Fusillades dans plusieurs villes de Côte d'Ivoire, dont Abidjan

par Ange Aboa BOUAKE, Côte d'Ivoire (Reuters) - Des fusillades ont été signalées dans plusieurs villes de Côte d'Ivoire samedi, y compris dans une caserne d'Abidjan, la capitale économique du pays, alors que des militaires se sont mutinés pour demander une revalorisation de leur solde ainsi que le paiement de primes. Des soldats se sont emparés vendredi de Bouaké, la deuxième ville de Côte d'Ivoire, et la contestation s'est propagée à au moins quatre autres localités tandis que le gouvernement tente de jouer la carte de l'apaisement. Le ministre de la Défense, Alain-Richard Donwahi, s'est rendu samedi à Bouaké pour rencontrer les chefs des mutins, qu'il a une nouvelle fois promis d'écouter pour "trouver une solution". Dans le même temps, les forces loyalistes se sont déployées à Abidjan. Un journaliste de Reuters a notamment vu soldats de la Garde présidentielle prendre position sur deux des trois ponts qui enjambent le lagon séparant le nord et le sud de la ville. Des coups de feu nourris ont été entendus dans la nuit à Khorogo dans le nord et à Bouaké samedi matin. Des fusillades ont également été signalées à Man dans l'ouest, à Touleupleu et à Abidjan où sont situés les administrations et le parlement. "Des coups de feu ont aussi éclaté dans notre caserne", a déclaré un soldat du complexe militaire d'Akouedo situé dans un quartier résidentiel d'Abidjan. Les militaires mutins ont installé des points de contrôle aux entrées de Bouaké vendredi alors que le gouvernement a envoyé sur place des renforts. Les tirs d'armes à feu ont débuté samedi vers 06h00 (06h00 GMT) dans cette localité d'environ un demi-million d'habitants avant de s'estomper dans la matinée. "DÉPLORABLE POUR L'IMAGE DE NOTRE PAYS" Les raisons de ces tirs n'ont pas été établies dans l'immédiat mais un soldat mutin a expliqué que des mouvements suspects avaient été observés à l'extérieur de la caserne locale. "Ce sont des tirs pour les décourager", a-t-il dit. Un journaliste de Reuters qui s'est rendu à Bouaké et a pu rencontrer certains mutins a précisé que la plupart étaient des soldats du rang ainsi que des combattants démobilisés. La majorité semblait être d'anciens membres des Forces nouvelles, mouvement qui avait mené une rébellion et fait de Bouaké sa capitale de fait de 2002 jusqu'à la fin de la guerre civile en 2011. Le président Alassane Ouattara a tenu une réunion de crise vendredi soir avec le ministre de la Défense et les responsables des forces armées. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, le ministre de la Défense a appelé les soldats "à garder leur calme et à rentrer dans les casernes en vue de permettre la recherche de solutions durables". "Nous allons discuter avec nos hommes, recueillir leurs préoccupations et trouver des solutions à cette situation", a-t-il ajouté à l'issue de la réunion d'urgence. Il a estimé que la révolte était "compréhensible mais déplorable. Déplorable pour l'image de notre pays et pour le travail qui a été fait par le Président de la République depuis la sortie de crise". (Pierre Sérisier et Tangi Salaün pour le service français)