Guerre en Ukraine : les alliés de Kiev divisés sur l’utilisation d’armes occidentales en Russie

Emmanuel Macron montre une carte présentant la situation de guerre entre la Russie et l’Ukraine lors d’une conférence de presse conjointe avec le chancelier allemand, près de Berlin.
ODD ANDERSEN / AFP Emmanuel Macron montre une carte présentant la situation de guerre entre la Russie et l’Ukraine lors d’une conférence de presse conjointe avec le chancelier allemand, près de Berlin.

INTERNATIONAL - Nouveau sujet sensible. Au beau milieu de sa visite en Allemagne, le président de la République a ouvert un nouveau débat au sein des alliés de l’Ukraine sur l’aide militaire fournie à Kiev face à l’agression de la Russie de Vladimir Poutine. Emmanuel Macron a estimé ce mardi 28 mai que l’Ukraine devait pouvoir répondre à l’agression en envoyant des missiles fournis par l’Occident sur le sol russe, provoquant une réaction ferme du principal soutien militaire de Kiev.

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« On doit leur permettre de neutraliser les sites militaires d’où sont tirés les missiles (...), les sites militaires depuis lesquels l’Ukraine est agressée », a ainsi lancé le président français lors d’une conférence de presse aux côtés du chancelier Olaf Scholz, au dernier jour de sa visite d’État.

En plein débat sur l’utilisation des armes occidentales en Russie, la position du chef de l’État s’est voulue pragmatique : « Si on leur dit “vous n’avez pas le droit d’atteindre le point d’où sont tirés les missiles”, en fait on leur dit, “on vous livre des armes mais vous ne pouvez pas vous défendre”. »

Il a toutefois souhaité tracer une ligne rouge, évoquant des frappes limitées aux bases militaires russes d’où la Russie frappe l’Ukraine. « On ne doit pas permettre de toucher d’autres cibles en Russie, et évidemment [pas] des capacités civiles », a-t-il imposé comme condition sine qua non.

La politique du « oui, mais »

Plus évasif sur la question, le chancelier allemand semble moins réticent que par le passé. Même si la crainte d’une escalade et d’une extension du conflit est dans toutes les têtes. Avec comme point d’orgue la menace nucléaire régulièrement brandie par le président russe.

« L’Ukraine a toutes les possibilités de le faire, en vertu du droit international », a sobrement déclaré Olaf Scholz. « Il faut le dire clairement, elle est attaquée et peut se défendre. » Ces derniers mois, l’Allemagne comme l’Italie avaient exprimé de grandes réticences à l’idée de voir des armes occidentales frapper le territoire russe.

Pour autant, Emmanuel Macron est le premier à reconnaître que « la Russie a un peu adapté ses pratiques » et attaque désormais l’Ukraine depuis des bases qui sont en Russie. « Nous ne voulons pas d’escalade », a répété le président français, conscient du caractère sensible de cette question au sein des alliés de Kiev.

Car derrière les alliés occidentaux, l’Otan milite pour permettre à l’Ukraine de se défendre au mieux. Son secrétaire général Jens Stoltenberg a d’ailleurs regretté que les capitales occidentales ne lèvent pas suffisamment des restrictions qui « lient les mains dans le dos des Ukrainiens ».

Washington s’oppose, Moscou menace

Mardi, la position de la France s’est toutefois heurtée avec force à la réponse des États-Unis. Porte-parole du Conseil de sécurité nationale, John Kirby a ainsi confirmé que la position américaine n’avait absolument pas changé sur la question. « Nous n’encourageons ni ne permettons l’utilisation d’armes fournies par les États-Unis pour frapper sur le sol russe », a-t-il ajouté sur le sujet.

La réaction la plus épidermique aux déclarations d’Emmanuel Macron est en tout cas venue de Moscou, où le président Vladimir Poutine a une nouvelle fois menacé les Occidentaux, de façon à peine voilée, d’utiliser l’arme nucléaire.

« En Europe, en particulier dans les petits pays, ils doivent réfléchir à ce avec quoi ils jouent. Ils doivent se souvenir qu’ils sont bien souvent des États ayant un petit territoire et une population très dense », a-t-il lancé lors d’un déplacement en Ouzbékistan. « Ce facteur est une chose sérieuse qu’ils doivent avoir à l’esprit avant de parler de frapper en profondeur le territoire russe. »

« Cette escalade permanente peut avoir de graves conséquences », a ajouté le chef du Kremlin, à l’heure ou Kiev réclame plus que jamais de pouvoir utiliser les armes livrées par ses alliés selon ses besoins stratégiques. Vladimir Poutine a également rappelé que la peur occidentale d’une escalade était plus que fondée en Ukraine. Selon lui, même si ce sont les militaires ukrainiens qui procéderaient aux frappes, elles seraient « préparées » par les Occidentaux qui leur fournissent les armes. Ce qui est vécu par le dirigeant russe comme une volonté de « conflit mondial » des alliés de Kiev.

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