Guerre en Ukraine: ce que l'on sait du charnier découvert dans la ville libérée d'Izioum

Le 16 septembre 2022, l'Ukraine a déclaré avoir recensé 450 tombes sur un seul site funéraire près d'Izioum après avoir repris la ville orientale aux Russes.
 - JUAN BARRETO / AFP
Le 16 septembre 2022, l'Ukraine a déclaré avoir recensé 450 tombes sur un seul site funéraire près d'Izioum après avoir repris la ville orientale aux Russes. - JUAN BARRETO / AFP

Une macabre découverte dans la ville libérée d'Izioum. Alors que cette ville clé du Nord-est de l'Ukraine a été reprise par les forces de Kiev il y a près d'une semaine, les autorités ukrainiennes ont affirmé ce vendredi y avoir retrouvé quelque "450 tombes". Le président Volodymyr Zelensky a imputé la responsabilité de ce charnier à "l'occupation russe".

• 445 civils et 17 militaires

Ce jeudi soir, le président Zelensky évoquait la découverte d'une "fosse commune" dans la ville d'Izioum, reprise aux forces russes lors de la contre-offensive de Kiev. Il avait invité des journalistes ukrainiens et internationaux à se rendre sur place afin de rendre des "informations claires et vérifiées" sur ce charnier.

"Nous voulons que le monde sache ce qui se passe réellement et ce à quoi l'occupation russe a conduit. Boutcha, Marioupol, maintenant, malheureusement, Izioum...", avait-t-il déploré.

Ce vendredi à Izioum, les journalistes de BFMTV et de l'AFP ont pu observer des médecins légistes et militaires ukrainiens s'affairer au milieu d'une forêt à l'entrée de la ville. Ici, une fosse où 17 militaires ukrainiens ont été enterrés.

Autour de celle-ci, plusieurs centaines de tombes surmontées de croix, portant des numéros, pour certaines des noms. Des dates sont également inscrites, allant de début mars, quand la ville était encore sous contrôle ukrainien, à début septembre.

Au total, selon les journalistes de BFMTV présents sur place, 445 civils ont été enterrés ici pendant l'occupation russe. "99%" des corps exhumés vendredi à Izioum, ville de l'est de l'Ukraine récemment reprise aux Russes, "présentaient des signes de mort violente", a déclaré dans la soirée le gouverneur régional Oleg Synegoubov.

• Les corps exhumés pour être identifiés

Les corps sont actuellement déterrés afin d'être comptés et identifiés. Sur Sky News, Serguiï Botvinov, un responsable de la police régionale, s'est exprimé sur les potentielles circonstances des décès.

"Nous savons que certains ont été tués (abattus), d'autres sont morts à cause de tirs d'artillerie, de traumatismes dus à l'explosion de mines. Certains sont morts dans des frappes aériennes" et "de nombreux corps n'ont pas encore été identifiés" a-t-il expliqué.

Selon les journalistes de l'AFP à Izioum, la plupart des croix sans noms sont en bois brut, celles nommées étant plutôt en bois verni ou peint, parfois même ornées de fleurs.

Le responsable gouvernemental pour la recherche des personnes disparues, Oleg Kotenko donne notamment cet exemple d'une famille "enterrée là, avec un jeune enfant. Ils ont été tués, il y a des témoins du même immeuble, ils ont vu ce qui s'est passé et ont enterré ces gens ici".

"Les tombes qui ne portent pas de noms sont celles de gens (trouvés) dans la rue" a-t-il précisé, ajoutant qu"il y a beaucoup de personnes qui sont mortes de faim".

Sur place, un journaliste de l'AFP a également pu constater qu'au moins un corps avec les mains liées avait été exhumé ce vendredi. Selon lui, il était impossible d'établir dans l'immédiat s'il s'agissait d'un civil ou d'un militaire, en raison de l'état du corps. Ce qui a été confirmé par les journalistes de BFMTV, qui évoquent également des "traces de strangulation". Mais selon les procureurs présents sur place, des enquêtes plus précises doivent être menées.

• Les tombes découvertes grâce à une vidéo postée sur les réseaux sociaux

Selon Oleg Kotenko, la découverte des tombes de la forêt d’Izioum a été faite grâce à une vidéo postée sur les réseaux sociaux et que l'AFP a pu visionner.

Un homme portant une casquette avec un drapeau russe y dit notamment qu'il doit s'occuper des corps de soldats ukrainiens et "les enterrer car l’Ukraine n’en veut pas."

"Les négociations avec les autorités ukrainiennes n'ont rien donné, ils ont refusé de prendre les corps, donc nous les avons enterrés nous-mêmes dans le cimetière de la ville", peut-on y entendre.

Une autre vidéo montre des corps de soldats, enveloppés dans des sacs mortuaires et emmenés depuis la morgue.

• L'ONU veut envoyer une équipe pour enquêter

Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU a immédiatement indiqué vouloir envoyer "sous peu" une équipe à Izioum pour "déterminer les circonstances de la mort de ces personnes".

"Lorsque des charniers sont découverts, il est important de vérifier s'il s'agissait de militaires ou de civils, s'ils ont été tués ou s'ils sont morts dans le cadre des combats, ou bien de cause naturelles exacerbées par le manque de soins médicaux" a indiqué Elizabeth Throssell, porte-parole du Haut-Commissariat, lors du briefing régulier de l'ONU à Genève.

Depuis le début de la guerre, la Russie nie toutes les exactions dont Kiev l'accuse. Au sujet du charnier d'Izioum, Volodymyr Zelensky a accusé les forces russes d'être des "meurtriers" et des "tortionnaires".

Le 9 septembre, l’ONU a indiqué que sa mission de surveillance des droits de l’Homme en Ukraine avait jusqu’à présent documenté plus de quatre cents détentions arbitraires et disparitions forcées par les forces russes en Ukraine.

La mission doit publier le 27 septembre prochain un rapport complet sur l’impact de l’invasion sur les droits humains dans le pays.

Article original publié sur BFMTV.com