Le film « Barbie », dernier tour de force de Mattel pour redorer l’image de sa célèbre poupée ?

Ryan Gosling et Margot Robbie, ici dans « Barbie » de Greta Gerwig.
Ryan Gosling et Margot Robbie, ici dans « Barbie » de Greta Gerwig.

CINÉMA - Business is business. Et ça, Mattel - second fabricant mondial de jouets derrière Lego - le sait bien. Ce mercredi 19 juillet, la plus célèbre de ses poupées, Barbie, est pour la première fois de son histoire la star d’un film, alors même qu’on l’a déjà aperçue dans un nombre démentiel de séries, téléfilms, jeux vidéo ou livres.

Calibré pour être le blockbuster de l’été, ce long-métrage avec Margot Robbie et Ryan Gosling nous entraîne dans un voyage de Barbie, alors en pleine crise existentielle, à travers le monde des humains. Une comédie drôle et sensible signée Greta Gerwig, cinéaste américaine « ultra-féministe », pour reprendre ses mots.

L’idée du film n’est pas d’elle. Elle est née d’une commande du grand groupe de jouets, en 2018. Le nom de la réalisatrice a été soufflé par Margot Robbie, également productrice aux côtés de Mattel. Rien d’étonnant : à Hollywood, Greta Gerwig est saluée pour son traitement intelligent du passage à l’âge adulte et ses héroïnes aux personnalités complexes, comme dans Lady Bird ou son adaptation des Filles du docteur March.

Découvrez ci-dessous la bande-annonce du film :

Le poids de Mattel sur ses épaules est lourd. Le budget du film est estimé à 100 millions de dollars, d’après Bloomberg. Et chez Warner Bros., on espère qu’il rapportera au moins 60 millions de dollars à l’issue du premier week-end d’exploitation.

Son possible impact - qu’il soit bon ou mauvais - sur l’image déjà altérée de ses poupées n’est pas négligeable et ses dirigeants l’ont compris. Inquiet, Richard Dickson, actuel directeur des opérations de Mattel, s’est rendu à quatre reprises sur le tournage, au Royaume-Uni, pour négocier certains changements dans le scénario. Le PDG Ynon Kreiz, aussi. Mais lui, pour observer Will Ferrel. L’acteur américain campe son rôle devant la caméra.

Une campagne offensive

Pas question qu’un cheveu dépasse, comme en France où les journalistes n’ont pas pu accéder au film en avant-première. Aucun détail n’a été épargné dans la promo. De la maison de Ken sur Airbnb au cabriolet de Barbie dans le jeu vidéo Forza Horizon 5, en passant par une Xbox rose, des bougies homesick et des collaborations vestimentaires avec Primark, Forever 21, Gap ou Zara... La production a noué des partenariats commerciaux avec plus de 100 marques, d’après le Guardian.

L’objectif ? « Faire que Barbie soit partout et omniprésente » cet été, selon Lisa McKnight, responsable internationale de Barbie et des poupées de Mattel, interrogée par le site d’information spécialisé en économie Axios. À terme, cela devrait également rapporter à l’entreprise entre 5 et 15 % des recettes selon les partenariats, d’après le Wall Street Journal.

Pour Mattel, il n’y a pas de petites économies. Les ventes mondiales du fabricant de Barbies ont accusé un recul de 22 % au début de l’année 2023 par rapport à la même période l’année précédente. Malgré un boom pendant la pandémie, Barbie est en petite forme, dans les chiffres comme dans l’opinion publique.

Une image décriée

Loin des évolutions de la société, la poupée Mattel a essuyé de nombreuses controverses, notamment racistes. Comme en 2009, avec la mise en vente d’une série de poupées noires accessoirisées de chaînes en argent inspirées des rappeurs. Sourire, poitrine, tour de taille... Même si le jouet a changé au fil des décennies depuis son apparition en 1959, sa plastique irréaliste et stéréotypée lui est encore beaucoup reprochée.

Voilà un moment que la firme tente d’y répondre en proposant, par exemple, une variété de Barbies aux silhouettes plus proches de la vie de tous les jours. Certaines d’entre elles ont plus de hanches, d’autres sont plus petites, en fauteuil roulant, avec une jambe artificielle ou atteinte de vitiligo.

À celles-ci s’ajoutent aussi une série à l’effigie de femmes inspirantes, comme l’actrice américaine trans Laverne Cox, la mathématicienne Katherine Johnson, l’escrimeuse engagée contre l’islamophobie Ibtihaj Muhammad ou la primatologue britannique Jane Goodall. Plus récemment, la première Barbie atteinte du syndrome de Trisomie 21 a fait son entrée.

À la conquête de Hollywood

Mais voilà, rien n’y fait. Le cours de l’action de Mattel est inférieur d’environ 40 % à ce qu’il était lorsque toutes ces nouvelles Barbies ont commencé à arriver, en 2016. Alors, comme le premier Transformers en 2007 (qui a rapporté 700 millions de dollars à ses producteurs), le film Barbie peut-il faire exploser les ventes ? Les spécialistes prennent des précautions. Ils rappellent que c’est d’abord un film pour adultes.

Et selon les dirigeants, ce n’est pas tant Barbie justement qui se retrouve au coeur des plaisanteries du film, mais plutôt leurs propres réticences à faire évoluer la poupée selon son époque. De là à y voir une sorte de mea culpa ?

Pas un mot. Pour l’heure, un seul objectif : Hollywood. Parallèlement à la sortie de son film Barbie, Mattel a évoqué avoir 45 projets en développement pour exporter ses autres produits phares sur nos écrans, comme le jeu de cartes UNO ou ses petites voitures Hot Wheels. Moteur... action.

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