La guerre Russie-Ukraine gêne les avions au-dessus de l’Europe, et ça ne fait qu’empirer
TRANSPORTS - Le Danemark n’est pas exactement un voisin de l’Ukraine, mais il fait régulièrement les frais de l’agression russe. Alors que le conflit entame sa troisième année aux confins de l’Europe, Moscou s’applique depuis le début à le faire déborder autant que possible vers l’Europe centrale, dans l’Union Européenne. Avec une méthode éprouvée : le brouillage des coordonnées GPS et autres moyens satellitaires de localisation ( que l’on appelle dans leur globalité GNSS).
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C’est ainsi qu’à périmètre changeant, très changeant, les citoyens des pays baltes, d’une moitié du territoire polonais ou encore des limites orientales du Danemark avec de fortes interférences, voire dans le noir s’ils se réfèrent à leurs application de type Google maps pour se repérer. Comme les nôtres, leurs smartphones utilisent les satellites américains du global positioning system (GPS) ou la constellation européenne Galileo. Sauf que certains jours, ces données satellites n’atteignent plus leur cible, comme vous pouvez le découvrir dans notre vidéo en tête d’article.
L’expérience de la Russie en Syrie, en action
À la question de savoir « qui est derrière tout ça ? », la réponse n’a jamais été un mystère. D’abord parce que Vladimir Poutine et son armée n’en ont pas fait un secret ; ensuite parce qu’il est facile de trianguler la position des brouilleurs. Et c’est là que les choses deviennent particulièrement intéressantes, comme l’a expliqué au HuffPost Erik Kannike, responsable d’une entreprise de renseignement pour la défense estonienne.
« Début novembre, la Fédération de Russie a augmenté ses efforts de brouillage, pour empêcher les attaques de drones. Mais à Kaliningrad, la conclusion logique est que les instruments utilisés servent aussi à brouiller les satellites Starlink ». Kaliningrad est l’enclave russie située entre la Lituanie et la Pologne, un confetti d’URSS devenu, dans les années 2000, l’endroit où Moscou aime à montrer sa capacité de nuire à l’Union Européenne.
C’est ainsi qu’une large partie des zones impactées par les brouillages rayonne autour de la fameuse enclave, qui abrite tout un complexe dédié à cette tâche, dénommé « Tobol ». Là, ce ne sont pas les drones ukrainiens qui en font les frais, mais les avions de reconnaissance de l’OTAN et les signaux de la fameuse constellation de satellites mise en place par Elon Musk. Starlink est en effet la seule manière, dans l’Ukraine touchée par les combats, de se connecter à internet.
Tous ces efforts de blocage ont-ils démarré avec la guerre Russie-Ukraine ? Pas du tout. « La Russie utilise son expérience acquise en Syrie [...] Si vous prenez la région de la Mer Noire, qui est en crise, il y a beaucoup de brouillage en cours », décrypte le spécialiste. Il n’empêche, le conflit est un tournant : « L’étendue [du brouillage] est tout à fait nouvelle. »
Pour l’aviation civile, un problème sans solution
C’est pour cela que les agences mondiales de l’aviation tirent depuis des mois la sonnette d’alarme. Au point qu’au mois de janvier, l’EASA (agence de l’aviation civile européenne) et son équivalent américain l’IATA ont organisé un rendez-vous de travail sur ce thème. Et ses conclusions sont à la fois rassurantes… Et pessimistes.
Pour l’instant, l’étendue et la puissance des brouillages (et du trucage de données, qui peut faire prendre un mauvais chemin à un avion) ne créent pas de danger grave et imminent. Les pilotes peuvent toujours utiliser des solutions alternatives, les signaux radio notamment. Pour les phases critiques que sont l’atterrissage et le décollage en particulier, les agences ont invité les avionneurs à mieux communiquer sur ces méthodes plus traditionnelles de navigation.
À l’heure actuelle et à court terme, il n’existe de toute façon pas de véritable moyen de contrer ce type d’action. « Les avions militaires ont des spécifications qui résistent mieux au brouillage, estime Erik Kannike. Ça pourrait ouvrir des pistes ». Et d’une manière générale, l’expert considère qu’il faut demander conseil à ceux par qui tout est arrivé : les Ukrainiens. « Très confrontés au brouillage, ils apprennent de leur expérience. Nous devrions en discuter avec eux ».
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