Gérald Bronner : « Je suis resté un enfant des quartiers populaires »

Le sociologue Gérald Bronner.   - Credit:AMAURY CORNU / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
Le sociologue Gérald Bronner. - Credit:AMAURY CORNU / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Dans un livre porteur d'espoir, Les origines : pourquoi devient-on qui l'on est ? aux éditions Autrement, le sociologue Gérald Bronner, « nomade social » de provenance très modeste, réfléchit à la question des origines en entrelaçant récit autobiographique et analyse scientifique. Pour le sociologue, le fait de traverser plusieurs mondes est un avantage. Une aventure enrichissante et stimulante. Un discours qui vient à rebours de celui des transfuges de classe, qui revendiquent la volonté de « venger leur race ».

Le Point : Votre réflexion sur les origines est à contre-courant du discours dominant des « transclasses ». Qu'est-ce qui vous éloigne de ce type de récit ?

Gérald Bronner : La question des origines est celle de l'aventure qui nous fait aller vers nous-mêmes. Or, nous pouvons rater ce chemin en prenant des impasses narratives qui font scintiller seulement les moments de douleur. Car qui n'a pas eu des moments de douleur, d'humiliation ? Ce sont ainsi des vérités qui peuvent traduire un mensonge général. Mais surtout, ces récits ont toujours le thème de la vengeance sous la plume. Ils veulent se venger de la classe bourgeoise, « venger leur race », comme le dit Annie Ernaux. Je me dis qu'ils ne vengent rien du tout. Au contraire, ils produisent des récits qui vont dans le sens des attentes stéréotypées des classes bourgeoises sur les classes populaires. Il me semble donc que c'est un discours de soumission plutôt que de revanche. Si l'on veut faire h [...] Lire la suite