«Get Lucky» et tais-toi

C’est le syndrome Léa Seydoux : les Daft Punk partout, aux Emmy Awards, en streaming, rue du Cirque. Vous écoutez ce que vous voulez, pourvu que ce soit eux. Get Lucky n’est pas une mauvaise chanson, mais pourquoi ne pas écouter autre chose que ce Sly and the Family Stone 2.0 ? Notez, il n’y a pas que dans la musique : les industries culturelles n’ont jamais été si concentrées autour des mêmes.

La dématérialisation n’a pas tenu ses promesses. Souvenez-vous, il était question d’une «longue traîne», une notion qui nous garantissait qu’en perdant notre disquaire de quartier au profit d’un site de téléchargement, la diversité triompherait. Sous forme de 33 tours, les hits de la pop du Baloutchistan étaient introuvables ? Qu’à cela ne tienne, ils deviendraient disponibles grâce à Internet. Les best-sellers, les fameux 80 % des ventes, continueraient à exister mais seraient concurrencés par les 20 % de fond de catalogue. Mais la multitude de tuyaux dont on nous vantait l’avènement a accouché d’un pipeline : le choix unique. Cette situation à un nom, «l’effet Matthieu», du verset de l’Evangile : «A tout homme qui a, il sera donné, et il aura du surplus.» Voilà pourquoi de notre casque jaillissent les casqués. Pourquoi de telles polarisations ? Nous avons trop le choix. Les espaces infinis des disquaires dématérialisés effraient : impossible de s’y repérer. Dès lors, chacun est conduit vers les mêmes choix - l’inextricable réseau de ruelles vous reconduit vers les autoroutes. En attendant des mécanismes pour nous guider, personne ne prendra de risque : tout le monde sortira couvert, c’est-à-dire casqué.

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