Guerre Israël-Hamas : le premier bateau d’aide humanitaire pour Gaza reste dérisoire face à « l’urgence absolue »

Guerre Israël-Hamas : le premier bateau d’aide humanitaire pour Gaza reste dérisoire face à « l’urgence absolue » (Photo du navire Open Arms à Chypre avant son départ pour Gaza)
IAKOVOS HATZISTAVROU / AFP Guerre Israël-Hamas : le premier bateau d’aide humanitaire pour Gaza reste dérisoire face à « l’urgence absolue » (Photo du navire Open Arms à Chypre avant son départ pour Gaza)

GAZA - Un « pansement sur une jambe de bois ». Ce mardi 12 mars, un bateau chargé de vivres est parti de Chypre à destination de la bande de Gaza. C’est le premier navire d’aide humanitaire à emprunter ce couloir maritime pour tenter de soulager le territoire palestinien en proie à une crise humanitaire majeure et menacée de famine, à cause du conflit avec Israël.

Guerre Israël - Hamas : le premier bateau du nouveau couloir maritime entre Chypre et Gaza est parti

Ce bâtiment de l’ONG espagnole Open Arms, transporte environ 200 tonnes de vivres (riz, farine, conserves...), selon l’AFP. Ils doivent être distribués à Gaza par l’organisation World Central Kitchen (WCK) du chef hispano-américain José Andrés. Dans un message publié sur X, WCK indique « travailler pour envoyer autant de bateaux que possible ».

Et il en faudra, car ce bateau reste une goutte d’eau dans l’océan comparé à la quantité d’aide dont ont besoin les réfugiés Gazaouis qui ont commencé le mois du ramadan lundi. D’autant plus que la mise en place de ce système par voie maritime n’est pas pour tout de suite.

Pas le temps d’attendre une jetée face à « l’urgence absolue »

Pour que l’acheminement maritime aboutisse, de gros travaux restent en effet à faire. Un navire militaire américain a quitté samedi les États-Unis avec le matériel nécessaire à la construction d’une jetée pour débarquer les cargaisons. Un chantier qui pourrait prendre jusqu’à 60 jours. World Central Kitchen a précisé à l’AFP que ses équipes à Gaza sur place sont également chargées de construire cette jetée.

« Il faut saluer cette nouvelle aide maritime, mais ça va prendre des semaines et des semaines avant que l’embarcadère soit construit », regrette auprès du HuffPost Jean-Claude Samouiller, président d’Amnesty International France.

Pour lui, qui voit dans ce bateau humanitaire un « pansement sur une jambe de bois », ces quelques semaines seront celles de trop. « Il y a une urgence absolue, la population est complètement affamée, des ONG humanitaires sur place documentent le fait que des enfants commencent à mourir de faim », déplore-t-il, appelant à prendre des mesures immédiates, sans attendre la fin de la construction de la jetée.

Une aide par la mer, les airs, la terre… Mais toujours insuffisante

Cette nouvelle aide maritime n’est pas la seule mobilisée dans la bande de Gaza puisque des largages aériens d’aide alimentaire sont effectués quotidiennement sur le territoire palestinien. Ceci depuis plusieurs jours par les États-Unis et d’autres pays, comme la Jordanie et la France.

Mais l’envoi d’aide par la mer et les parachutages ne peuvent se substituer à la voie terrestre, martèle cependant l’ONU, qui voit la situation sanitaire s’aggraver de jour en jour.

Des camions arrivent au compte-goutte sur le territoire via le passage de Rafah, à la frontière avec l’Égypte mais cette dernière est régulièrement fermée par Israël. Et quand ce n’est pas le cas, les camions autorisés à passer sont eux aussi exposés à de potentiels bombardements, ou pris d’assaut avec parfois des drames comme ce fut le cas récemment lorsque l’armée israélienne a ouvert le feu.

Pour Jean-Claude Samouiller, la mesure immédiate qui pourrait être prise est l’ouverture de corridors humanitaires, et la fin du blocus imposé par Israël à la bande de Gaza depuis 16 ans.

« Au bord du gouffre humanitaire »

Selon Amnesty International, depuis février, une moyenne quotidienne de 105 camions est autorisée à entrer dans la bande de Gaza. Un chiffre dérisoire quand on sait qu’avant le 7 octobre, quand le territoire n’était pas encore en crise, environ 500 camions en moyenne entraient dans Gaza chaque jour, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires. Ils y acheminaient des vivres et des marchandises, notamment de la nourriture, de l’eau, du fourrage destiné au bétail, des fournitures médicales et du carburant.

Selon des chiffres de l’ONU, environ 80 % de la population de Gaza dépend de l’aide internationale, et environ un million de personnes dépendent de l’aide alimentaire quotidienne. Aujourd’hui, les Gazaouis ont fui leurs maisons, la grande majorité pour se réfugier à Rafah, puis ailleurs au sud depuis que l’annonce d’une opération israélienne imminente sur la ville.

« Les États-Unis, principaux alliés d’Israël, devraient les exhorter à ouvrir les points de passages afin de faire entrer les 500 camions journaliers comme c’était le cas avant, pour soulager la désespérance gazaouie », appelle le président d’Amnesty International France. Il souligne toutefois qu’au vu de la gravité de la situation, il en faudrait aujourd’hui bien plus que 500 par jour.

« On est au bord du gouffre humanitaire », martèle-t-il, nous expliquant que la situation est encore plus critique au nord puisque le peu d’aide qui arrive par le sud est très vite bloqué par les attaques, les pillages et les bombardements. La partie nord de la bande de Gaza se retrouve complètement isolée et sans aucun accès aux soins fondamentaux.

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