La France à +4 °C en 2100 ? Comme s’adapter à un tel scénario, désormais privilégié

ENVIRONNEMENT - Il n’y a pas si longtemps, c’était le scénario du pire. C’est désormais ce à quoi le pays se prépare. Ce mardi 23 mai, le gouvernement va donner le coup d’envoi de la consultation devant définir une nouvelle stratégie pour adapter la France aux enjeux du réchauffement climatique qui, dans une « hypothèse pessimiste » pourrait aller jusqu’à 4 °C d’ici 2100, a-t-il annoncé ce dimanche 21 mai, au moyen d’une interview du ministre Christophe Béchu dans Le JDD.

En février, le gouvernement a installé un Comité de pilotage ministériel, chargé de dessiner le troisième plan national d’adaptation au changement climatique, le PNACC3, avec pour objectif de le finaliser d’ici la fin de l’année.

« La réalité globale du réchauffement climatique s’impose (....) il faut donc se préparer concrètement à ses effets inévitables sur notre territoire et sur nos vies. C’est pourquoi nous voulons doter notre pays d’une trajectoire claire en termes d’adaptation (...) dont les implications seront déclinées dans tous les secteurs, à tous les niveaux dans tous les territoires », annonce ainsi le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu.

Il s’agit selon lui de « construire un modèle de résilience de notre société au plus près des réalités du terrain et d’éviter la mal-adaptation ».

Canicules de deux mois

Le précédent plan national, établi en 2011 et révisé en 2018, se fondait sur une augmentation de la température moyenne mondiale de 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, ce qui pour la France, où le réchauffement est environ 50 % plus élevé, correspondrait à une hausse d’environ 3 °C d’ici 2100. Mais le gouvernement compte désormais y ajouter un « scénario plus pessimiste » correspondant « à la tendance probable en l’absence de mesures additionnelles », dans lequel le réchauffement mondial serait de 3 °C, et donc de 4 °C en France métropolitaine.

« On a qualifié le premier scénario (à 2 °C, ndlr) d’optimiste, et le second de pessimiste, mais en réalité c’est plutôt de scénario réaliste qu’il faut parler », a ajouté Christophe Béchu dans son interview au JDD ce dimanche.

Or dans ce scénario à +4 °C, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article, les canicules pourraient durer jusqu’à deux mois et certaines zones particulièrement exposées (arc méditerranéen, couloir rhodanien, vallée de la Garonne) pourraient connaître jusqu’à 90 nuits tropicales par an.

Le gouvernement s’attend en outre à des pluies extrêmes plus intenses, notamment sur une large moitié nord, et des épisodes de sécheresse de plus d’un mois l’été dans le sud et l’ouest. Les pénuries d’eau se multiplieront avec de « fortes tensions sur l’agriculture et la forêt » et la « quasi-totalité des glaciers français auront disparu ». La multiplication des inondations aura un « fort impact » sur les assurances, sur l’aménagement du territoire et sur les transports.

Enfin, des « risques importants sur tous les bâtiments, les infrastructures de transport et les réseaux d’énergie, d’eau et de télécommunications » sont à prévoir avec des « effets marqués sur les zones côtières (érosion du trait de côte, submersions marines) ».

La réponse du gouvernement avec trois chantiers

À +3 °C dans le monde, la baisse du produit intérieur brut (PIB) serait comprise entre 6,5 % et 13,1 %, estime pour sa part le géant de la réassurance Swiss Re. Du côté des assurances, les dégâts pourraient augmenter de 30 % à horizon 2050. Des pertes de récoltes agricoles de 7,4 % pour le blé et de 9,5 % pour l’orge sont attendues en 2050, et pour la forêt, le rendement baisserait entre 4,6 % à 11,6 % pour le pin.

Face à cela, le gouvernement français, en plus des mesures annoncées ces derniers mois (plan Eau, Fonds vert…), propose trois chantiers.

Le premier visera à mettre à jour les différents référentiels (Drias, Drias Eau, Climadiag) sur lesquels s’appuient les autorités pour anticiper les effets du réchauffement. Le deuxième sera un plan d’accompagnement des collectivités locales tandis que le troisième lancera des études de vulnérabilité pour adapter l’activité économique.

« Les mesures d’adaptation à mettre en place dès aujourd’hui, quelle que soit la trajectoire d’adaptation fixée, représentent au minimum 2,3 milliards d’euros additionnels par an », prévient déjà le gouvernement.

Face à ces annonces, et alors qu’il était invité de la matinale de RMC ce dimanche, le député EELV de Paris Julien Bayou a dénoncé l’inaction du gouvernement contre le changement climatique, critiquant un « plan canicule » qui n’est qu’une « fiche technique et des annonces d’annonces ».

Quatre degrés en plus, « c’est des difficultés pour se nourrir, c’est évidemment l’accès à l’eau (qui se complexifie). C’est Dunkerque qui devient une presqu’île. C’est le recul du trait de côte, c’est des inondations, des incendies. Comment on fait ou est ce qu’on les reloge ces personnes ? », a notamment demandé le parlementaire. Sans visiblement grand espoir que la consultation lancée de mardi permette de prévenir ces catastrophes à venir.

À voir également sur Le HuffPost :

Pourquoi ces scientifiques masqués sont le nouvel espoir des anti-autoroute

À Mexico, l’éruption du Popocatépetl provoque la fermeture temporaire de l’aéroport