Fin du timbre rouge : La Poste répond aux critiques

Alors que le timbre « lettre prioritaire » disparaîtra le 1er janvier 2023, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer son remplacement par une « e-lettre » pénalisant les personnes en situation de fracture numérique.

LA POSTE - « Dans trois ou quatre ans, le timbre rouge aurait disparu. » Invité de France Info ce vendredi 30 décembre, Philippe Dorge, directeur général adjoint du groupe La Poste, a justifié le remplacement du timbre rouge au 1er janvier 2023 par un nouveau service dématérialisé appelé « e-lettre rouge ». Cette nouvelle formule – jugée coûteuse, peu sécurisée et complexe pour les personnes ne maîtrisant pas Internet – est dénoncée par des politiques, syndicats et des usagers eux-mêmes.

Si La Poste a pris la décision d’enterrer le fameux timbre, c’est qu’il est déjà voué à une lente disparition. Le timbre rouge représente « 200 millions d’objets par an et diminue de 15 à 20 % chaque année », assure Philippe Dorge. Alors que 1,2 milliard de plis sont acheminés chaque par son cousin le timbre vert, poursuit le responsable.

Plus écologique

Pour Philippe Dorge, cette décision permet aussi à la Poste de « réduire son impact environnemental ». En effet, alors que l’utilisation du timbre rouge a été divisée par 14 en 14 ans, le groupe achemine toujours ces courriers par avion. « Les moyens deviennent complètement disproportionnés car, pour acheminer ces objets, nous avons aujourd’hui trois avions quotidiens et 300 liaisons routières quotidiennes », abonde encore le directeur général.

Pour toutes ces raisons, l’entreprise publique a décidé de se tourner vers le numérique, qui a déjà « capté l’usage pour les envois les plus urgents », souligne Philippe Dorge. La formule « e-lettre rouge », permettra d’envoyer des documents de trois feuillets maximum depuis le site laposte.fr ou dans un bureau de poste, via un automate ou avec l’aide d’un postier (le HuffPost vous explique toutes les démarches dans cet article).

Fracture numérique

Mais cette évolution suscite la colère de certains Français qui dénoncent, entre autres, un coup porté aux plus âgés, démunis face à l’usage d’internet. Sur Twitter, cette critique est reprise par des personnalités politiques : « La fin du timbre rouge et son remplacement par une e-lettre va pénaliser encore plus les Francais qui vivent la fracture numérique », a déploré jeudi Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat.

La députée de la Drôme Marie Pochon a, elle aussi, interpellé le groupe sur son compte Twitter ce jeudi : « Bonjour Groupe La Poste, confirmez-vous vouloir faire payer aux usagers 1,49 € l’envoi de ce qui s’apparente à un e-mail ? »

13 millions de Français sont effectivement en situation d’« illectronisme », selon l’Insee, et une personne de plus de 75 ans sur deux n’a pas d’accès à Internet depuis son domicile.

« Côté utilisateurs, la ’e-lettre’ n’a aucun intérêt pour tous ceux qui utilisent les courriels gratuits : elle coûte cher et ralentit le transfert ! Elle est impraticable pour les 8 millions de personnes (principalement âgées ou démunies) sans équipements informatiques à domicile » , a écrit sur Twitter François Asselineau, président-fondateur de l’UPR, dans un long message inquisiteur intitulé « Le scandale de la fin du timbre rouge ».

Le groupe assure que les bureaux de Poste seront habilités à venir en aide aux personnes manquant d’équipement ou mal à l’aise avec l’informatique. « Nous devrions tous être équipés de téléphones professionnels », a souligné une employée dans le quotidien Ouest-France.

Plus de risque de piratages ?

Les syndicats sont aussi vent debout contre la création de ce nouveau dispositif dématérialisé et s’inquiètent des suppressions de postes qui en découlera. « C’est un coup fatal au service public. Même si le courrier baisse, le timbre rouge c’est quelque chose sur lequel beaucoup d’usagers se reposent et aussi de nombreux professionnels », a taclé ce vendredi Nicolas Galepides, membre du bureau fédéral de Sud-PTT, sur RMC.

Le syndicaliste déplore aussi une méthode peu « sécurisée ». Effectivement, la Poste a expliqué que les courriers seraient imprimés dans « des espaces avec accès sécurisés et restreints aux personnes dûment habilitées et formées ». Mais les scans de la « e-lettre rouge », archivés pendant un an dans les datacenters français du groupe, sont exposés à des risques de piratage, craignent des employés de La Poste interrogés par Ouest-France.

Par ailleurs, cette nouvelle formule sera plus coûteuse, la « e-lettre rouge » coûtera 1,49 euro, contre 1,43 euro pour le timbre rouge actuel.

Ce n’est pas le seul changement que compte opérer le groupe : La Poste a également annoncé qu’à partir du 1er janvier 2023 les courriers estampillés du timbre vert mettront plus de temps à être distribués. Ils le seront en trois jours et non plus en deux.

VIDÉO- Qu’est ce qui va remplacer le timbre rouge en 2023 ?