Chars Leopard : Pourquoi la Pologne doit demander à l’Allemagne son autorisation

This picture taken on May 19, 2022 shows soldiers on a Polish Leopard tank as troops from Poland, USA, France and Sweden take part in the DEFENDER-Europe 22 military exercise, in Nowogard, Poland. - Poland's Defence Minister Mariusz Blaszczak on January 24, 2023 said Warsaw had asked Germany for permission to send its German-made Leopard tanks to Ukraine. (Photo by Wojtek RADWANSKI / AFP) / ALTERNATIVE CROP

ARMEMENT - Si l’on vous dit CNR, à quoi pensez-vous ? Beaucoup répondront Conseil national de la Résistance. Certains diront peut-être Conseil national de la refondation. Mais les experts militaires auront une autre réponse : Clause de Non-Réexpédition. Et si vous vous demandez pourquoi cette devinette, c’est parce que ces trois lettres prennent une dimension particulière dans le cadre de la guerre en Ukraine.

Elles sont au cœur du débat sur la livraison d’armes à Kiev pour aider le pays à affronter l’ennemi russe, particulièrement pour ce qui est des chars Leopard réclamés par Volodymyr Zelensky.

Pas de transfert sans accord du vendeur

En attendant que l’Allemagne qui les fabrique réponde favorablement à la demande de l’Ukraine, plusieurs pays qui en disposent se disent prêts à prélever sur leurs stocks pour les livrer. Mais, il faut pour cela l’accord de Berlin. Car même si la Pologne a évoqué la possibilité de ne pas attendre l’accord, une demande formelle a été transmise ce mardi 24 janvier par les dirigeants polonais à leurs homologues allemands. « La demande nous est parvenue (...) Nous allons traiter la demande avec l’urgence requise conformément à la procédure prévue » , a précisé un porte-parole du gouvernement d’Olaf Scholz.

Il s’agit là du processus traditionnel dans l’univers des systèmes d’armement. Lorsqu’il achète une arme, l’acheteur signe un « certificat d’utilisation finale » et s’engage ainsi à être l’utilisateur du matériel. Pour revendre ou prêter cette arme, il doit alors obtenir l’accord du vendeur.

Pour examiner une demande, les pays de l’Union européenne se sont dotés d’une ligne commune en 2019. Elle repose sur huit critères, dont le respect par le destinataire des engagements internationaux, la préservation de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionales. Autant de garde-fous qui semblent aujourd’hui remplis dans le cadre de la guerre en Ukraine.

Pourquoi l’Allemagne est réticente

Reste un point crucial : la volonté du pays vendeur. Et sur ce point, l’Allemagne fait face à un dilemme historique visible au sein même du gouvernement actuel où la ligne des écologistes (favorables à une aide massive à l’Ukraine) s’oppose à celle (plus prudente) des sociaux-démocrates. Depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, elle a une tradition pacifiste de non-livraison d’armes sur les conflits pour ne pas entraîner d’escalade. Cette crainte est redoublée dans le cas de la guerre en Ukraine, au regard de la géographie du continent.

Si elle participe déjà à l’équipement ukrainien (y compris avec des véhicules de combat), l’Allemagne temporise sur le point sensible de la livraison de chars lourds et ne souhaite pas être le premier État à fournir un tel matériel. Olaf Scholz aimerait attendre que les États-Unis fassent de même avant de se lancer à son tour.

L’Allemagne n’est d’ailleurs pas le seul pays réticent à donner un accord de réexpédition d’armes. Depuis le début de cette guerre, la Suisse est régulièrement sollicitée par des États à qui elle a vendu du matériel. Mi-janvier, elle a dit non à l’Espagne comme elle avait refusé les demandes allemandes ou danoises courant 2022 pour rester sa fidèle à sa stratégie de neutralité.

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