Glucksmann et Toussaint en meeting, lettre de Ruffin : à gauche, la bataille de leadership est de retour pour les européennes

Raphaël Glucksmann et José Bové, le 20 janvier 2024 lors du meeting à Bordeaux de l’eurodéputé Place Publique et possible tête de liste socialiste aux européennes 2024.
PHILIPPE LOPEZ / AFP Raphaël Glucksmann et José Bové, le 20 janvier 2024 lors du meeting à Bordeaux de l’eurodéputé Place Publique et possible tête de liste socialiste aux européennes 2024.

POLITIQUE - La première, Marie Toussaint, est officiellement investie tête de liste des Écologistes. Le second, l’eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann est archi-favori pour mener une liste conjointe entre son parti et le PS. Ce samedi 20 janvier, tous deux étaient en meeting pour les européennes, alors que (re)surgit le spectre d’une entente entre écolos et socialistes.

À Bordeaux où se déroulait sa réunion publique, Raphaël Glucksmann s’est affiché aux côtés de José Bové, deuxième figure de l’écologie politique à rallier sa cause après Daniel Cohn-Bendit. L’ancien eurodéputé a clairement dit ses attentes. Verts, socialistes, « arrêtez les conneries, mettez-vous ensemble », a exhorté José Bové. « Je ne comprendrai pas que le 9 juin on n’ait pas dans l’urne un bulletin qui réunisse toutes ces sensibilités de gauche et écologiques », a-t-il lancé devant plusieurs centaines de personnes.

Après l’interminable débat (tranché à l’automne 2023) d’une liste commune aux quatre partis de gauche, celui d’une union entre socialistes et écologistes est-il en train de monter ? Dans le baromètre YouGov pour Le HuffPost, les listes écologistes et socialistes sont au coude à coude, avec respectivement 9 % et 8 % des intentions de vote recueillies entre le 8 et le 15 janvier. Et certains plaident pour une alliance, comme José Bové ou la maire socialiste de Paris Anne Hidalgo le 13 janvier dans un entretien à La Tribune du Dimanche.

Raphaël Glucksmann n’est pas contre. « Il y a des partis avec lesquels on peut avoir une vision de l’Europe proche, à commencer par les socialistes (...) et ensuite les Verts, parce qu’il n’y a pas de suspicion d’être anti-européen ou eurosceptique », a-t-il indiqué à l’AFP samedi. « Il n’y a pas de négociations, on ne fait pas de forcing », a-t-il ajouté. Mais « si à un moment il y a un changement de stratégie des Verts, il y aura une discussion. Car il y a là une opportunité de bouleverser la scène politique française », a poursuivi l’eurodéputé français.

Toussaint refuse de participer « à la guerre des gauches » mais...

Sauf que du côté des écolos, c’est non. « Laissez-nous faire une liste écologiste », a répliqué dès le 15 janvier la secrétaire nationale du parti Marine Tondelier, après une première (petite) main tendue de Raphaël Glucksmann.

Depuis Villeneuve-d’Ascq (Nord) ce samedi, Marie Toussaint a redit qu’elle « ne participerait pas à la guerre des gauches ». « Je n’ai pas d’ennemi à gauche, je refuse d’en avoir », assure celle qui prônait au début de sa campagne un « pacte de non-agression. » Ce qui ne l’empêche pas de réaffirmer ses désaccords avec les socialistes sur certains textes européens comme le pacte migratoire.

Et, comme le rapporte Libération qui a couvert son meeting, cela ne l’a pas non plus empêchée de souligner les « ambiguïtés politiques » du probable numéro 1 de liste socialiste. « Une question est posée : est-ce qu’on choisit la transformation écologiste ou est ce qu’on choisit la nostalgie sociale-démocrate ? », avait-elle lancé avant le début de l’événement, selon nos confrères.

La lettre ouverte de Ruffin à Glucksmann

Ce discours intervient juste après une lettre adressée à Raphaël Glucksmann par François Ruffin, sous la forme d’une note de blog. À la veille du rendez-vous de l’eurodéputé à Bordeaux, le député LFI de la Somme lui a fait part de son « franc désaccord », « sans agressivité, mais avec sincérité » et de son « inquiétude pour l’avenir de notre camp, celui de la gauche et du progrès humain ».

« Voilà plusieurs fois que vous me tendez la main » dans des interviews, salue l’insoumis, reconnaissant qu’« il le faut, oui, ce dialogue, avec vous, dont la voix compte, et avec d’autres ». Et s’il reconnaît avoir apprécié chez l’essayiste et leader de Place publique lors de la campagne européenne de 2019, sa « lucidité » et son « autocritique de classe », il déplore aujourd’hui des propos « pour de bon hors-sol, déconnectés, sans ancrage ».

« Je n’y retrouve plus rien du “retour sur soi-même”, mais au contraire tout – pardonnez ma franchise – d’une élite qui avance, avec arrogance et inconscience. C’est un chemin inquiétant pour la gauche, même pour le centre-gauche », écrit François Ruffin qui met en garde contre « un retour des “deux gauches irréconciliables” », « une partition même où chacun joue son solo, se tourne le dos : une gauche radicale qui fait tout pour effrayer, et un centre-gauche tout pour désespérer. »

Sans citer le député de la Somme, Raphaël Glucksmann a appelé depuis Bordeaux à « sortir du triptyque Macron-Mélenchon-Le Pen ». « Une autre voie est possible ! », a-t-il lancé, alors que ses désaccords européens (mais pas que) avec le fondateur de LFI Jean-Luc Mélenchon sont de notoriété publique. Auprès de Mediapart, l’eurodéputé assure néanmoins qu’il répondra prochainement « sur le même ton ouvert et sans rien cacher de (leurs) divergences » à François Ruffin, qu’il « distingue » de Jean-Luc Mélenchon.

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