Guerre en Ukraine: la contre-offensive reportée, un leurre de Kiev?

Info ou intox? Dans un entretien accordé à la BBC, Volodmyr Zelensky a confié que la très attendue contre-offensive ukrainienne devrait encore patienter un peu. "Avec (ce que nous avons), nous pouvons avancer et obtenir des succès. Mais nous perdrions beaucoup d'hommes et je pense que c'est inacceptable", a-t-il reconnu.

"Si on écoutait les chefs militaires ukrainiens, on comprenait qu'ils n'étaient pas encore tout à fait prêts, mais c'est la première fois que le président ukrainien le dit", analyse Patrick Sauce, éditorialiste politique internationale de BFMTV.

Depuis des semaines, voire des mois, la date exacte du début de cet assaut fait l'objet de nombreuses spéculations, beaucoup mentionnant une "offensive de printemps". Elle pourrait peut-être avoir lieu à l'été.

Un "coup de pression aux Occidentaux"

Pour l'État-major ukrainien, cette contre-offensive est un fusil à un coup: il ne peut pas échouer. "Il ne s'agit pas de reprendre quelques villes et de faire un peu bouger les lignes, Volodymyr Zelensky s'est imposé de reprendre l'intégralité du territoire", explique Patrick Sauce.

L'armée ukrainienne doit avoir le maximum d'hommes et de munitions avant de se lancer réellement. Et c'est sur ce dernier point que le président ukrainien a insisté: il explique manquer notamment de cartouches et d'obus.

Ce jeudi, le Royaume-Uni a annoncé qu'il allait donner des missiles de longue portée à l'Ukraine, devenant ainsi le premier pays à fournir de telles armes. Dans le cadre des préparatifs à la contre-offensive, cette annonce n'est pas anodine: il s'agit de missiles d'une portée de 400 km, permettant de tirer depuis un avion, depuis son propre territoire, loin du front.

Le report de l'assaut ukrainien "c'est aussi un coup de pression aux Occidentaux pour leur dire qu'ils ont encore besoin de plus", précise Patrick Sauce, ajoutant qu'il peut également s'agir d'un "mirage pour faire passer le temps" en attendant de recevoir les nouvelles livraisons.

40.000 hommes prêts

"On est de toute façon dans le brouillard de la guerre", poursuit le spécialiste, expliquant qu'il y avait de plus en plus d'intox entre forces russes et forces ukrainiennes, les deux camps s'accusant régulièrement de diverses attaques.

La stratégie ukrainienne peut également être de brouiller les pistes face à l'armée russe. "L'dée c'est que tout le monde sait qu'une contre-offensive va arriver. Reste à savoir quand et comment", détaille Patrick Sauce, assurant qu'elle arrivera avant l'hiver.

Aujourd'hui, du côté ukrainien, au minimum neuf brigades, soit 40.000 hommes, sont prêts à partir, dont de nombreux ont été formés par les Occidentaux. Il s'agit désormais de trouver la fenêtre.

Les combats font rage à Bakhmout

En attendant, les Ukrainiens font des "coups de sonde" pour tester les lignes de défense russe. "Avant de lancer une grande offensive, vous tentez, c'est ce qu'ils ont fait à Kherson: on réussit à percer à des endroits et pas à d'autres", explique Patrick Sauce.

C'est notamment ce qu'il se passe dans la région de Bakhmout, épicentre des combats depuis des mois. Durant la dernière semaine, les forces de Kiev ont gagné 65km² autour de la ville grâce à ces coups de sonde. Le chef du groupe paramilitaire russe Wagner a d'ailleurs affirmé que les Ukrainiens avaient déjà lancé leur contre-offensive sur Bakhmout.

Sur le reste du front, les Russes ont établi des défenses solides et fortifié la ligne de front. Ils ont accumulé des tranchées, des zones minées ou encore des obstacles en béton armé, appelés "dents de dragon", pour gêner les véhicules blindés ukrainiens. "Mais sur plus de 800 km de front, vous avez beau vous préparer, il y aura un effet de surprise", assure Patrick Sauce.

Article original publié sur BFMTV.com