Finale de la CAN 2024 Nigeria-Côte d'Ivoire: les petits poteaux, la vraie formation des Eléphants

"Quand Pelé Guéré jouait un match à 15h, à midi, c’était déjà rempli. Il n’y avait plus une place. Tout le monde voulait le voir jouer, c’est la légende absolue des petits poteaux", s’émerveille encore Sylou Nico, passionné de maracana dont les réseaux sociaux We Love Maracana compte plus d’un million d’abonnés sur plusieurs plateformes cumulées.

Entre 2002 et 2012, Pelé Guéré régalait les amoureux des petits poteaux sur la terre rouge du Zébié, au cœur de Yopougon, quartier populaire d’Abidjan où de nombreuses stars des Eléphants ont grandi. Le maracana, ou petits poteaux donc, se joue à six contre six avec un gardien, appelé backman et il n’a pas le droit d’utiliser ses mains.

"Les enfants ont la faculté de manipuler le ballon avec facilité"

En cette dernière semaine de Coupe d’Afrique à domicile, tous les gamins du quartier chahutent en enchaînant les toros et les matches. Pas de tournoi ce vendredi, puisqu’ils sont organisés à chaque vacances scolaires. Sur le bord du terrain, le Président Angelo Révélation (oui, aux petits poteaux, il n’y a que des surnoms !), surveille les pépites en devenir. "On appelle ça le maracana, parce qu’on s’est inspiré des Brésiliens, qui jouent pieds nus sur le sable tout petit. Ici, c’est pareil, dès le bas-âge, les enfants ont la faculté de manipuler le ballon avec facilité. Quand ils arrivent sur les grands poteaux (foot à 11), ils ont cette capacité technique et de passe au-dessus de la moyenne."

Pour encore plus de maîtrise technique, Sylou Nico nous explique pour tous portent aux pieds des lekes, ces sandalettes en plastique: "Avant on jouait pieds nus, mais les lekes nous permettent d’être encore plus en contrôle avec le ballon."

Gagner le Zébié, mieux que la Ligue des champions pour un Ivoirien

Ceux qui ont la chance de fouler la terre du Zébié sont au cœur du réacteur, dans la Mecque des petits poteaux. "Tout gamin rêve de jouer ici", promet le fondateur de We Love Maracana. "Le tournoi du Zébié a 33 ans d’existence. C’est la référence. Les petits jouent en juillet et le tournoi des seniors clôt la saison nationale fin août ou début septembre. C’est mieux que gagner la ligue des champions pour un Ivoirien." Les équipes sont organisées en quartier, même si des clubs sont en train de se structurer pour rassembler les meilleurs joueurs du pays. Car une fédération des petits poteaux se développe. A la tête de la sélection nationale, c’est King Kabiné. "Les gens m’ont surnommé Guardiola, parce que je développe du bon football."

"Petit pont, jonglage, on veut régaler le public"

King Kabiné a d’ailleurs dirigé la dernière victoire des Eléphants 3-0 face au Liban, dont les joueurs sont issus de la forte communauté libanaise d’Abidjan. "J’aime jouer avec un seul défenseur solide, un milieu très solide et trois attaquants. Les Ivoiriens aiment le jeu direct. Je veux dominer. Et aux petits poteaux, si tu mènes au score, il y a ce qu’on appelle le plaisir plaisir. Et là, c’est petit pont, jonglage, on veut régaler le public." Le sélectionneur a fait éclore Titi Koné, également champion du monde de foot freestyle, ou encore La Flèche et Ganso Selecao. Mais la Côte d’Ivoire n’est pas seule sur la planète maracana. Le Togo et l’Afrique du Sud sont les deux autres références continentales. Sylou Nico veut créer une CAN des petits poteaux qui devraient voir le jour prochainement.

Les grands clubs ivoiriens recrutent au Zébié

Ahmed et Lassana, deux ados de Yopougon, viennent tous les jours tâter le Zébié. "C’est pour se distraire entre amis, c’est obligé de jouer! Et puis, on peut percer, il y a des recruteurs tout le temps ici!" Les grands clubs Ivoiriens, comme Africasports ou l’ASEC Mimosas vient en effet dénicher les pépites locales. Dernièrement, c’est Oumar Diakité, dit le wrou wrou national, qui a éclaboussé le Zébié. Il est sur toutes les lèvres. Le gage d’une belle carrière pour Sylou Nico. "Tu peux être le meilleur technicien du monde, si tu ne gagnes pas ici au Zébié, tu ne seras jamais un grand joueur. Il y a beaucoup de pression." Au moment d’affronter le Nigéria, les Diakité, Kessié, Adingra et consorts n’auront donc pas les genoux qui tremblent, eux qui ont vaincus la pression populaire du Zébié!

Article original publié sur RMC Sport