La guerre Israël-Hamas épaissit le “brouillard de la déraison”

Un épais nuage enveloppe le Royaume-Uni, s’inquiète The New Statesman. Un “brouillard de guerre”. Cette expression, inventée par le général prussien Carl von Clausewitz, désigne l’absence d’information fiable sur un champ de bataille. L’hebdomadaire de gauche en actualise la définition, sur la une de son numéro daté du 27 octobre, sur fond de conflit entre Israël et le Hamas, symbole d’un avènement de “la désinformation, du complotisme et de la paranoïa”.

“L’incapacité à discerner la vérité et la fiction a pris une nouvelle tournure avec l’affaire de l’explosion à l’hôpital Al-Ahli de Gaza”, s’alarme le journaliste Andrew Marr, dans les colonnes du magazine londonien. Les conclusions hâtives de certains médias sont venues percuter les croyances personnelles du grand public sur le conflit israélo-palestinien. Peu importent les clarifications, les démonstrations, chacun s’était déjà fait son propre avis.

“La fusion entre des penchants parfois complotistes et les failles médiatiques ne date pas de ces dernières semaines”, concède l’ancien présentateur vedette de la BBC.

“Mais elles prennent une nouvelle tournure avec les outils d’intelligence artificielle, les réseaux sociaux, et la défiance grandissante envers les institutions publiques.”

Redonner du sens

Plus inquiétant encore, le personnel politique lui-même semble, outre-Manche, céder à la grande confusion, au “rejet des faits tangibles, ce contrat qui relie les citoyens et permet un débat éclairé”. Lors du congrès du Parti conservateur, début octobre, un député de la majorité a par exemple laissé entendre que le concept de ville du quart d’heure, censé offrir aux habitants les services de base à proximité de leurs domiciles, permettrait aux autorités de savoir “combien de fois par jour vous allez faire vos courses”. Résultat, par calcul électoral, certains élus “donnent de l’oxygène” aux théories complotistes, et “alimentent le brouillard”.

Cette “prise de pouvoir de la déraison”, Andrew Marr l’associe au sentiment d’insécurité des sociétés occidentales. “Dans une période de déclassement, les fake news offrent l’illusion du pouvoir, analyse le vétéran du journalisme politique britannique. L’immigration de masse est réelle. La montée en puissance de la Chine aussi. La dislocation économique ? Pareil.” Y voir le dessein d’une force cachée “permet de donner du sens” à ces bouleversements. Aux responsables politiques de prendre la mesure du danger pour la cohésion générale et de remettre les préoccupations des électeurs au cœur de leurs priorités, avant que “le brouillard ne bloque définitivement la lumière”.

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