des Affaires étrangères, Jeyhun Bayramov, ne se sont exprimés devant les journalistes à l'issue de la réunion.

LA FRANCE ET LA TURQUIE SALUENT L'ACCORD

La reprise des combats dans le Haut-Karabakh, situé en territoire azerbaïdjanais et peuplé majoritairement d'Arméniens, a fait craindre que le conflit vieux de plusieurs décennies se transforme en guerre plus vaste impliquant la Turquie, proche de Bakou, et la Russie, liée à Erevan par un accord de défense.

La Turquie, qui a fermement soutenu Bakou, a salué l'accord, jugeant toutefois qu'il ne s'agissait que d'un premier pas.

"Le cessez-le-feu humanitaire est une première étape importante mais ne représentera pas une solution durable", a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué.

"La Turquie a souligné qu'elle soutiendrait toute solution approuvée par l'Azerbaïdjan. La Turquie continuera à se tenir aux côtés de l'Azerbaïdjan sur le terrain et à la table des négociations."

A Paris, le ministère des Affaires étrangères a également salué l'accord et invité à la reprise des discussions entre les parties sur un accord de paix.

"Des discussions substantielles, auxquelles les parties se sont engagées sous l'égide des co-présidents du groupe de Minsk, doivent reprendre sans préconditions", a précisé le Quai d'Orsay, ajoutant que la France restait "mobilisée pour y contribuer dans ce cadre".

Il s'agit des pires affrontements dans l'enclave depuis la guerre de 1991-1994 ayant causé environ 30.000 morts, avant qu'une trêve ne soit conclue mais régulièrement violée depuis lors.

L'Azerbaïdjan a déclaré vendredi que 31 civils azerbaïdjanais avaient été tués et 168 autres blessés depuis le 27 septembre, sans faire état des victimes dans les rangs de l'armée.

Les autorités du Haut-Karabakh ont indiqué que 376 soldats et 22 civils avaient trouvé la mort dans les affrontements.

(Avec la contribution de Maria Tsvetkova à Moscou, Margarita Antidze à Tbilisi, Ezgi Erkoyun en Turquie et John Irish à Paris ; version française Jean Terzian et Jean-Michel Bélot)