Guerre en Ukraine : Zelensky face au risque de délitement de l’aide et du soutien occidental à l’Ukraine

Face à des alliés de plus en plus frileux ou désintéressés du conflit en Ukraine, Volodymyr Zelensky tente de conserver un front uni pour rien céder à la Russie.
JIM WATSON / AFP Face à des alliés de plus en plus frileux ou désintéressés du conflit en Ukraine, Volodymyr Zelensky tente de conserver un front uni pour rien céder à la Russie.

GUERRE EN UKRAINE - Devant les chefs de la diplomatie européenne réunis lundi à Kiev, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait une nouvelle fois rappelé l’importance d’un front uni derrière l’Ukraine au moment où l’aide militaire de certains pays occidentaux semble remise en question. « Je suis sûr que l’Ukraine et tout le monde libre sont capables de vaincre dans cet affrontement (...) Mais notre victoire dépend directement de notre coopération », indiquait alors le chef d’État en guerre.

Des propos qui résonnent forcément avec les déclarations pratiquement simultanées de Moscou. Ce jour-là, la Russie ne semblait plus vouloir camoufler sa stratégie de miser sur « la lassitude du soutien complètement absurde au régime de Kiev ».

Une lassitude qui devrait d’ailleurs « s’accroître dans différents pays, notamment aux États-Unis », selon les prédictions du Kremlin.

L’aide américaine en suspens

Aux États-Unis justement, la situation est plutôt critique, alors que Zelensky était encore en visite à Washington fin septembre pour faire d’une pierre deux coups : prévenir d’un affaiblissement du soutien américain, tout en anticipant une éventuelle victoire républicaine à la présidentielle de 2024. Et pour cause, l’aide financière américaine est actuellement suspendue aux discussions budgétaires chaotiques au Congrès américain ; elles ont déjà fait capoter le projet d’enveloppe de 6 milliards de dollars pour Kiev, comme le rappelle la BBC.

La situation au Congrès a d’ailleurs obligé Joe Biden à s’entretenir en urgence avec un très grand nombre de dirigeants et ministres occidentaux pour les rassurer de la pérennité du soutien américain à l’Ukraine.

Pourtant en interne, l’inquiétude semble de mise comme l’a évoqué un porte-parole de la Maison Blanche peu de temps après cet appel, estimant que « le temps jouait contre (les Occidentaux) » en matière de soutien à l’Ukraine, surtout à l’approche d’un nouvel hiver qui freinera une contre-offensive ukrainienne déjà ralentie depuis de longs mois.

L’Ukraine face aux réalités de ces alliés

En dehors du contient américain, Kiev est également confronté à diverses crises qui ont entamé la solidité du soutien de ces alliés. Entre les critiques sur la lenteur de sa contre-offensive, les tensions avec la Pologne ou la crise céréalière ont récemment contraint l’Ukraine à mettre à dos plusieurs pays européens.

D’autant, souligne la BBC, que l’Ukraine se heurte aux échéances électorales de certains de ses alliés comme la Pologne et la Slovaquie, sans oublier les États-Unis, où un possible retour de Donald Trump mettrait grandement à mal l’entente bilatérale des deux pays depuis l’élection de Joe Biden.

L’Ukraine doit également rivaliser avec les problématiques internes de ses alliés, comme l’augmentation du coût de la vie, l’urgence climatique ou les crises migratoires. Durant la première année de guerre, Zelensky s’était pour cela lancé dans une vaste campagne médiatique, occupant constamment l’espace et allant jusqu’à s’inviter au Festival de Cannes ou aux Grammy Awards pour rappeler sans cesse le combat de son pays aux yeux du monde occidental.

Aujourd’hui, cette stratégie appartient au passé et Zelensky se fait plus discret, bien conscient que cette posture n’aura plus le même effet après 19 mois de guerre. Mais le président ukrainien ne veut pas tout céder. Mercredi 4 octobre, il assurait que l’Ukraine fait « tout » pour obtenir de nouveaux systèmes antiaériens avant l’hiver.

La France en première ligne

La France ne fait pas exception à ce constat. Un essoufflement de l’attention pour les enjeux de ce conflit semble pointer le bout de son nez au sein de l’opinion publique. Pour autant, la France souhaite rester en première ligne, après avoir été maintes fois critiquée par Kiev pour son dialogue répété avec Moscou ou sa frilosité à envoyer davantage de matériel militaire lors des premiers mois de guerre. Et même si Emmanuel Macron s’était abstenu d’évoquer l’Ukraine lors de sa dernière interview télévisée, preuve que le sujet est moins présent dans l’actualité, l’Élysée n’a pas caché son ambition d’une nouvelle rencontre bilatérale avec Volodymyr Zelensky.

Avant une réunion de la communauté politique européenne (CPE) à Grenade jeudi 5 octobre et une réunion informelle des dirigeants de l’UE le lendemain, l’Élysée a confirmé sa volonté : « Si Volodymyr Zelensky est à Grenade, bien sûr que le Président le rencontrera, comme dans toutes les occasions », assure-t-on. Depuis, le chef d’État en guerre a confirmé a présence à Grenade.

Par ailleurs, la présidence française a clarifié sa position quant à une supposée « lassitude » occidentale prédite par Moscou. « Nous sommes déterminés à faire échouer la Russie, qui mise sur le temps long, sur la lassitude ou sur telle ou telle élection pour gagner son pari », souligne-t-on dans l’entourage présidentiel. La stratégie de la France est désormais claire : « Afficher et démontrer notre détermination à aider l’Ukraine dans la durée ». Une première épine en moins dans le pied du président ukrainien.

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