Guerre en Ukraine : la torture utilisée comme « politique de guerre » par la Russie, d’après cette experte de l’ONU

En Ukraine, la torture fait partie de la « politique russe », dénonce une experte de l’ONU (photo d’illustration prise en septembre 2022 dans l’Est de l’Ukraine et montrant des membres des forces de sécurité ukrainiennes œuvrant après la découverte de fosses communes).
JUAN BARRETO / AFP En Ukraine, la torture fait partie de la « politique russe », dénonce une experte de l’ONU (photo d’illustration prise en septembre 2022 dans l’Est de l’Ukraine et montrant des membres des forces de sécurité ukrainiennes œuvrant après la découverte de fosses communes).

GUERRE EN UKRAINE - Les mots sont lourds de sens, d’autant qu’ils proviennent de la rapporteure spéciale de l’ONU sur le sujet. Comme l’a déclaré Alice Jill Edwards, les forces armées russes et leurs supplétifs recourent de manière systématique à la torture dans les territoires occupés de l’Ukraine. Au point que l’experte onusienne évoque une « politique délibérée » de la part des troupes du Kremlin.

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« Le nombre d’accusations crédibles de torture et d’autres formes de traitements ou châtiments cruels, inhumains ou humiliants » indique que « la torture est un élément de la politique de guerre de la Russie », a déclaré Alice Jill Edwards ce vendredi 8 mars. « Ces crimes graves ne semblent pas être le fruit du hasard ou d’un accident », a-t-elle ajouté devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, elle qui s’était rendue en Ukraine en septembre.

« Une intention et un but »

Alice Jill Edwards a précisé aux journalistes avoir appris auprès des procureurs ukrainiens l’ouverture d’environ 103 000 dossiers liés à des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, et que 90 % d’entre eux étaient enregistrés comme des cas de torture.

La rapporteure, qui a dit avoir examiné elle-même des dizaines d’affaires d’exactions présumées commises par les forces russes et leurs alliés, a déclaré qu’il y avait manifestement « une intention et un but dans la pratique de la torture qui ne peuvent être décrits comme un comportement aberrant ou un comportement ad hoc ».

Dans un rapport rédigé à la suite de sa visite, Alice Jill Edwards a établi que « la torture a été pratiquée de manière organisée et systématique » et que les mêmes pratiques auraient été mises en œuvre dans différentes régions occupées. Ses conclusions, a-t-elle déclaré au Conseil, indiquent « une autorisation directe et une politique délibérée ».

Moscou invitée à condamner

Alice Jill Edwards et les autres rapporteurs spéciaux sont des experts indépendants missionnés par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, mais ne s’expriment pas au nom des Nations unies. Vendredi, elle a appelé Moscou à « émettre une directive forte et sans équivoque […] indiquant que la torture n’est jamais admissible et qu’elle sera punie ».

La rapporteure, qui n’a pas été autorisée à se rendre en Russie, a également exhorté le pays à « ouvrir des enquêtes sur ces accusations, et autoriser des inspecteurs internationaux à se rendre sur tous les lieux de privation de liberté et à observer les procédures pénales ».

Elle a par ailleurs affirmé que « les autorités ukrainiennes font des efforts sincères pour traiter les prisonniers de guerre avec respect ». Son rapport a toutefois soulevé plusieurs préoccupations concernant les conditions de détention dans un établissement pénitentiaire à Lviv, ville de l’ouest de l’Ukraine, avec la détention de ressortissants ukrainiens accusés de collaborer avec les Russes. Elle a reçu « plusieurs accusations de traitements abusifs de la part de fonctionnaires ukrainiens », principalement en rapport avec la capture, l’arrestation et le transit de prisonniers.

« J’appelle les autorités ukrainiennes à enquêter rapidement sur ces accusations, à renforcer la formation et les mesures disciplinaires et autres mesures préventives, et à garantir la protection de tous les droits légaux de tous les plaignants et détenus », a-t-elle déclaré.

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