La France peut accorder le statut de réfugiés aux déserteurs de l'armée russe

La France peut accorder le statut de réfugié aux soldats russes ayant refusé de combattre en Ukraine, selon la doctrine adoptée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) jeudi, qui a cependant rejeté la demande d'un citoyen russe, dont les éléments ont été jugés insuffisants. "Les Russes fuyant la mobilisation pour la guerre en Ukraine et les mobilisés ayant déserté peuvent obtenir le statut de réfugié", a estimé la CNDA dans un communiqué.

Une décision justifiée car "un ressortissant russe appelé dans le cadre de cette mobilisation est susceptible de commettre, directement ou indirectement, des crimes de guerre".

Cette doctrine, la première en France concernant les déserteurs de l'armée russe, s'appuie sur une directive européenne du 13 décembre 2011 et un arrêt de la Cour de Justice de l'Union européenne du 26 février 2015.

Une première demande rejetée

Dans la foulée, la Cour a rejeté la demande d'asile d'un Russe qui se présentait comme un déserteur, estimant "que les déclarations et les pièces produites ne permettaient pas d'établir que le requérant avait été mobilisé dans le contexte de la guerre" de la Russie en Ukraine.

Le demandeur russe de 28 ans avait quitté la Russie en avril 2019 en raison d'actes "violents et répétés" de son père, puis reçu deux convocations s'inscrivant dans la mobilisation partielle engagée par le président Vladimir Poutine le 21 septembre 2022, dans le cadre de la guerre en Ukraine.

Une "grande formation" composée de neuf juges s'était penchée fin juin sur la demande de ce ressortissant russe, après que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) l'eut rejetée en première instance, émettant des doutes sur la véracité de son récit.

La CNDA a pointé plusieurs anomalies dans les documents fournis et "a également constaté que le requérant avait été exempté du service militaire en 2013 et qu'il avait fui son pays en 2019 en invoquant des craintes familiales et religieuses".

"Pour prétendre à une protection sous le statut de réfugié, il faut justifier de son caractère mobilisable par des éléments précis comme des documents ou des déclarations détaillées et personnalisées", a déclaré la vice-présidente du CNDA Christine Massé-Degois.

"Il y a une exigence de la Cour très forte pour démontrer que la personne est mobilisable, alors qu'une personne qui fuit son pays n'a pas forcément toujours sa convocation ou son livret militaire sur elle", a regretté l'avocat du demandeur Me Sylvain Saligari. Il envisage de se pourvoir devant le Conseil d'État.

Article original publié sur BFMTV.com