Geste politique

Toutes les sociétés, même les plus individualistes, ont besoin de symboles. Fille de la raison, la Révolution le savait bien, qui a inventé ses propres rituels pour faire pièce à ceux de l’ancien temps. Le principe vaut pour le Panthéon, cette ancienne église catholique devenue temple républicain. Dépoussiérer ? Moderniser ? Rajeunir ? Le plus possible bien sûr. Jean-Paul Goude, par exemple, l’avait magnifiquement réussi pour le bicentenaire de 1789, avec son défilé baroque aussi festif que solennel. Va donc pour la panthéonisation…

Celle-ci renforce même sa légitimité par la qualité des nouveaux impétrants, quatre résistants qui ont dit non à l’inhumain et milité en même temps pour une société plus humaine. Qui dira ensuite, comme on l’entend si souvent à droite, que la France n’a plus de mémoire, qu’elle passe son temps à se repentir ? Même dans une société mondialisée, même au cœur de l’Europe en construction, laisser les symboles de la nation au nationalisme, au lepénisme, à l’intolérance, c’est leur concéder une victoire majeure. Nostalgie désuète ? Non : geste politique. Geneviève de Gaulle était une gaulliste sociale, Jean Zay un radical réformateur, Pierre Brossolette un socialiste et Germaine Tillion une progressiste antitotalitaire, apôtre de la liberté et de la conciliation. La gauche, si mal en point partout en Europe, y trouvera sinon un réconfort, du moins une inspiration.



Retrouvez cet article sur Liberation.fr

Françoise Barré-Sinoussi
Edward Snowden
Simone de Beauvoir Portrait robot du panthéonisable moderne
Irène Frachon
Mariam Guerey