La Gambienne Sona Jobarteh, griotte parmi les griots

Traditionnellement, chez les griots d’Afrique occidentale, ce sont les hommes qui manient les instruments pendant que les femmes chantent.

Mais désireuse de bouleverser les codes, Sona Jobarteh a demandé à son père de lui apprendre à jouer de la kora. Aujourd’hui, elle est la première femme à connaître un succès international avec cet instrument.

Le soutien d’un père

Lorsqu’elle était enfant, être une fille l’agaçait : elle voulait qu’on la traite comme les garçons. Elle était passionnée de foot, qu’elle pratiquait encore plus que la musique. “Et puis j’ai compris que même en étant très bonne, je resterais toujours dans l’équipe féminine, qui était plutôt nulle à l’époque. Je me suis dit que je n’avais aucune chance de percer, et dans la musique non plus. Je ne voulais pas être mise à l’écart et qu’on me dise que j’étais douée… pour une femme.”

En juillet dernier, la jeune artiste, aujourd’hui âgée de 38 ans, a démontré toute l’étendue de son talent lors du festival de musique traditionnelle de Forde, en Norvège. Elle a interprété avec brio, à la kora, une version énergique du morceau traditionnel Kaira, accompagnée d’une guitare électrique, d’une basse et de percussions. Sur Gambia, morceau hommage à ses racines, elle a fait monter sur scène son père, Sanjally, installé en Norvège. Lui aussi descend d’une lignée de griots qui, depuis sept cents ans, font vivre en musique la tradition orale de leur peuple.

Sona Jobarteh avait 17 ans lorsqu’elle a annoncé à son père qu’elle voulait apprendre à jouer de la kora, instrument à mi-chemin entre le luth et la harpe. “Il m’a beaucoup soutenue.” Elle avait toujours rêvé de faire de la musique, mais ne savait pas exactement sous quelle forme. “Je voulais composer sur chaque instrument qui me tombait sous la main”, raconte-t-elle avec enthousiasme lors de notre rencontre, dans un restaurant désert, juste avant son concert.

Parcours d’une touche-à-tout

Elle a grandi entre la Gambie et le Royaume-Uni (sa mère est anglaise), où elle a étudié la musique occidentale au sein de la [prestigieuse] Purcell School for Young Musicians. Elle a ensuite suivi un cursus d’histoire et de linguistique à l’École des études orientales et africaines (Soas) de l’université de Londres. Elle n’a pas jugé utile d’étudier la musique là-bas, puisque “les gens de la Soas ont appris avec [sa] famille”, et elle a préféré se former auprès de son père et de ses oncles : “Je n’aurais pas pu rêver de meilleurs professeurs.”

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