Golf de Villeneuve-de-la-Raho : une manifestation organisée en face du chantier ce samedi 16 mars

Golf de Villeneuve-de-la-Raho : une manifestation organisée en face du chantier ce samedi 16 mars
ED JONES / AFP Golf de Villeneuve-de-la-Raho : une manifestation organisée en face du chantier ce samedi 16 mars

ENVIRONNEMENT - Un nouveau golf va être construit dans un des départements les plus secs de France. Une vingtaine d’associations, partis politiques et collectifs ont manifesté ce samedi 16 mars à Villeneuve-de-la-Raho, à quelques kilomètres de Perpignan. Objectif : protester juste en face du chantier fraîchement entamé d’un nouveau golf, projet très controversé en période de sécheresse prolongée dans les Pyrénées-Orientales.

Dans les Pyrénées-Orientales, une sécheresse visible depuis l’espace

Ce projet de nouveau golf, qui s’accompagne de la construction de 600 logements, d’une trentaine de villas, et d’un hôtel, est soutenu depuis plus de 20 ans par la mairie de la petite commune. Problème : il ne pleut plus dans cette région, qui entre dans sa « troisième année de sécheresse extrême d’affilée » selon Météo France.

Or les golfs sont gourmands en eau : ils nécessitent un arrosage régulier des surfaces d’herbe qui entourent les trous. Arroser 160 hectares est un luxe difficilement imaginable au moment même où la région fait face, y compris en plein hiver, à un déficit de pluviométrie historique et à plusieurs records de chaleur.

« Il faudrait 600 mm de pluie pour recharger les nappes phréatiques et au moins 350 mm pour passer l’été », résume Nicolas Garcia, élu communiste et premier vice-président du département, chargé de l’eau. Or, depuis le début de l’hiver, Perpignan n’en a reçu qu’une cinquantaine et le préfet n’a cessé de prolonger et renforcer ses mesures de restriction sur l’usage de l’eau.

Une centaine de scientifiques opposés au projet

Dans le secteur de Perpignan, « les sécheresses sont telles que l’on peut comparer le stress hydrique que nous vivons avec les situations semi-arides qui touchent l’Espagne ou le Portugal », ont alerté 92 scientifiques opposés au projet. Dans une tribune publiée début février, ils qualifient le projet de nouveau golf d’« hors-sol » et d’« emblématique d’une vision dépassée ».

Le ministre de l’Agriculture lui-même émet des doutes sur le projet. « Un golf dans une zone sans eau, même sans être golfeur moi-même, il me semble quand même que ça pose une petite difficulté », a estimé Marc Fesneau, ce dimanche 18 février sur France Inter. Il a notamment soulevé la question des priorités d’accès à l’eau dans la région. « Dès lors qu’on a une hiérarchie des usages, (…) ils prennent le risque eux-mêmes d’avoir un golf qui soit un paillasson... », a-t-il souligné.

Déterminée, la maire de Villeneuve balaie les critiques

Face à ces critiques, Jacqueline Irlès reste de marbre : « cela ne me fait pas peur », dit-elle dans une interview au Parisien. Pour elle il s’agit d’un « poumon vert », qui permet d’éviter une bétonnisation totale de cette zone constructible. Par ailleurs, ce nouveau golf sera arrosé entièrement avec les eaux récupérées par la station d’épuration, soit 1 million de litres d’eau valorisés chaque jour, assure-t-elle.

Aux chercheurs opposés au projet, elle rétorque enfin : « ces scientifiques, qu’ont-ils fait comme recherches pour éviter que nous nous trouvions dans la situation difficile qui est la nôtre aujourd’hui ? Je les invite à venir me rencontrer pour qu’ils puissent comprendre quelle est notre démarche environnementale ».

Arrosé par un lac, les eaux usées, un canal ?

Ces derniers répondent point par point à son argumentaire dans leur tribune : selon le projet, le golf doit être alimenté en partie par le lac de Villeneuve-de-la-Raho, qui n’est plus rempli qu’au tiers de sa capacité. Plus encore, en ce qui concerne la réutilisation de l’eau de la station d’épuration, les chercheurs alertent que « les capacités vont diminuer, les mêmes restrictions d’usage s’appliquant à l’eau potable ». Ils rappellent enfin que « la situation actuelle de stress hydrique ne doit pas être considérée comme exceptionnelle par rapport aux années passées mais bien comme la norme (basse) des années à venir ».

« Dans les différents documents, dont l’enquête publique partielle, il y a des incohérences, renchérit Mathieu Pons-Serradeil, avocat de l’association Écologie Pays Catalan. Tantôt on nous dit qu’on prendra l’eau du lac (de Villeneuve-de-la-Raho), tantôt on nous dit que ce sera l’eau du canal qui permet aux agriculteurs d’arroser, tantôt qu’on recyclera l’eau de la station d’épuration. Aujourd’hui on ne sait pas », explique-t-il auprès de France Bleu.

Malgré la polémique, les travaux ont déjà commencé depuis novembre 2023, pour une fin de chantier espérée fin 2025-début 2026. Les opposants au projet demandent la suspension des travaux au plus vite. L’association Écologie Pays Catalan a déposé un recours devant le tribunal administratif de Montpellier pour tenter de faire annuler la déclaration d’utilité publique accordée au projet en 2019, bien avant les trois dernières années de sécheresse.

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